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Commentaires GHI - Page 213

  • PLR : la fusion est un échec

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 10.02.15

     

    Il y a eu, dans l’Histoire de la Suisse moderne, un très grand parti. Il a jeté les bases de notre pays, inventé notre système politique, lancé la Suisse industrielle et financière, percé nos grands tunnels, donné naissance aux grandes écoles, largement contribué à la mise en place de nos assurances sociales. Il s’appelait le parti radical. Issus, en matière politique comme dans le domaine économique, de l’Europe des Lumières, porteurs de l’héritage de la Révolution française, on a commencé, au début du dix-neuvième siècle, par les appeler « les Républicains ». Ils étaient adeptes du « Freisinn », le libre arbitre, au sens philosophique très large. Ils aimaient passionnément l’Etat, l’institution, mais aussi l’industrie, le travail, le progrès. Toute l’Histoire de la Suisse, de 1848 (voire déjà 1798) à aujourd’hui, ce fut la leur. Leur construction. Leur œuvre. Jusqu’à une époque récente. Jusqu’à, hélas, leur fusion avec les libéraux.

     

    Les libéraux, c’est aussi une tradition très intéressante. Mais seulement dans trois cantons : Genève, Vaud, Neuchâtel. Aussi un peu Bâle-Ville. C’est tout. Aucune dimension nationale. Aucun rôle important sur le plan fédéral. Mais assurément, dans ces trois cantons-là, un rôle majeur, à la fois patricien, culturel, identitaire. Une très grande richesse d’individus : Olivier Reverdin à Genève, Jean-François Aubert à Neuchâtel, tant d’autres. Un rôle très attaché à la dimension cantonale de la politique : les libéraux ont longtemps été les idéologues, ô combien talentueux, du fédéralisme. Assurément une belle lignée politique, qui aura marqué nos dix-neuvième et vingtième siècles, en Suisse romande.

     

    Seulement voilà, la greffe a été une erreur.  Les conceptions du monde ne sont simplement pas les mêmes. Les radicaux, parti d’Etat. Les libéraux, entièrement construits autour de l’idée de réussite individuelle. On ne mélange pas impunément ce qui ne se marie pas. Les radicaux, parti de l’industrie. Les libéraux, parti de la finance. Les radicaux, très attachés à la dimension confédérale de la Suisse. Les libéraux, chantres des cantons comme Etats, les plus souverains possibles à l’intérieur du pays. Les radicaux, parti de dimension nationale, présents dans tous les cantons. Les libéraux, ultimes repaires de la résistance patricienne à Genève, Vaud et Neuchâtel. Dès le départ, quelles que fussent les bonnes volontés, le mariage n’avait aucune chance. C’était comme importer du cassoulet dans l’ambiance éthérée d’un salon de thé.

     

    A Genève, malgré les louables efforts de tous, la fusion est un échec. Aux élections de l’automne 2013, le PLR, nouveau groupe au Grand Conseil, a essuyé une perte sèche par rapport à l’addition des deux députations de naguère, la libérale et la radicale. Surtout, l’influence politique de la famille recomposée, certes encore importante, est en perte de vitesse. Sa lisibilité aussi. Ses grandes figures sont en recul. Oh, ils leur reste de beaux jours, ils vont encore placer l’un des leurs – un libéral – à la tête de la FER (Fédération des Entreprises Romandes), on n’a pas fini d’entendre parler d’eux. Mais le déclin commence à poindre, inexorable. La fusion, assurément, y aura été pour beaucoup. Ils n’aiment pas qu’on le dise. C’est pourtant la réalité.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Pierre Maudet : la dérive autoritaire

     

    Commentaire publié dans GHI . Mercredi 04.02.15


     
    Pierre Maudet règne sur la police genevoise. Mais a-t-il la confiance des policiers ? La question n’est pas anodine. Être statutairement le chef est une chose, gagner les cœurs en se faisant respecter par la base en est une autre. Oh certes, la police n’est pas un monolithe : le chef du Département y compte sans doute de nombreux partisans. Mais une chose est sûre : il s’y est taillé aussi, en moins de trois ans, de très solides inimitiés. Et pas seulement le rugissant Christian Antonietti, le chef du syndicat des policiers (UPCP), qui semble avoir érigé l’anti-Maudet en combat personnel. Non, il y a une grogne contre le chef du Département. Reste à savoir quelle est son envergure.


