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  • La droite non-libérale, ça existe!

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 22.03.23

     

    Je suis, profondément, un homme de droite. Et pourtant, je ne suis pas libéral. En tout cas pas au sens où l’on entend ce mot, notamment sous influence anglo-saxonne, depuis une trentaine d’années : disparition de l’Etat et des frontières, mondialisation du capital, affaiblissement des services publics, délocalisations, création d’entreprises de taille monstrueuse, à vocation planétaire, sans racines nationales, ouverture des marchés sans contrôle, libre-échange sans entraves, précarisation du travail au profit de la grande finance. Ce modèle, je n’en veux pas. Je n'en ai jamais voulu. Depuis l’adolescence, je me sens très puissamment de droite, mais pas de cette droite-là. La mienne est nationale, patriote, culturelle, follement attachée aux langues et leur Histoire, aux textes, à la vie du verbe et de l’esprit.

     

    Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, on ne parle plus guère de cette tradition de pensée, qui avait été avant-guerre celle de très grands penseurs, hommes de culture et polémistes français. Je citerai Péguy ou Barrès, Emmanuel Mounier (la Revue Esprit), et tant d’autres, dont la lecture m’a tellement nourri, depuis un demi-siècle. On n’en parle plus, et c’est un tort, immense. Les libéraux ne peuvent concevoir une droite qui renie la libre circulation sauvage des personnes et des marchandises. La gauche, de son côté, est persuadée de détenir le monopole sur la pensée de l’Etat, ses missions, et sur la défense des plus faibles. Eh bien moi, je ne suis ni de gauche, ni de la droite appelée depuis trente ans « libérale ».

     

    Il y a pourtant, dans ce camp, les libéraux, des personnes qui m’ont marqué : Olivier Reverdin (1913-2000), qui fut mon professeur, ou plus récemment le député Cyril Aellen, homme de rigueur financière et d’ouverture. Mais désolé, la dérive ultra-libérale, survenue après la chute du Mur de Berlin, a tout foutu en l’air. Elle a dévoyé, par absorption du sens, l’idée même du libéralisme. Au moment où la Suisse vit des heures graves dans son secteur bancaire, les ravages de l’ultra-libéralisme montrent l’étendue du mal. Tout cela, pourtant, était prévisible dès la chute du Mur, et le champ ouvert au seul capitalisme d’inspiration anglo-saxonne. Nous avons, dans cette Europe continentale que nous aimons tant, en Suisse, en Allemagne, en France, en Italie, d’autres valeurs que cette tribale dévotion au Veau d’or du profit. Les grands Ordres chrétiens, qui nous ont façonnés, puis le legs inestimable de la Révolution française, qui a tant influencé les plus grands esprits allemands des décennies suivantes, tout cela nous transmet un autre héritage que celui de l’hystérie autour des Bourses.

     

    Alors oui, on peut être un homme de droite, petit entrepreneur, partisan de la concurrence, de la liberté du commerce, des PME, des petits indépendants, oh oui, mais avec un Etat fort. Un Etat solide, mais surtout pas tentaculaire, voilà pourquoi je ne suis pas un homme de gauche. On peut être cet homme-là, d’une droite nationale, joyeuse, sociale et fraternelle. Construite autour de la Patrie. C’est mon ambition, pour le pays.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Du vacarme, pour mieux couvrir le néant

     
    Sur le vif - Samedi 18.03.23 - 18.46h
     
     
    Je suis absolument opposé à l'idée que les journalistes devraient être gentils entre eux, se ménager, ne jamais s'attaquer mutuellement, sous prétexte que "la situation est déjà assez difficile comme cela dans la presse suisse".
     
    Je rejette toute idée de corporation dans le journalisme. Je suis journaliste professionnel depuis bientôt quarante ans, mais en même temps, je suis entrepreneur depuis dix-sept ans. Ceux avec qui je discute le plus, avec qui je me sens le plus d'affinités, ce sont les autres petits entrepreneurs, ou même minuscules entrepreneurs. Mais entrepreneurs quand même !
     
    Je les côtoie tous les jours, dans le quartier où j'ai le bureau de mon entreprise, ils sont de tous les secteurs, artisanat, petite industrie, garages, bureaux d'architectes, etc. Avec eux, j'ai des valeurs communes. Le combat pour l'indépendance, la survie économique, la qualité des finitions, le lien de confiance avec les partenaires. Mon état d'esprit professionnel, c'est celui-là.
     
