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Sur le vif - Page 1033

  • Pierre Maudet et la machine à perdre

     

    Sur le vif - Lundi 14.03.11 - 11.00h

     

    Il était déjà étrange qu’avec 42 élus sur 80 au législatif de la Ville de Genève, la gauche pût régner à l’exécutif, lors de la dernière législature,  avec quatre magistrats sur cinq. Il serait hallucinant qu’elle puisse placer le même nombre d’élus à l’exécutif alors qu’elle n’aligne plus, depuis hier soir, que 39 conseillers municipaux sur 80. Ce qui s’appelle, en arithmétique comme en politique, une MI-NO-RI-TE.

     

    Hallucinant, et c’est pourtant bien ce qui risque de se passer le 17 avril. La gauche n’a rien à se reprocher, elle a bien raison de jouer son jeu. Mais la vieille, l’éternelle machine à perdre est en train de se mettre en marche du côté de l’Entente. Sous des paravents moraux, elle dissimule mal l’ambition d’un homme de vaincre en solo : Pierre Maudet.

     

    L’Entente, hier, a réalisé un résultat catastrophique. Le PLR perd cinq sièges, par rapport à la somme libérale-radicale de la dernière législature. Le PDC, malgré une campagne Hollywood, en perd deux. Seule, l’Entente court dans les eaux glacées de la Bérézina. Au mieux, elle pourrait placer Maudet, Punkt Schluss, et c’est d’ailleurs le calcul du radical, qui doit rêver intérieurement de demeurer dans sa superbe solitude, au fond bien confortable, de ces quatre dernières années.

     

    Il existe, pour l’Entente, une chance de placer, disons, au moins deux personnes. C’est de jouer la droite élargie, seule et unique recette de succès. En clair, pratiquer, à droite, exactement les mêmes alliances que socialistes et Verts n’ont, eux, jamais hésité à sceller avec la gauche de la gauche. Michel Chevrolet et Florence Kraft-Babel sont ouverts à cette hypothèse. Pierre Maudet, en complicité avec les obédiences de quelque cabinet noir de son parti, s’y refuse obstinément. C’est la machine à perdre. Aujourd’hui, pour le gouvernement de la Ville de Genève. Le 23 octobre, pour le Conseil des Etats.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Révélation Carasso

     

    Samedi 12.03.11 - 11.13h

     

    Il fait tout juste. À peine le verbe est-il un peu long, mais c’est de famille. Calme, réfléchi, intériorisant ses ébullitions, contemplant l’ennemi avec douceur pour mieux l’ajuster, le président des socialistes en Ville de Genève, Grégoire Carasso, est une révélation politique. Il ira loin. Nullement pressé, ce Don Quichotte apaisé prend le temps de construire, livre un combat après l’autre. Par exemple, la campagne de son parti pour les Municipales de demain. Sur fond de rivalité, silencieuse à l’arme blanche, avec les Verts.

     

    Grégoire Carasso, 30 ans, adjoint au rectorat de l’Université de Genève, est un homme cultivé, avec qui on peut parler Histoire contemporaine, Europe, systèmes politiques des pays qui nous entourent. Il a étudié guerres et traités, connaît le tragique de l’Histoire, parle simple et clair. Juste un peu long. Mais c’est de famille.

     

    Grégoire Carasso ne pratique pas l’assistance au suicide. Lorsqu’un adversaire, en direct sur un plateau télé, décide de mettre fin à ses jours, il le laisse tendrement couler son destin. Il le regarde se noyer, jusqu’à l’ultime ondulation, sur le bleu moiré du lac. Alain de Kalbermatten, son homologue PDC dans la campagne, lui propose, en pleine bataille et à trois jours de l’échéance, une paix séparée (très appréciée de ses collègues de l’Entente…), « pour contrer le MCG ». Avec douceur, il la repousse. La Chapelle Sixtine s’écroule, il demeure de marbre. Vivre et laisser mourir, l’une des clefs de la survie politique.

     

    Dans le même débat, interrogé sur la différence de vitalité entre les socialistes de la Ville et ceux du Canton, non seulement il confirme, mais enfonce. Exécute. Le tout sans la moindre voyelle de violence, chaque syllabe sur le même ton que l’autre, la petite musique de la sentence, juste déclinée. « Il faudra qu’après ces élections, nous en tirions les conséquences ». Le meurtre, en silence, douillet comme un oreiller de plumes. La mort blanche. Le talent.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • Le lien, le cœur, la patrie

     

    Jeudi 10.03.11 - 13.02h

     

    Sur les sites internet de vos journaux préférés, ce matin, des braquages, encore des braquages. Souvent, on le sait, les auteurs de ces méfaits viennent de France, par exemple des fameuses banlieues lyonnaises. Nos amis français sont d’ailleurs les premiers à pâtir de leurs ravages. Bien sûr, nulle fermeture de frontière n’arrivera au risque zéro. Bien sûr, ceux qui veulent passer le pourront toujours. Bien sûr encore, le flux des pendulaires transfrontaliers, nécessaires à l’économie genevoise, ne doit pas être entravé par d’excessifs contrôles. C’est dire si la situation est difficile.

     

    Mais une chose est certaine. Genève a besoin de beaucoup plus de gardes-frontière, ces derniers doivent multiplier les signaux de leur présence, concentrer leur action sur la détection du banditisme. Surtout, il serait bon qu’une partie de la classe politique, nourrie de l’illusion, très libérale-libertaire, d’un monde sans frontières, reprenne conscience d’une réalité : entre Genève et Annemasse, nous sommes certes amis, voisins, nous nous respectons, nous échangeons des projets. Tout cela, oui. Mais nous sommes, jusqu’à nouvel ordre, deux pays différents.

     

    Très bien s’entendre avec son voisin, l’inviter chez soi, aller chez lui, s’échanger des services, ne signifie pas la confusion des terrains, ni celle des droits de propriété. Nous sommes tout proches, c’est vrai. Mais nos cultures politiques, la profondeur de nos Histoires respectives, nos choix de rattachement nationaux (1815, 1860) nous lient aussi à des matrices qui s’appellent Paris ou Berne, Lyon ou Lausanne, et qui s’appellent encore, pour faire court, des pays.

     

    Je ne sache pas, à moins d’avoir mal écouté ma radio ce matin, que ces entités-là aient été dissoutes. Ni aboli, de part et d’autre, le profond sentiment d’appartenance, également respectable à Annecy, Gex, Genève ou Nyon, à une patrie. Ce mot, peut-être, fera ricaner les bobos, les libertaires, les ultralibéraux. Il ne fait absolument pas sourire l’immense majorité des gens, souvent modestes, souvent démunis. Et dans le cœur desquels demeure, entre autres sentiments, ce lien-là, si puissant.

     

    Pascal Décaillet