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Commentaires GHI - Page 215

  • PAV : poudre aux yeux !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 17.12.14

     

    Le PAV : voilà une décennie qu’on nous balance des promesses. On nous fait miroiter des gratte-ciel dans un futur incertain. Une décennie de belles paroles, comme dans la chanson de Dalida, mais résultat : rien du tout ! Pas la moindre tour, même pas de chantier. Juste des maquettes. Des projets. Des accords-cadres, entre l’Etat et les communes. On brode sur l’avenir, on spécule. Mais on ne prend ni pelle, ni pioche. Rien. Le néant. Le quartier Praille-Acacias-Vernets, qu’on nous présentait il y a dix ans comme un nouveau Manhattan, présente exactement la même allure fin 2014 que fin 2004. Et en 2024, ils seront là, les gratte-ciel ?

     

    Le PAV, c’est comme le Grand Genève. La génération politique qui aura le moins construit depuis la guerre s’avère, par paradoxe, celle qui fait le plus valser les projets dans nos imaginaires. Elle joue avec nos désirs, flatte notre urbanité verticale, celle du héros de l’Amérique, de Kafka, entrant en rade de New York, l’une des premières pages les plus saisissantes de l’univers romanesque. En chacun de nous, il y a un révolutionnaire de l’urbanisme qui sommeille, alors allons-y, caressons ses rêves, excitons ses désirs, donnons-lui du building, densifions sa ville rêvée, ça ne coûte rien. Et ça apporte des électeurs.

     

    Oh, dans l’ordre du virtuel, elle est grandiose, Genève. On y truffe la Praille de tours, on y traverse rade et lac, on y construit des logements par dizaines de milliers, on y voit grand, jusqu’à abolir toute frontière avec la France, constituer une « région » dont la ville de Calvin serait la capitale naturelle. Séduisant, peut-être. Mais juste un rêve. Une projection. Quelques fragments de désir, échappés du réel. Evaporés. Le PAV, le Grand Genève, c’est cela : des gouvernants qui règnent par le perlimpinpin. Jeteurs de poudre ! Où l’espace politique devient le Grand Magic Circus. Avec des baguettes, des chapeaux dorés. Et nous, dans le rôle des pigeons.

     

    Où sont-ils passés, nos conseillers d’Etat constructeurs ? Nos Jaques Vernet, nos Christian Grobet, et même nos Philippe Joye ? Ces hommes-là n’arrivaient pas avec des projets mondiaux, mais avec de cartes de chantier, concrètes, structurées. Ils informaient la presse lorsque le projet était mûr, les négociations menées, les accords passés. Christian Grobet, dans son bureau de la rue David-Dufour, dépliait une carte pour quelques journalistes seulement, dont votre serviteur, et se livrait à un exposé incroyablement pointilliste, digne d’un chef de chantier, sur l’Alhambra ou le Goulet de Chêne-Bourg. C’était l’extrême contraire : la tyrannie de l’infiniment petit, à la merci d’un magistrat incapable de déléguer, mais animé d’un sens prodigieux du concret. Pour ma part, je préfère la rugosité de cette folie-là, à l’insoutenable légèreté des miroirs aux alouettes.

     

    Je propose ici, sur le PAV, un moratoire du silence. Tant que nos autorités n’ont pas totalement débloqué un projet, avec autorisations de construire et financement sonnant et trébuchant, elles se taisent. Parce que pour l’heure, chaque nouvelle parole, chaque nouvelle promesse, ne font que ruiner un peu plus le crédit de ceux qui les brandissent. De l’infini au zéro, il n’y a parfois que la courbe sublime de l’absurde. Le saviez-vous ?

     

    Pascal Décaillet

     

  • L'Histoire suisse est passionnante !

     

    Commentaire publié dans GHI - 10.12.14


     
    De nombreuses voix s’élèvent, à juste titre, pour que l’Histoire suisse soit mieux enseignée, ou même soit enseignée, tout court. Totalement d’accord sur le fond, mais avec une importante précision. L’Histoire suisse qui compte, celle qui détermine nos sociétés actuelles, les rapports de force entre nos partis politiques, les relations de chaque canton à la question confessionnelle, ou à la laïcité (Genève, Neuchâtel), ne remonte pas à la mythologie du treizième siècle, mais à une période beaucoup plus récente. Par exemple, 1798. Ou 1848.


