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Commentaires GHI - Page 165

  • Les députés DOIVENT contrôler le Conseil d'Etat !

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 13.06.18

     
    A quoi sert un Parlement ? Dans les grandes lignes, à deux choses : faire des lois, et contrôler l’activité du gouvernement et de l’administration. Prenez l’Histoire de l’institution parlementaire, depuis la Révolution française : elle s’inscrit dans cette double mission, au reste déjà entamée sous l’Ancien Régime, alors que le mot « Parlement » faisait plutôt référence, en France, à des Chambres judiciaires régionales, souvent frondeuses face au pouvoir de Paris, et constituant ainsi une amorce de contre-pouvoir. En Suisse, nous avons 26 Parlements cantonaux, et un Parlement fédéral, lui-même composé de deux Chambres (le National, les États), nous avons une Histoire complexe et décentralisée, mais aujourd’hui, les missions de tous ces Parlements sont les mêmes. Faire des lois. Et contrôler l’exécutif.

     

    La première de ces deux tâches fonctionne très bien. Trop, peut-être même : d’aucuns, à juste titre, condamnent l’inflation législative des élus, née de la volonté de se mettre en valeur en inondant le plénum de motions ou projets de loi. Beaucoup, parmi les citoyens, considèrent que nous avons trop de lois, sur le plan cantonal comme fédéral. Trop de loi tue la loi ! Mais la seconde des missions, contrôler le gouvernement, combien de députés l’assument-ils vraiment ? Combien d’entre eux ont-ils seulement intégré, dans leur conscience et leur culture politique, que cette activité de contrôle ne relevait en rien du facultatif, encore moins d’un luxe, mais d’un impératif et d’un devoir ? Et qu’ils devaient les appliquer à TOUS les ministres, y compris ceux de leur parti. Trop d’élus s’imaginent qu’ils doivent être les groupies de leur représentant à l’exécutif. Eh bien désolé de le leur dire comme cela, mais ils n’ont rien compris à leur cahier des charges.

     

    Les députés, qui sont-ils, si ce n’est les représentants du peuple ? Leur Collège, qu’on appelle dans les cantons le « Grand Conseil », ne doit strictement rien au gouvernement, n’a aucun compte à lui rendre, c’est même l’inverse. Alors, de grâce, laissons travailler en paix les députés, comme MM Thomas Bläsi ou Bertrand Buchs, qui ont des choses à nous dire en matière de critique du gouvernement : ILS SONT LÀ POUR CA ! Ils ont été élus pour exercer ce contre-pouvoir, au service du peuple, pour lutter contre l’arbitraire des ministres, repérer les abus de pouvoir, c’est leur boulot, leur job ! Que les ministres mis en cause, ou leurs officines, essayent de les faire taire, c’est ma foi le jeu. Mais que d’autres députés, bien moins actifs qu’eux dans la mission de contrôle, se permettent de venir leur faire la leçon, là nous devons réagir ! Nous, les citoyennes et citoyens de ce canton, nous voulons des élus actifs, dynamiques, courageux, fouineurs, et surtout sachant résister aux pressions. A MM Bläsi et Buchs, qui ont pris des risques en faisant leur boulot, je dis bravo. A leurs pairs qui leur tombent dessus, je dis : « Changez de métier. Et allez directement cirer les bottes des puissants ».

     

    Pascal Décaillet

     

  • Saint-Pierre : un discours pour rien

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 06.06.18

     

    Le discours triste et sec d’un homme qui pense à autre chose. Le catalogue, impeccable et ennuyeux, de sept intentions gouvernementales juxtaposées, sans beaucoup de lien entre elles. Un homme en chaire, sans le moindre sourire, qui procède à une énumération, entendez la part la plus fastidieuse de la rhétorique, celle où les mots défilent au pas. Je pensais Pierre Maudet meilleur dans l’ordre de l’oralité, capable de surprises, de ruptures de rythme, de pointes d’humour (il l’est, dans la vie), de variations dans les tonalités. Là, nous eûmes une sorte de lecteur contre son gré, juste l’officiant d’une parole qui ne serait pas sienne, mais collective. Comme si le verbe, âme et principe du monde, pouvait surgir d’autres entrailles que de l’individu.