     
    Une clef d’explication, assurément, sera le vote du peuple sur la loi sur la police, le 8 mars. Scrutin majeur, test de confiance pour le conseiller d’Etat. Plus s’égrènent les jours, plus cette votation prend des allures de plébiscite (ou de rejet) du magistrat, dans la confiance qu’on lui prête pour continuer à tenir ce rôle central et régalien. Oh, Pierre Maudet a toutes les chances de très bien s’en sortir : il est populaire, le mieux élu du Conseil d’Etat, la majorité politique soutient sa loi du 8 mars, la grève de l’habillement de l’été 2014 reste en travers de la gorge de la population. Et puis, franchement, tout le monde désire une police qui fonctionne. Et on voit mal, aujourd’hui, dans la classe politique genevoise, qui d’autre que Pierre Maudet pourrait présider politiquement à ses destinées.


     
    Le 8 mars, les Genevois ne voteront pas sur le fond de la loi. L’objet est trop complexe, manque totalement d’unité de matière, mélangeant les questions de structure, de représentation syndicale et de droits plus ou moins acquis. Malgré tous nos efforts de clarification, dans les débats, le vote du 8 mars sera pour ou contre Maudet. Pour ou contre sa personne. Toute l’Entente (PLR et PDC) est derrière lui, car une défaite dans un dicastère aussi amiral que celui de la sécurité serait fatale pour la suite de la législature. Le magistrat est donc bien placé pour gagner. Mais rien n’est sûr. Et surtout, vainqueur ou non le 8 mars, l’éternel jeune premier de la politique genevoise devra, tout en se faisant respecter, atténuer certaines de ses tonalités face à la base. Il y a des choses qui ne passent pas.


     
    Par exemple, le respect des droits syndicaux. On pense ce qu’on voudra de la grève du zèle, avec distribution de chocolats, qu’envisageaient les policiers genevois au matin du 29 janvier, journée de débrayage de la fonction publique, l’envoi d’officiers dans les postes pour s’y opposer hiérarchiquement ne constituait pas un signal d’intelligence de la part du chef. Ne revenons pas sur l’absolu verrouillage de l’information, déjà mentionné dans ces colonnes, ni sur le flicage de gendarmes, depuis le Japon, coupables d’avoir commis le grand crime d’un « like » sur un réseau social, sur un site par ailleurs anodin. On se dit tout de même que l’enfant terrible de la politique genevoise, ce fils de Fouché et de Cambacérès, mérite mieux, dans ses occupations, que ce genre de Nipponeries. On a envie de lui dire : « Tu es le chef, c’est bien. Nul ne le conteste. Mais garde-toi de la dérive autoritaire. Elle pourrait profondément t’affaiblir. Genève n’en sortirait pas gagnante ».
     


    Pascal Décaillet

     

  • Le vote étranger n'existe pas

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 28.01.15


     
    A Genève, les étrangers qui résident depuis plus de huit ans dans le canton peuvent voter sur le plan communal. On peut être pour ou contre, mais c’est ainsi, c’est la loi. Dès lors, pour un canton qui compte tant de personnes étrangères sur son territoire, on imagine aisément l’aubaine que peut représenter le « vote étranger » dans une campagne électorale. Il est donc de bonne guerre que tous les partis fassent à cet électorat les yeux de Chimène, jurant à ces personnes qu’on va entreprendre toutes choses pour leur intégration. Cela s’appelle une part de marché : il est d’usage de la guetter avec appétit. La gauche municipale genevoise s’est notamment fait une spécialité d’aller appâter l’électeur étranger, depuis des années.


     
    Seulement voilà, « étranger », en République, ça ne veut rien dire. Il n’y a pas d’électeur étranger. Pas plus qu’il n’y a d’électeur homme, d’électeur femme, d’électeur catholique, ou d’électeur athée. Il n’existe en République que des citoyens. Ou tour au moins, si l’étranger a le droit de vote, on dira qu’il existe un corps électoral. C’est tout. Vouloir segmenter ce corps en catégories communautaristes, c’est pécher contre l’esprit même de la République. Tout en respectant donc parfaitement le droit des étrangers à voter pour qui ils veulent, ou ne pas voter, on accueillera avec la plus grande des circonspections toute forme de discours politique visant à les draguer en particulier. C’est juste de la démagogie en période électorale. Elle a le droit d’exister. Et nous, celui de ne pas être dupe.


     
    Pascal Décaillet