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Commentaires GHI - Page 146

  • Nos jaunes amis

     

    Commentaire publié dans GHI - 04.09.19

     

    A longueur de flashes, nos antennes radiophoniques nous abreuvent d’informations sur les manifestations à Hong Kong. Avec un parti-pris immédiatement perceptible pour l’auditeur : un immense capital de sympathie pour ceux qui, là-bas, à des milliers de kilomètres de la Suisse romande, descendent dans la rue pour faire valoir leurs droits. Il n’y en a que pour Hong Kong, et on pourrait, en passant, s’interroger un peu sur les puissances qui, peut-être, seraient derrière ces manifestations.

     

    Le manifestant de Hong Kong est par essence sympathique, puisqu’il remet en cause le méchant régime communiste chinois. De même, tous les Tibétains sont sympathiques, par définition. De même, tous les Kurdes. Tout ce qui est minoritaire, face à un Etat organisé, représente par nature le Bien. Et la machine d’Etat, en face, incarne nécessairement le Mal.

     

    Pour nos beaux esprits, un manifestant a meilleur temps de battre le pavé dans un ancien Mandat britannique en Chine, que revêtu d’un gilet jaune contre la police macronienne. Parce que Macron, c’est le Bien. Il est convenable, pro-européen, libéral jusqu’à la moelle, ami des banquiers, adversaire de la Bête immonde : le gendre idéal. Oser le défier, sur un rond-point de France, c’est se comporter en gueux, casser l’harmonie de l’image, tout foutre en l’air. Alors voilà, autant le manifestant de Hong Kong est à louer, autant son jaune confrère français est à rejeter. La grille de lecture est sauvée. Le manichéisme, aussi.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • La religion du libre-échange, c'est fini !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 04.09.19

     

    Ouvrir la Suisse à tous les marchés du monde, permettre à nos industriels d’exporter, multiplier les passerelles commerciales avec l’étranger, c’est la vision qui, depuis des décennies, régit la politique économique de notre pays. Cette conception ne tombe pas du ciel, elle a une Histoire bien précise, avec son enchaînement de causes et d’effets. Après la Seconde Guerre mondiale, et six années de fermeture des frontières, la Suisse, au milieu d’une Europe en ruines, où régnaient la faim, les privations, les tickets de rationnement, et même le manque de charbon pour affronter plusieurs hivers particulièrement froids, a éprouvé le besoin de multiplier les Accords, s’ouvrir, diversifier les partenaires. A l’époque, elle a vu juste : il en allait de sa survie.

     

    Cette stratégie d’ouverture, pendant des dizaines d’années, s’est renforcée. En 1957, c’était le Traité de Rome, avec six pays fondateurs de la Communauté économique européenne, aujourd’hui UE (France, Allemagne, Italie, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas), la Suisse n’en était pas, il a fallu qu’elle se fraye des pistes dans le grand monde, elle a signé des Accords de libre-échange, et là aussi elle a vu juste. Au fond, notre pays s’est comporté comme un petit entrepreneur, ne devant compter que sur son énergie propre, son réseau, pour s’en sortir. C’était l’époque où peu de gens contestaient le bien-fondé de ces Accords : tous comprenaient à quel point ils étaient vitaux.

     

    En 2019, la situation a radicalement changé. La Suisse a multiplié les Accords de libre-échange, les parlementaires se sont souvent contentés d’avaliser le travail de négociations des fonctionnaires, les référendums n’ont pas été saisis, on a laissé faire. Et au final, bien que le peuple eût pu réagir, l’impression dominante est celle d’une politique du fait accompli, d’une absence criante de contrôle démocratique, d’un défaut de vision politique sur certains pays avec qui on signe, en un mot d’une tyrannie du dogme libéral, au détriment de la justice sociale et environnementale. L’Accord, dont on parle tant ces jours, entre la Suisse (via l’AELE) et le Mercosur (Marché commun de l’Amérique latine : Argentine, Brésil, Uruguay, Paraguay) constitue une caricature du genre, créant un déséquilibre crasse entre l’intérêt des exportateurs industriels, favorisés, et l’abandon de nos paysans, laissés en proie aux importations massives de viande bovine d’Amérique latine.

     

    Bref, aujourd’hui, le libre-échange ne passe plus. Et la Congrégation pour la doctrine de la foi libérale ne parvient plus à berner les gens, avec son dogme de l’ouverture et ses promesses de miracles. En 2019, en Suisse, les gens veulent des frontières. De la protection. Du respect et de l’aide pour nos paysans. Une conception sociale et environnementale des rapports internationaux. Ils veulent aussi un contrôle démocratique : plus question de passer des Accords en catimini à Berne, comme s’ils n’étaient qu’affaires d’experts et d’entre-soi. En un mot comme en mille, la religion du Salut par le libre-échange, c’est fini.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Citrons pressés

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 28.08.19

     

    La classe moyenne : nous avions plaidé, ici même, début mai pour qu’on ne l’oublie pas, et qu’on veuille bien cesser de la presser comme un citron. A Genève, la classe moyenne doit devenir le problème no 1 des enjeux politiques et sociaux.

     

    De qui s’agit-il ? On peut se disputer à l’infini sur la fourchette qui définirait la classe moyenne, en fonction du revenu des ménages. Soyons concrets : il existe, à Genève, une majorité silencieuse de gens qui ont travaillé toute leur vie, parfois dur, élevé des enfants, participé à la prospérité générale, et qui n’arrivent pas à mettre un sou de côté. Pendant ce temps, ils voient leurs retraites, ou futures rentes, fondre comme neige au soleil : cela s’appelle, pudiquement, « la baisse des taux de conversion du deuxième pilier ».

     

    Les mêmes gens, qui peut-être ont eu le mauvais goût d’être malades, je veux dire un peu plus qu’un simple refroidissement, n’en peuvent plus de voir leurs primes maladie grimper. Ne parlons pas de la pression fiscale à Genève, qui fait de la classe moyenne, quelque part dans l’échelle entre les assistés et les nababs, l’éternelle vache à lait.

     

    Dans la campagne des élections fédérales du 20 octobre, on va beaucoup vous parler climat, fin du monde, Apocalypse. Peut-être pourrait-on aussi s’occuper, enfin sérieusement, des gens qui travaillent, prennent des risques, inventent. Et leur lâcher un peu la grappe avec les impôts, les primes et les taxes. Pour le Jugement dernier, nous verrons bien.

     

    Pascal Décaillet