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  • 130 ans après, que reste-t-il du PDC ?

     
     
    *** Dissertation sur la puissance lunaire d'un déclin - Lundi 08.11.21 - 09.15h ***
     
     
    Le grand parti qui a fait la Suisse moderne, c'est le parti radical. Il a eu tous les pouvoirs, sept conseillers fédéraux sur sept, les 43 premières années de la Suisse fédérale, de 1848 à 1891. Puis, est arrivé le premier catholique-conservateur, le Lucernois Joseph Zemp, venu d'un Canton vaincu du Sonderbund, et le début de la participation au pouvoir de l'Autre Suisse, qui avait rongé son frein pendant plus de quatre décennies.
     
    On ne disait pas encore PDC à l'époque (le nom n'apparaîtra, au niveau fédéral, qu'en 1970), mais c'était bien cette Autre Suisse, oui, celle du Valais, de Fribourg, celle d'Uri, de Schwytz, d'Unterwald, de Zoug, de Lucerne. Avec déjà, dans cette période d'opposition, prodigieusement formatrice dans la formation des idées, une incroyable diversité entre catholiques-conservateurs et chrétiens-sociaux, les Noirs et les Jaunes, les partisans de Pie IX et ceux de Léon XIII, ceux des villes et ceux des champs, ceux des plaines et ceux des monts. Mais une chose est sûre : proches de la terre, partisans (avant l'heure !) du Patrimoine et le l'environnement, défenseurs de la famille, opposés à la voracité glaciale du capitalisme zurichois, ces Suisses-là étaient de rudes patriotes. Il était temps, en 1891, qu'ils accèdent aux affaires.
     
    130 ans après, que reste-t-il du PDC ? Un nouveau nom, le Centre, qui rappelle évidemment le Zentrum bismarckien. Une conseillère fédérale, Mme Amherd, un grand nombre d'élus dans tous les Cantons, un groupe aux Chambres fédérales, des personnalités fortes, comme Christophe Darbellay, bref une implantation encore bien enracinée dans le pays profond. Pourtant, sur ses terres historiques, le PDC (je continue à l'appeler ainsi) perd des plumes. En Valais, la décroissance a commencé il y a longtemps. A Fribourg, la journée d'hier ne fut pas bonne. Et puis, à Genève, Canton où cette famille joue un rôle depuis longtemps, d'autres formations, comme les Verts libéraux, lui disputeront âprement l'occupation du centre politique, aux élections du printemps 2023.
     
    Bref, le PDC a besoin d'un nouveau souffle. Il a longtemps compté sur de flamboyantes personnes, Doris Leuthard ou Christophe Darbellay, ne parlons pas de l'immense Kurt Furgler, pour compenser les ferments de dispersion internes à ce parti polymorphe, très décentralisé, héritier à la fois de Léon XIII, avec son Encyclique Rerum Novarum (1891), et du puissant conservatisme de la Vieille Suisse, aujourd'hui capté en grande partie par l'UDC.
     
    Le PDC, le Centre si vous préférez, n'est pas mort, et de loin. Mais il doit se réinventer sur des idées qui lui sont propres, et non sur la molle moyenne entre la gauche et la droite. La famille en était une, mais ce thème, désolé (je l'affirme depuis toujours), n'a jamais été suffisant. La politique, c'est l'Etat, c'est une vision pour la Nation. Cela ne peut se réduire à de sympathiques allocations sur la naissance et autres événements de la vie quotidienne. Le PDC a besoin de voir loin, beaucoup plus loin, comme les radicaux de 1848 ont su voir la Suisse à forger, et en plus ils l'ont faite !
     
    Le PDC ne convaincra guère plus de monde en piquant aux Verts leur ineffable terminologie, "urgence climatique", "transition écologique", etc. Cela donne l'impression, dévastatrice, d'un parti sans idées propres, et qui se nourrit de celles des autres. Le PDC ne doit pas être le parti des plagiaires. Car le plagiat est une honte, non morale, mais intellectuelle, spirituelle. Une honte, dans l'ordre de ce que doit être un humain : debout, apte au combat, inventeur de ses mots, forgeron de son verbe, prêt à écrire sa propre Histoire, non celle des autres.
     
    La Suisse a besoin du PDC. Ou du Centre, comme vous voudrez. Le nom, on s'en fout. Elle a besoin d'une force de vie, entre la gauche et l'insupportable néo-libéralisme, qui se rit des frontières et méprise les peuples. Les radicaux de 1848, déjà, avaient génialement occupé cette position, mais très vite ils se laissaient déborder par les charmes de la grande finance zurichoise. Il est vrai qu'elle était nourricière, inventive, porteuse de projets pour le pays. Le percement du Gothard, ça n'est pas rien !
     
    La réinvention du PDC passe par des idées propres à ce courant. Qui ne suintent pas l'emprunt, ni l'opportunisme, ni la versatilité. Vaste programme ! Pour cela, il faudra faire de la politique avec le peuple, et pas seulement à l'échelle des parlements, de la cuisine politicarde, des conclaves et conciliabules des appareils. S'il sort de cette machine infernale, s'il se trouve la force de nous inventer un projet révolutionnaire, le PDC a encore un avenir devant lui.
     
