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Commentaires GHI - Page 158

  • Suisse-Europe : ne lâchons rien, restons libres !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 16.01.19

     

    D’abord, dire une chose, haut et fort : la Suisse est, dans toutes les profondeurs de ses entrailles, un pays européen. Son destin n’a rien d’insulaire : il s’est construit, au fil des siècles, en fonction des événements extérieurs. Aucune des grandes lames de fond ayant déferlé sur le continent européen n’a épargné la Suisse : ni l’Empire romain, ni la structure féodale, ni les grands ordres chrétiens, ni l’invention de l’imprimerie, ni la traduction de la Bible en allemand par Luther (1522), ni la Réforme, ni la Contre-Réforme, ni les Lumières, ni la Révolution française, ni l’épisode napoléonien, ni la Restauration, ni le romantisme, ni la Révolution industrielle, ni le printemps des peuples de 1848 (début de la Suisse moderne), ni le Kulturkampf, ni l’Encyclique Rerum Novarum de Léon XIII (1891), ni les deux Guerres mondiales. Dans tous ces mouvements tectoniques, la Suisse a été secouée, comme ses voisins. La thèse de l’insularité ne vaut pas un clou.

     

    Oui, la Suisse est un pays européen. Le destin du continent est le sien. Sa position géographique, centrale, configure ainsi les choses. Simplement, nous ne sommes pas membre de la structure appelée « Union européenne ». C’est ainsi : les choses, depuis 1957 (Traité de Rome) se sont faites sans nous. Nous avons, certes, constamment négocié avec Bruxelles, mais nous avons choisi de rester dehors. Hors de la structure, mais pas hors de l’Europe ! Dans la longue dialectique, déjà six décennies, engagée entre la Suisse et l’Europe communautaire, notre atout principal est, simplement, de rappeler ce que nous sommes. Un pays d’Europe, ami de tous, désireux d’entretenir avec ses voisins les meilleures relations, mais férocement attaché à ses institutions, sa démocratie directe, son fédéralisme, son indépendance nationale, sa souveraineté. Il n’y a là aucune animosité, aucune déclaration de guerre : juste dire à Bruxelles : « Nous sommes un pays libre, nous entendons le rester ».

     

    Dans les négociations, le Conseil fédéral doit absolument avoir cette tonalité-là : courtoisie sur la forme, implacable fermeté sur le fond. En aucun cas les négociateurs ne doivent arriver avec le complexe d’infériorité du petit face au géant : la Suisse est un pays libre, une nation souveraine, elle défend avec rage les intérêts supérieurs de ses citoyens, c’est cela le rôle de nos négociateurs, et non chercher à plaire à Bruxelles. Et surtout, ne rien précipiter ! Quelle UE sortira des élections européennes de mai 2019 ? Quelle place, au sein même du conglomérat, vont y reconquérir les différentes nations ? Quelle place pour la nation française, la nation allemande, la nation italienne, la nation hongroise ? Partout en Europe, comme en 1848, gronde la voix des peuples, partout l’exigence démocratique émerge, partout l’aspiration à la démocratie directe fait surface. Face à cette gigantesque incertitude, nous, la petite Suisse, nous aimons nos institutions, nous avons déjà la démocratie directe, nous vivons ensemble dans la paix et le respect mutuel. Aucune raison, donc, de paniquer face à l’Europe ! Affirmons ce que nous sommes, ne lâchons rien, restons libres.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Après, on discutera

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 09.01.19

     

    Le plus fou, c’est de lire, sous des plumes suisses, que la démocratie directe ne serait pas faite pour les Français. Comme si génétiquement, par nature, nos amis d’Outre-Jura se trouvaient inaptes à l’exercice des droits populaires.

     

    Mais qui sommes-nous, les Suisses, pour venir décréter que le suffrage universel, sur des objets thématiques, conviendrait davantage, en soi, à un peuple, plutôt qu’à un autre ? Et qui serions-nous, pour administrer des leçons de démocratie à un voisin qui, à la fin du dix-huitième siècle, a donné au monde une universelle leçon d’affranchissement ? Pas seulement en congédiant la monarchie, mais en jetant des bases républicaines dont tant de pays, dans le monde, se sont inspirés.

