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  • Bien sûr que nous sommes Européens !

     

    Sur le vif - Vendredi 28.02.14 - 17.40h

     

    Ne venez pas nous dire que nous sommes anti-Européens ! Bien sûr que la Suisse est au coeur de ce continent qu'elle aime, dont elle partage les langues, les religions, l'Histoire, la culture. Elle les baigne de ses eaux, respire les mêmes airs, s'humecte des mêmes pluies. A part les trois Pays Baltes, l'Irlande, l'Islande, la Roumanie et l'Albanie, je crois bien m'être rendu dans tous les pays d'Europe. J'ai passé de longues périodes de ma vie en Allemagne, l'équivalent de deux ans en Italie, de multiples voyages en Grèce. Je parle français, allemand (langue à laquelle je voue depuis tout petit une véritable passion), je lis le grec ancien et le latin, je veux parler un jour à fond l'italien: où diable serions-nous anti-Européens ?



    Simplement, pour ceux qui partagent mes convictions par rapport à l'Union européenne - j'ai cru percevoir que nous étions quelques-uns dans le pays - c'est cette Europe-là dont nous ne voulons pas. Cette machinerie. Cette structure. Assurément, elle a eu son sens dans les années cinquante, lorsqu'il s'agissait d'établir la paix après les horreurs des deux Guerres mondiales, et puis aussi se ravitailler, se chauffer avec le charbon du pays voisin. Cette Communauté-là, celle de Schumann, de Gasperi, Adenauer, était profondément porteuse de sens. Sur les décombres, elle proposait une renaissance.



    Mais aujourd'hui, quid ? La structure n'écoute plus les peuples. Elle ne veut simplement pas les entendre. Elle n'affiche que fermeture sur soi, arrogance, insolence. Elle est devenue, comme dans les nouvelles de Kafka, ou certains de ses Récits épars (Sämtliche Erzählungen) les plus éblouissants, une forme de mécanique sur soi-même recroquevillée. Vit-elle encore ? Sait-elle qu'elle se meurt ? Perçoit-elle les multiplications malsaines, et finalement fatales, dans le corps même de son tissu ?



    Nous, ceux des Suisses qui nous proclamons sceptiques face à cette construction en perte de son propre sens, n'avons rien d'anti-Européen. Les peuples de ce continent sont nos amis. Nous ne sommes en guerre avec aucun d'entre eux. Nous en respectons les Histoires, les cultures, nous en aimons passionnément les musiques, de Grieg à Sibelius, de Dvorak à Bela Bartok, de Debussy à Britten, de Xenakis à Stockhausen.



    Nous sommes Européens, jusqu'au tréfonds de notre moelle. Ce que nous refusons, c'est une structure bureaucratique. Ca n'est en aucun cas l'idée européenne. Parce que cette Machine-là, à Bruxelles, ne détient en aucun cas le monopole de l'identité européenne. Tout au plus peut-elle aspirer à la possession perdue de son propre mode d'emploi. A l'époque du charbon et de l'acier. Lorsqu'il fallait réinventer la vie. Sur les décombres.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Les procureurs de la 25ème heure

     

    Sur le vif - Vendredi 28.02.14 - 16.41h

     

    Ces actions pénales et ces perquisitions, de la part de la Suisse, qui n'interviennent qu'une fois les chefs d'Etat tombés. Avoirs bloqués, procureur, fils de procureur amateur de romans russes illisibles des années 90, pub de Parquet, lustrée, scintillante, tout cela APRÈS.



    Si vraiment l'ex-homme fort de Kiev avait des choses à se reprocher par rapport à des avoirs dans notre pays, ce que je conçois volontiers, pourquoi ces valeureux procureurs ne s'en sont-ils pas inquiétés AVANT ? Lorsque les oligarques étaient au pouvoir.



    En Suisse, c'est toujours la même chose. La Justice attend qu'un chef d'Etat étranger soit à terre, en exil, lâché par tous, pour bien l'écrabouiller, "bloquer ses avoirs", titrer des communiqués sur "le clan Untel". Lorsqu'il était au pouvoir, l'ancien homme fort ukrainien, on avait le courage de dire "le clan Ianoukovitch"? Dès qu'il gît à terre, on se découvre de si tardives flammes d'insolence, dans la terminologie.



    Cela donne une image de suivisme et de traîne. Cela ne sert ni la Justice, ni la Suisse.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le Choeur des Pleureuses

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    Coup de Griffe - Lausanne Cités - 26.02.14


     
    En journalisme comme pour la tenue vestimentaire des cardinaux chez Fellini, il y a des modes. La toute dernière, depuis le 9 février, fait un tabac : inviter Patrick Aebischer, le patron de l’EPFL, sur un plateau TV, dans un studio radio ou un journal, et pleurer un bon coup avec lui. Gémir sur ces abrutis de citoyens suisses qui n’ont rien compris à l’enjeu de la votation, se sont comportés comme des bergers repliés sur leurs montagnes, ruinent les programmes de recherches.


     
    Dans l’émission, il faudra dire au moins cinq fois le mot « repli ». Pour bien souligner l’obscure sauvagerie de cette Suisse de la fermeture face aux Lumières de la Ville. Oui, on se fera le chantre des villes, leur pluralité bigarrée, la richesse de leurs campus. Et chaque fois qu’on dira « ville », on dira « ouverture ». Pour bien associer le tissu urbain, par exemple le Grand Lausanne, ou le Grand Genève, ou le Grand Zurich, aux valeurs de progrès. Et comme grand prêtre de cette Suisse qui gagne, l’icône Aebischer.


     
    Comme dans le défilé des ecclésiastiques, chez Fellini (Roma), l’image sera urbaine et rutilante, le geste précieux, avec ce zeste d’impatience qui fait le charme des boulevards. Il se faudra se montrer citadin et princier, ouvert au monde, œcuménique comme la terre habitée. Pour bien prouver à quel point ces manants de citoyens, ces gueux, ces vilains, ont mal voté.
     


     
    Pascal Décaillet