     
    Non qu’il faille faire l’impasse sur Sempach et Morgarten. Mais enfin, la société d’aujourd’hui, nos systèmes parlementaires, l’Etat fédéral (1848), notre démocratie directe (1891), le scrutin proportionnel (1919, dans le sillage de la grève générale de novembre 1918), la paix du travail (1937), les grandes assurances sociales (AVS, 1947), c’est dans les deux derniers siècles qu’ils ont vécu leurs enjeux décisifs.
     


    Si vous racontez aux élèves l’Histoire de la Suisse d’aujourd’hui, l’essor industriel, la part du Capital dans les entreprises, le développement des banques, le réseau des transports, les conquêtes sociales, vous les passionnerez. Oui, j’affirme ici que le dix-neuvième et le vingtième siècles sont totalement déterminants pour comprendre l’état actuel du pays. En gros, depuis la Révolution française, cette immense rupture dans l’Histoire des hommes, qui n’a épargné ni la Suisse, ni les Allemagnes. Cette Histoire-là, jointe à celle des idées et de la presse, fera naître chez les jeunes des vocations. Canton par canton. Et tant pis s’il faut un peu moins mettre l’accent sur 1291.
     
     
    Pascal Décaillet

     

  • Cessons d'attaquer l'Etat !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 10.12.14
     
     
    J’ai suivi jour après jour, heure après heure même, les longues querelles autour du budget 2015. Il y a, comme tous les ans, une part de tragi-comédie. Laissons aux politiciens les petites joies de ce théâtre. Prenons juste un peu de hauteur. Et plaçons les attaques contre la fonction publique, particulièrement vitriolées en cet automne 2014, dans leur contexte : celui d’une véritable offensive des milieux libéraux, voire ultra, contre tout ce qui ressemble au service universel, tout ce qui provient de l’Etat. Cela, pour une raison simple : ces gens-là n’ont pas la culture de l’Etat. Tétanisés par le seul mirage de la réussite individuelle, ils ne parviennent pas à entrevoir la beauté de la construction collective d’une communauté humaine.


     
    Il ne s’agit pas ici de défendre des privilèges. Assurément, la fonction publique n’en est pas dépourvue, notamment pour les hauts cadres. Il lui appartient, dans chaque Département, de faire le ménage. Mettre fin au copinage, aux prébendes et aux placards dorés, oui : dans le Petit Etat (les fonctionnaires) comme dans le Grand (les régies). Ainsi, rien, je dis bien rien, ne justifie les salaires de certains directeurs, du côté par exemple de l’aéroport. Oui, s’il y a des économies à réaliser, c’est bien du côté des hauts revenus, des nababs et des placards dorés. Mais ces excès ne justifient en rien la vague d’assaut, parfaitement pensée et programmée, contre les serviteurs de l’Etat, dans leur ensemble.


     
    Le plus choquant, c’est qu’on s’en prenne au personnel. Dans un canton qui est en train de griller deux milliards pour une liaison ferroviaire dont j’attends qu’on nous prouve l’efficacité, il y a d’autres arbitrages à opérer que se montrer pusillanime sur l’octroi d’une annuité, ou sur l’aide aux plus faibles au sein du DIP. Et de grâce, qu’on ne vienne pas nous faire la leçon sur la différence entre budget d’investissement et de fonctionnement : pour le CEVA, nous passons tous à la caisse, peu importe la ligne budgétaire. Il faudra d’ailleurs un jour revenir sur l’incroyable arrogance de ces quelques roitelets de la Commission des finances, une quinzaine de personnes sur près d’un demi million, qui n’en peuvent plus de distiller leur jouissance dans leur pouvoir de faire peur, brandir les coupes. Naguère deux libéraux agrippés à leur blason, aujourd’hui d’autres, avec hélas l’appui de la toute récente aile ploutocrate du MCG.


     
    Pour ma part, je suis tout, sauf fonctionnaire. Petit entrepreneur depuis bientôt neuf ans, j’assume le risque économique, j’ai toujours un peu peur. Je sais ce que signifie payer un loyer professionnel, une charge salariale, les assurances sociales. Mais voilà, à côté de cela, je suis citoyen. Et comme tel, je veux contribuer à entretenir ce qui nous rassemble, dans l’amour du pays et celui de la République. L’école, la santé, la sécurité et font partie au premier plan. Elles doivent certes produire des efforts de gestion, nous sommes tous d’accord. Mais s’acharner à les démanteler, en multipliant les attaques ou les petites piques, relève d’un esprit qui n’est pas le mien. J’appelle ici la population à se battre pour l’idée de l’Etat : il est notre meilleur rempart contre la jungle, la loi du plus fort, la tyrannie du possédant, l’arrogance du pouvoir. 

     


    Pascal Décaillet