Dimanche 06.12.09 - 10.20h
Opposé à l’initiative sur les minarets, donc clairement dans le camp des perdants, dimanche dernier, je n’ai apprécié que très moyennement la folie burqa qui a immédiatement suivi. Que le président du PDC suisse, au demeurant l’un des politiques les plus doués et les plus habiles du pays, joue ce jeu-là, m’a déçu. En allant remuer la poudrière religieuse en Suisse, raviver de vieilles querelles de cimetières confessionnels, il a joué avec le feu. Il s’en est certes excusé, dont acte.
Cette maladresse, ironie du sort, survient à un moment où le Flandrin des glaciers subodore peut-être un nouveau carrefour de destin. Président du parti, homme national, parfaitement bilingue, à l’aise à Arena tout autant que devant une assemblée de paysans de la Haute-Argovie ou du Toggenburg, homme pressé, lève-tôt, amant crépusculaire de la verticalité, funambule des arêtes, il ne glisse jamais sur la glace, mais dans l’ordre plus troublant, plus imprévisible, du langage. Christophe Darbellay, oui, contrairement aux hyper-contrôlés François Longchamp et Didier Burkhalter, laisse toujours affleurer la pointe de l’hyperbole. Les mots sous les mots, avec lui, ont leur chance. La possibilité d’un lapsus, aussi. L’interviewer est donc toujours un moment de bonheur, où ne manque jamais de surgir le mauvais garçon, le fier-à-bras de bal finissant, bref un goût salé d’aventure, comme une écume de Dranse, qu’on désespère de trouver chez d’autres. Les uns sont plutôt notaires, lui franchement Gavroche.
Ainsi, tout récemment, au Grand Oral, enregistré l’avant-veille de la Bérézina de Jean-Michel Cina autour de la loi sur le tourisme, le Flandrin, au moment le plus inattendu, attaque : « Oui, un retour en Valais m’intéresse ». À neuf mois seulement du début de législature, fallait oser ! Anticipant sur la mort politique de l’ancien président de Salquenen, le fauve en dévore déjà viscères et entrailles. C’est visible, gros comme un vautour mâle sous la lune, épais comme un câble de téléphérique de Veysonnaz, mais ça fonctionne.
Reviendra-t-il en Valais ? Si oui, qui aura-t-il contre lui ? Freysinger, tout aussi éligible et dopé à mort par sa récente victoire ? Jean-Michel Cina finira-t-il la législature ? La paix de Veysonnaz, manifestement scellée avec Jean-Marie Fournier, n’est-elle qu’un cessez-le-feu, un pacte des loups pour mieux abattre un ennemi commun ? Entre Valais et Judée, Schiner et Supersaxo, entre maquereaux des cimes et paroles de prophètes, le spectacle de la politique valaisanne, toujours recommencé, n’a pas fini de nous estourbir. Alors, d’accord, mourons. Mais, si possible, pas trop vite.
Pascal Décaillet