     

    Alors, quoi ? Que s’est-il passé ? L’homme, attaqué politiquement, le jour même, par quatre partis du Grand Conseil sur sa petite virée en jet privé, avait-il l’esprit ailleurs ? C’est fort possible. Mais en rhétorique, peu importent les causes, seul compte l’effet. Celui qui prétend, de la chaire d’une Cathédrale où prêcha Calvin, s’adresser au public, n’a pas droit à l’erreur. Chaque faille l’expose au Jugement dernier. C’est comme l’art du micro, qui amplifie la faiblesse autant que la vertu des voix. Après tout, nul d’entre nous n’est obligé de se mettre en situation de devoir prendre la parole dans ce lieu où, pendant des siècles, l’austérité fut sanctifiée, la démesure prohibée, le péché vilipendé. Nul d’entre nous, jamais, n’est obligé de s’approcher d’un micro.

     

    Je n’analyse pas ici le fond du discours, qui définit fidèlement les ambitions du collège pour cinq ans. Avec une telle égalité des parts laissée à chacun qu’il y manque juste l’essentiel : le souffle d’un style. Ce dernier, n’en déplaise aux pédagogues du collectif, ne peut surgir que de l’univers intérieur d’un individu : on n’écrit jamais rien de bon à quatre mains, encore moins à quatorze. Et celui qui parle, toujours, s’approprie. Le rhétoricien est capteur, pirate, il saisit au vol, ramène à lui : l’oralité est, par essence, le domaine où rien ne se partage, si ce n’est justement la parole libérée du locuteur.

     

    Alors certes, il y eut tout ce qu’il fallait, un peu de Léman Express, un zeste de formation obligatoire jusqu’à 18 ans, quelques miettes sur l’excellence hospitalière : les six collègues ont dû être contents, nul ne fut oublié, sauf que le résultat rhétorique fut un échec. D’autant plus étonnant que Pierre Maudet est, d’ordinaire, plutôt bon à l’oral, mais il faut que ça vienne de lui, de sa révolte, de ses entrailles, comme à la magnifique époque de la rue du Stand, et non de l’ennui mortel d’un exercice imposé.

     

    Cet échec, dans l’ordre du discours, ne préjuge de rien. Pierre Maudet peut devenir un très bon Président. Il pourra, en d’autres circonstances, retrouver sa verve. Il aura son nom dans l’Histoire, dans les dictionnaires, sans doute sa rue. Il aura juste peiné, en ce lieu et en ce moment-là, à réveiller Calvin et les grands prédicateurs. On y survit, assurément. On survit à tout. Ou presque.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Les joujoux, les poux

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    Commentaire publié dans GHI - 30.05.18

     

    En politique, tout a un sens, à commencer par les mots. Ainsi, le nom des Départements : celui de l’Instruction publique devient « Formation et Jeunesse ». Il garde sa titulaire, Anne Emery-Torracinta, mais change bizarrement de nom, tout en perdant la culture et le sport.

     

    Ce nouveau nom est malvenu. Non que « Formation et Jeunesse » ne constituent pas un beau duo, ni une belle ambition, où l’étude se mêle à l’apprentissage. Mais franchement, les puissants penseurs qui ont cru bon de renoncer à une charge historique, intellectuelle et affective aussi lourde que les mots « Instruction publique », ont fait preuve de légèreté.

     

    Pourquoi ? Mais parce que les mots ont un sens, justement ! Ces deux-là nous rappellent les figures de Jules Ferry, le père de l’école gratuite et obligatoire en France, et d’André Chavanne, 24 ans conseiller d’Etat à Genève (1961-1985), l’homme de la démocratisation des études. Deux références, dont l’une qui fleure les pupitres à encrier (que votre serviteur connut encore, à ses débuts), la craie sur les tableaux noirs, les fleuves avec leurs affluents, les dates des Traités, la jouissance de la grammaire, complexe, truffée d’exceptions, avec ses joujoux et ses poux.

     

    Nous flottons, me sifflerez-vous, dans l’ordre du symbole. Oui. Eh bien, soyons symboliques ! Reconnaissons aux mots le poids qui est le leur. Entrons dans l’avenir, bien sûr, mais avec le fumet et l’encens d’un passé sans lequel nous ne serions rien. Désolé, mais « Instruction publique », c’était mieux.

     

    Pascal Décaillet