Sur le vif - Jeudi 20.03.14 - 09.31h
"Pourquoi la Crimée ? Et pourquoi maintenant ?" - Le Temps, page 12.
Enfin, l'éclairage d'une situation par les profondeurs politiques, économiques, culturelles, de l'Histoire. Enfin, quelques clefs. Qui ne condamnent personne. Mais expliquent.
Dès 1991, pendant toutes les guerres balkaniques, je n'ai cessé les premières années, avant de me rendre sur place en reportage, de lire, lire, et lire encore les différentes visions du monde des antagonistes. Nous étions quelques-uns à proclamer que la diabolisation systématique des Serbes faisait le jeu d'autres puissances, en fonction d'antécédents puissants. Pour les identifier, il faut connaître. Se renseigner. Cela passe par une ascèse de l'Histoire.
Aujourd'hui, dans l'affaire ukrainienne, la vraie ligne de fracture n'est pas entre partisans des pro-Européens et des pro-Russes. Bien sûr qu'il faut trouver pour tous la solution de la meilleure coexistence possible. Non, la vraie démarcation se situe entre ceux qui acceptent de se plonger dans l'Histoire, le choc des cultures, la confrontation des visions, sans immédiatement les juger à l'emporte pièce. Et, d'autre part, ceux qui, au nom de grilles de lecture uniquement morales (et encore, leur morale à eux, autoproclamée), se contentent de coller des étiquettes, "Poutine dictateur", "Russie impérialiste", etc.
Je ne veux pas revivre ce dialogue de sourds des guerres balkaniques. Ces intellos parisiens débarquant à Sarajevo en chemise blanche. Cette détestation organisée de tout ce qui avait le mauvais goût d'être Serbe. Cette ignorance crasse de l'Histoire, notamment des événements majeurs entre 1941 et 1945, Ce primat de la seule morale. A ces facilités intellectuelles, résistons. Faisons pièce dès le début, ce qui ne fut pas le cas au début des années 1990. Écoutons toutes les parties. Ne diabolisions personne. Lisons, lisons et lisons encore. Ne rejouons pas la sinistre comédie des années 1990.
Pascal Décaillet