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  • Tu pèses, tu payes

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Lundi 21.12.09

     

    Dévoilé par la presse dominicale, le document des libéraux-radicaux suisses sur l’avenir du système de santé devait rester confidentiel. C’est une bombe. Avec des points incroyablement positifs, par exemple lorsqu’il remet Santé Suisse à sa place (tiens, le ministre aurait-il changé ?) en l’excluant des négociations tarifaires. Mais avec, hélas, une disposition qui ruine l’ensemble, puisqu’elle casse l’égalité républicaine de traitement entre malades et bien-portants.

    Hier, en découvrant cette idée de récompenser les assurés qui mènent une vie saine, je me suis cru un moment dans « L’Homme, cet inconnu », d’Alexis Carrel, que j’avais lu avec un mélange de fascination et de dégoût, peu avant l’âge de quinze ans, lors d’une retraite religieuse, en Haute-Savoie. Ce grand savant, hélas, y prônait l’hygiénisme jusqu’à l’eugénisme. Il ne manquera pas, au reste, de se dévoyer, cinq ans après le livre, dans les arcanes de Vichy.

    Carrel, clairement, n’était pas républicain. Mais le grand vieux parti, celui qui a fait la Suisse ! Venir introduire des contrôles de masse corporelle et des accessits de vie saine pour pouvoir justifier de primes plus basses, c’est la négation des principes élémentaires de solidarité et de subsidiarité. Si c’est cela, la politique de M. Burkhalter, alors il faut relancer sans tarder, par contrepoids, l’idée d’une Caisse unique. Il en va du lien social, tout simplement.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La mort du Verbe

     

    Chronique publiée dans le Matin dimanche - 20.12.09


    Elle manque de quoi, l’Eglise catholique ? Réponse : de prêtres qui aient des choses à dire. Un feu. Une folie à transmettre. On les détestera, on les vilipendera ? Et alors ! C’est fait pour ça, un témoin. Pas pour se couler dans le moule du pouvoir, du bien penser ambiant. Un prêtre, ça doit être un fou, parce que la religion est folie. Révolte. Cri. Tentative désespérée contre l’inéluctable. Comment voulez-vous ne pas être angoissé, névrosé ? Alors qu’il y a la mort, et qu’elle gagne toujours.

    Le Clergé catholique romain de Suisse romande manque singulièrement de braise et de brûlures, de lave. Trop de sermons qui ne veulent rien dire. Pas clairs ! Les fidèles, par politesse, font semblant d’acquiescer. Ce qui compte pour eux, à juste titre, c’est être là, ensemble. L’Assemblée. Ecclesia. Le speech du curé, why not, mais bon. Bien meilleurs, les pasteurs, qui vont chercher le texte dans ses entrailles, le décortiquent, le remuent. Bien meilleurs, les quelques rabbins que j’ai pu entendre, comme François Garaï, à Genève. Chez les cathos, l’incandescence du verbe, on dirait que l’on s’en fout.

    Mais oui, elle gagne la mort, pourquoi nous raconter des conneries qui disent le contraire ? Ou alors, si on les raconte, si on veut entrer dans ce jeu-là, on y va un peu franco, bordel. Pas juste du bout des lèvres. Pas juste à moitié. On bien on soutient la déraison chrétienne, on en témoigne, et c’est de l’ordre du hurlement. Ou bien on arrête l’exercice. Il y a tant d’autres choses, ici bas, que de faire semblant. Mais mimer le profane, le raisonnable, se couler dans le monde, craindre de déplaire, et c’est déjà la mort de l’âme. Pire. La plus odieuse des morts : celle du Verbe.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Micheline Calmy-Rey et la Sainte Messe de l’humour

     

    Dans l’émission « Le Grand Oral » à paraître demain soir, Micheline Calmy-Rey confirme définitivement détester le monde de l’humour et des humoristes. Elle se dit blessée par la caricature, déteste sa marionnette, ne trouve absolument pas drôle qu’on tourne en dérision les politiques, qui font tant pour la Cité. Voilà qui est dit. Voilà qui est clair.

    Voilà surtout qui ne manque pas de franchise. Ni de courage. A reconnaître aussi crûment sa propre susceptibilité, on risque évidemment de s’en prendre doublement plein la poire dès les gazettes du lendemain. C’est le jeu.

    Au fond, il y a trois catégories : les gens comme elle, rarissimes ; quelques autres, presque aussi rares, qui ont vraiment le coffre d’encaisser, je les tiens pour ma part pour des saints, issus de quelque limbe ; le défilé, entre ces deux extrêmes, de tous ceux qui sont blessés, mais préfèrent rire jaunes, parce que l’humoriste, un peu comme le prêtre, c’est sacré. Ils ont appris ça, dans des cours de communication, faire le dos rond. Rester souriants, cools, surtout ne pas craquer : ce serait dévastateur pour l’image.

    Micheline Calmy-Rey, très simplement, reconnaît ne pas être une femme d’humour. Elle ne triche pas, ne tente pas de donner le change. Elle casse ce tabou par lequel il faudrait être en génuflexion devant l’intouchable officiant de la sacralité humoristique.

    Au fond, c’est elle qui transgresse. Mais il ne faut pas le dire trop fort. Ca manquerait d’humour.

     

     

    Pascal Décaillet