    Révolutionnaire ? Le mot n'est pas trop fort. Rerum Novarum, le texte fondateur de Léon XIII en 1891, était révolutionnaire. Entre le marxisme d'un côté, et de l'autre le libéralisme qui faisait travailler les enfants dans les mines, il proposait une Troisième Voie. 130 ans plus tard, cette voie d'humanité et de petites lumières demeure, plus que jamais, à inventer.
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Gauche contre Gauche

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 03.11.21

     

    A Genève, la gauche passe ses samedis à manifester. Au fait, elle manifeste contre qui, la gauche ? Faut-il rappeler que nous avons à Genève, depuis ce printemps, un gouvernement majoritaire de gauche ? Résolu, entre autres, à nous faire dépenser 5,9 milliards pour des investissements dans la "transition écologique", alors que nous détenons déjà le record suisse de la dette (12,8 milliards). Un Conseil d’Etat bien à gauche, deux socialistes, deux Verts, un programme d’action digne du Grand Soir, des projets de dépenses inconsidérées, une inaptitude totale à envisager une restructuration de la machine de l’Etat. Bref, une vraie gauche, proche de la caricature.

     Mais nos braves manifestants professionnels, tout à la ferveur de leurs processions du samedi, avec leur catéchisme affiché sur les banderoles rouges, et le grand-prêtre pour leur hurler les slogans à scander en chœur, envahissent quand même les rues. Contre un pouvoir de gauche ! Un Conseil d’Etat de gauche ; un Grand Conseil de facto à gauche, par défection continuelle des gentils centristes et des éternels imprévisibles.

     La gauche de la rue, contre la gauche de l’institution. La scène politique genevoise est devenue un grand spectacle, technicolor, sur les infinies nuances à l’interne de la gauche. Pendant ce temps, la droite, elle fait quoi ? Elle roupille ! Ses grands esprits sont d’un autre temps. Ses grandes plumes volent au vent. Entre deux banderoles de gauche, battues par les vents de la procession.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Plus un seul week-end sans manif !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 03.11.21

     

    Il y avait naguère le Jour du Seigneur. Voici le Jour des Brailleurs. Plus un seul samedi, à Genève, sans une manif ! Et si, par extraordinaire, les éternels organisateurs de gauche vous épargnent un samedi, c’est que la manif se sera déroulée la veille : le vendredi ! Et puis, le dimanche, pour ceux qui en voudraient encore, dans le style grandes foules joyeuses, on vous bloque la circulation, toujours aux mêmes endroits, pour de grandes manifestations sportives, marathoniennes, décathloniennes, truffées des meilleures intentions planétaires, humanitaires, sanitaires. C’est pour le bien du vaste monde. Nous avons, à Genève, une magnifique campagne. Mais ces courses populaires, il paraît qu’il leur faut la théâtralité du décor de la Ville. En quel honneur, au fond ?

     

    Nous, les citoyennes et citoyens de la Ville de Genève, devons nous interroger très sérieusement sur ces constantes et récurrentes appropriations de notre espace public, celui pour lequel nous payons taxes et impôts. A commencer par le plus important pour nos déplacements, nos courses du week-end : la chaussée ! Où, mais où diable, est-il écrit que nous devions accepter, tête baissée et en rasant les murs, cette prise en otage, toujours recommencée, samedi après samedi, de notre espace public par des gens qui hurlent et braillent derrière des banderoles rouges ? Est-ce pour cela que nous payons nos impôts, nos taxes sur les véhicules, notre essence ? Pour nous faire pourrir la vie, tous les week-ends, par une infinie minorité, n’ayant de vertu que celle du bruit ?

     

    A ce stade, il y en a toujours un pour rétorquer que le droit de manifester est garanti par la Constitution. Soit. Mais qui définit le tracé, qui l’impose ? Qui prend en compte un autre droit, parfaitement établi, celui des gens qui se lèvent la semaine pour aller bosser, de faire leurs courses le samedi, avec leur voiture familiale, sans passer des heures à se faire bloquer par les saintes processions de la gauche ? Et puis, il y a les chiffres : nous sommes, à Genève, un demi-million d’habitants. Sur ce total, quinze mille font partie de l’éternel noyau dur du « peuple des manifestants ». Pour eux, toutes les occasions sont bonnes à descendre dans la rue, scander leurs slogans, imposés par haut-parleur par le diacre de service. Bref, près de 485'000 Genevois ne manifestent jamais.

     

    Cette minorité silencieuse, il va bien falloir un jour qu’elle se réveille. Elle n’a absolument pas à se laisser pourrir ses week-ends par une minorité, toujours la même. Qui négocie les tracés ? Le pouvoir politique, à Genève, aurait-il peur ? Peur de déplaire. Peur de passer pour des censeurs. Au nom de quoi l’occupation répétée du même espace, avec les mêmes encombres pour les automobilistes, serait-elle inéluctable ? L’autorité n’a donc aucune marge de manœuvre ? Elle accepte sans sourciller les tracés des organisateurs, quand il y en a ? Dans ce tumulte accepté avec résignation, où est l’Etat ? Où est la République ? Où sont les droits des braves gens, ceux qui prennent leur voiture, le week-end, ayant trimé toute la semaine, pour aller faire leurs courses ?

     

    Pascal Décaillet