     

    A la vérité, ceux qui proclament l’inaptitude foncière des Français à cet exercice, sont les mêmes qui, chez nous, combattent la démocratie directe. La plupart du temps, ce sont des élus, dans des Parlements cantonaux ou aux Chambres fédérales. Par corporatisme consanguin, ils défendent bec et ongles la démocratie représentative, aussi essoufflée soit cette dernière. En Suisse, ils n’ont toujours pas admis que la démocratie directe était partie prenante de notre système, non comme anomalie, mais comme institution.

     

    A ces gens-là, confiscateurs de démocratie, la seule réponse à donner est la vitalité citoyenne. La politique nous appartient, à tous. Et certainement pas aux seuls élus ! Qu’ils commencent déjà à appliquer correctement les initiatives votées par le peuple. Après, on discutera.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Suisses, applaudissons les Gilets jaunes !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 09.01.19

     

    Nous les Suisses, avons une chance extraordinaire, que tant de voisins nous envient : grâce à notre démocratie directe, nous pouvons, quatre fois par an, nous prononcer sur le fond de la politique : les thèmes. Exemple : le dimanche 10 février, nous voterons sur un sujet majeur, l’initiative des Jeunes Verts sur le mitage du territoire. Un enjeu passionnant, qui charrie tout notre rapport à la ville et à la campagne, à l’aménagement de nos paysages, à l’agriculture, etc. Nous voterons, pourquoi ? Parce qu’à la base, un petit comité d’hommes et de femmes – les Jeunes Verts – a décidé qu’il était essentiel pour le pays de lancer ce sujet, avec un vaste débat national, des arguments, des idées contradictoires, et un beau dimanche, le verdict. C’est cela, notre démocratie suisse, cela qui est si précieux : pouvoir, nous les citoyennes et citoyens, nous attaquer directement aux thèmes.

     

    Regardez nos amis français : la principale revendication des gilets jaunes (à part le pouvoir d’achat) est d’accéder à une forme d’expression directe du suffrage universel sur les thèmes. Ils appellent cela le référendum d’initiative citoyenne (le RIC), et c’est, dans les grandes lignes, l’équivalent de notre initiative populaire fédérale, en Suisse. En clair, des dizaines de milliers de Français bravent l’hiver, le froid, les CRS, pour obtenir, notamment, davantage de démocratie. Sur le fond, et bien sûr en condamnant les violences et débordements, la démarche est absolument admirable : elle est courageuse, imaginative, offensive, d’intérêt public, elle vise à une élévation du niveau de démocratie en France.

     

    Nous les Suisses, cette démocratie dont rêvent les gilets jaunes, nous l’avons. Parce que d’autres, dans notre Histoire nationale, bien plus conflictuelle que son image d’Epinal, les ont conquis, ces droits ! Eh bien, nos amis français, dont les ancêtres en ont conquis d’autres, également admirables, se battent aujourd’hui pour obtenir des droits comparables à ceux de notre démocratie directe. Nous, Suisses, quel que soit notre positionnement politique, cela devrait nous parler, non ? Pour ma part, j’admire les gilets jaunes. J’admire leur courage, leur détermination, leur endurance, leur opiniâtreté. Je les admire, parce qu’ils ouvrent des voies pour une France plus démocratique, où la base serait écoutée, où le peuple deviendrait, comme chez nous, un acteur de la vie politique.

     

    Un acteur, et non un sujet. C’est le principe même de cet immense moment de l’Histoire humaine qui, à partir de 1789, s’est appelé la Révolution française. Aujourd’hui aussi, certaines féodalités doivent tomber, et pas seulement en France ! Les corps intermédiaires ont pris trop d’importance, ils confisquent tant de droits, que le suffrage universel pourrait assumer directement. Il ne s’agit pas de créer une démocratie d’opinion, où un simple clic suffirait à décider. Non : il s’agit, dans les années et les générations qui viennent, de donner au plus grand nombre la possibilité, par des voies institutionnelles (et non par la rue !) de peser sur le destin des nations. A tous, excellente Année 2019 !

     

    Pascal Décaillet