Sur le vif - Lundi 24.02.14 - 10.12h
Tellement révélateur, ce moment des Matinales RSR, tout à l'heure. L'invité: Étienne Jornod, président du conseil d'administration de la NZZ. Le meneur: "La Weltwoche, qu'on taxe souvent de démagogique, pour vous elle a du bon ?".
Que fait le journaliste ? Il demande au grand patron d'un journal radical ce qu'il pense d'un journal conservateur, ou proche de l'UDC, comme on voudra. Il demande au big boss du plus puissant vecteur - et assurément le plus brillant - de la philosophie politique et économique du Freisinn, en Suisse, ce qu'il pense du vecteur d'une autre philosophie politique. Concurrente de la sienne.
Évidemment que l'invité n'allait pas idéologiquement en dire du bien.
Il s'est juste contenté de rappeler la haute tenue de la Weltwoche. Et fut assez bon seigneur pour lui concéder le droit à l'existence, au nom de la "diversité". Comme s'il parlait d'une espèce très rare de poisson marin.
Révélateur, oui. La NZZ et la Weltwoche sont les deux meilleurs journaux, aujourd'hui, dans la presse alémanique. L'un, prestigieux bicentenaire, est quotidien et radical. L'autre est hebdomadaire et proche de l'UDC. Mais le meneur de la tranche RSR, il ne peut pas s'empêcher, s'il évoque la Weltwoche, d'en péjorer l'image en parlant de "démagogie". En revanche, s'il évoque la NZZ, ou le Temps, il n'associe aucune étiquette péjorative.
Il y aurait donc des journaux "normaux", ayant naturellement pignon sur rue et droit à l'existence. Et des journaux parias, parce que "démagogiques", dérangeants.
Révélateur, oui. Parce que le meneur de la tranche dévoile toute la pensée dominante de M. de Weck: l'idéologie qu'on agrée, et celle que l'on rejette. Poisson rare. Mais pourvu qu'il demeure au fond des mers.
Pascal Décaillet