    Il y a plein de journalistes que j'apprécie, ne serait-ce que mes excellents confrères - et soeurs - de Léman Bleu, GHI, et pas mal d'autres, tous médias confondus. Mais je rejette violemment l'idée qu'il faudrait sauver à tout prix le journalisme en tant que tel, celui qui (sans remonter à Théophraste Renaudot), a pris forme à l'époque de Balzac, celui des "Illusions perdues", puis de la Révolution industrielle, et a vécu deux siècle. J'en connais, au passage, toute l'Histoire par coeur. En Suisse. En France. En Allemagne.
     
    Je suis un partisan acharné des réseaux sociaux, enfin plus précisément de celui sur lequel vous me lisez, c'est le seul où je sois actif. Je n'y suis pas pour bavarder, ne commente jamais les textes des autres, ni même les miens propres. Non, c'est un outil de travail et d'expression, il est souple, rapide, il ne peut que convenir à merveille à l'homme de radio que je suis fondamentalement. Les journalistes qui se permettent de vomir sur les réseaux sociaux, sous prétexte que ces derniers charrieraient plus de "fausses nouvelles" qu'eux-mêmes, sont des ectoplasmes d'archaïsme, de conformisme, de conservatisme, de jalousie.
     
    Le temps des salles de rédaction se termine doucement, avec horaires de présence, séance le matin à 9h, séance à 14h, séance de finition à 18h, tout cela c'est révolu. Les "équipes", les ineffables "rubriques", les petits chefs, les armées mexicaines, les syndicats, les rumeurs de cafétérias, les clans rivaux, tout cela c'est bientôt fini. La numérisation, l'individualisation, la simultanéité du réseau, l'accès immédiat à des milliards de données, tout cela s'apprête à faire voler en éclats le petit monde des "équipes rédactionnelles", des "discussions enrichissantes en briefing" (tu parles, des matamores, souvent les plus nuls pour le produit final), tout cela c'est fini.
     
    Je ne veux plus entendre parler du journalisme. C'est du passé. Ce qui compte, c'est la curiosité de chacun de nos esprits, le tien, le mien, ceux de tous les autres. Ce qui compte, c'est le chemin de connaissance, le "Unterwegs zur Sprache" de Martin Heidegger. Ce qui compte, c'est la passion viscérale de se renseigner, aller voir, ne rien tenir pour acquis.
     
    Le reste, les étiquettes ronflantes sur les cartes de visite, le papier à lettres qui se meurt au fond des tiroirs, la "mission d'informer", celle (encore plus délirante) "d'éduquer les citoyens", tout cela c'est du vent. De la vanité. Du vacarme, pour mieux couvrir le néant.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Philippulus

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 15.03.23

     

    Le pouvoir d’achat, priorité absolue des partis pour la campagne électorale. C’est bien. Mais c’est fort tard. Il leur en aura fallu, pour enfin saisir l’échelle des valeurs, la vraie, dans les préoccupations des gens. Il leur aura fallu l’approche de l’élection, et la peur, soudain panique, de passer complètement à côté des classes moyennes, avec des slogans décalés, des préoccupations de bobos ou de prophètes d’Apocalypse, à la Philippulus, le saisissant illuminé en toge dans « L’Etoile mystérieuse », avec son gong.

     

    Ils disent tous « pouvoir d’achat », même les socialistes. Tant mieux. Mais s’interrogeront-ils sur leurs interminables années de pèlerinage dans l’errance et l’erreur ? L’obsession de tant d’entre eux pour la mode « sociétale » : qu’un chercheur en sciences sociales de l’Université de Lausanne, en sandales et gilet de laine, vînt surgir avec une étude sur telle nouvelle métamorphose du genre, et immédiatement il fallait relayer cet émule d’Ovide, en faire un thème politique. L’immense majorité des gens, ces classes moyennes laborieuses, prises à la gorge par les taxes, les primes et les impôts, on n’en parlait jamais. Il fallait faire mode.

     

    Dans moins de trois semaines, le 2 avril, Genève se choisira un nouveau Parlement. Puissent les électeurs, de gauche ou de droite, y conduire des hommes et des femmes soucieux des vrais problèmes du quotidien. Soucieux des nôtres, plutôt qu’en éternelle pâmoison pour l’altérité. Nos vies, à nous. Notre cohésion sociale. Notre canton. Notre communauté nationale. Notre patrie.

     

    Pascal Décaillet