Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Mais faut-il à tout prix discuter ?

     

    Sur le vif - Vendredi 31.07.20 - 10.01h

     

    La souveraineté n'est pas une option, comme le serait le gadget d'une nouvelle automobile. Si on se veut pays, si on se déclare tel dans le monde, alors il faut l'indépendance. Il faut la souveraineté. Et il faut s'en donner les moyens. Sinon, à terme, c'est l'intégration dans un empire plus vaste, ce que d'aucuns souhaitent, pas moi.

    Nation ou partie d'un empire, il faut choisir. L'empire n'est pas le diable, c'est une option. Simplement, ça n'est pas la mienne. Comme humain, comme citoyen, comme petit entrepreneur, je sais ce que signifie pour moi l'indépendance. C'est vital. C'est cela, ou la mort. D'autres voient les choses autrement, se fondent volontiers dans un groupe, c'est leur affaire. Moi, je suis sauvage, intraitable, j'ai besoin de décider de mon destin, au maximum de ce qui dépend de moi. C'est ainsi.

    Ce qui vaut pour un humain, vaut pour un pays. La Suisse n'est ni meilleure ni pire qu'un autre, elle est ce qu'elle est, elle est mon pays. Je respecte tous les autres, tous les peuples, tous les humains. Mais je défends le pays qui est le mien.

    Car aussi individualiste soit mon tempérament, qui rejette les groupes, les factions, les partis, il se trouve que je suis citoyen suisse. J'en assume toutes les responsabilités. J'en assume les devoirs, et l'ai prouvé, par exemple, par quelque 500 jours d'engagement au sein de notre armée. Ou encore, en consacrant toute ma vie professionnelle à traiter les enjeux politiques de la Suisse, et non les faits divers, encore moins le people. Et j'en assume les droits : quasiment jamais raté votation, depuis que j'ai l'âge de me prononcer.

    Citoyen, j'annonce la couleur. Je donne mon point de vue. Comme n'importe lequel des millions de citoyennes et citoyens de ce pays en a le droit. Je ne suis pas un eunuque, je m'exprime. Cela plaît à certains, déplaît à d'autres, ça m'est parfaitement égal. Nul, jamais, nulle part, ne pourra m'empêcher de dire comment je vois les choses.

    Cette férocité indépendante, je la veux aussi pour mon pays. Je la projette sur lui. Indépendance, souveraineté, cela ne signifie absolument qu'il faille se couper du monde. Ni des échanges. Encore moins, de la curiosité culturelle qui nous pousse vers les autres peuples, en apprendre les langues, les Histoires. Il me semble, en ce domaine, avoir, au cours de ma vie, donné l'un ou l'autre exemple. Il est peu de pays d'Europe que je n'aie visités. Je me passionne depuis un demi-siècle pour l'Histoire allemande, l'Histoire de France, celle des Balkans, de l'Afrique du Nord, du Proche-Orient.

    De même, vouloir le contrôle des flux migratoires, ça n'est pas en vouloir l'arrêt. Ceux qui, à dessein, mêlent ces deux notions, pour induire le peuple en erreur, sont des trompeurs. Et des menteurs. Contrôler le flux, c'est adapter la quantité d'immigration à nos besoins. C'est un enjeu citoyen : la décision politique l'emporte sur l'acceptation d'une pression.

    Je suis un homme libre et indépendant. J'ai des amis, et des ennemis. Je défends les causes que je crois justes. J'explique pourquoi. Je fais mon boulot de citoyen.

    Je voudrais tant que mon pays agisse, à son niveau, ainsi. Liberté, indépendance, souveraineté. Travail infatigable pour assurer la survie économique. Diversification des réseaux. Connaissance des autres. Renseignement continuel sur l'état des fronts. C'est autrement stimulant, à mes yeux, que l'intégration à un empire. Pour exister, on commence par s'affirmer soi-même, très fort. Ensuite, s'il le faut, on discute.

    Mais faut-il à tout prix discuter ?

     

    Pascal Décaillet

  • Gisèle Halimi : la classe et la grâce

     

    Sur le vif - Mardi 28.07.20 - 16.00h

     

    Gisèle Halimi (1927-2020) a été une très grande dame. L'une de celles qui entraînent adhésion et admiration. D'abord, par le courage de son engagement, tout au long de sa vie. Mais aussi, l'immense classe qui l'habitait. La qualité de son élocution, la douceur ciselée des mots, la précision du verbe, la très haute sérénité de sa tenue, face aux causes les plus enflammées. Je pense, notamment, à son combat pour les gens du FLN, dans les dernières années de la Guerre d'Algérie. Rappelons que nombre d'entre eux, combattants politiques, furent guillotinés par la République française. Et qu'un certain Garde des Sceaux, sous Guy Mollet, recommandait au Président Coty que la justice suivît son cours.

    Habitée d'un feu intérieur, Gisèle Halimi plaidait ses causes avec un calme impressionnant. Cette femme d'exception, par l'universalisme de son engagement, qui allait de la défense des femmes opprimées à celle des peuples se libérant du joug (la Tunisie, l'Algérie), était le contraire même d'une sectaire. Chacune de ses paroles, chacune de ses phrases, respirait l'humanisme. Celui qui abolit les frontières entre les genres, entre les peuples.

    Au-dessus des causes, des combats, des décombres, demeure chez cette femme l'une des qualités les plus rares, le feu d'une vie forgeant la précision du verbe. Cette alchimie, sans crise ni psychodrame : juste la mise en place, à la fois rationnelle et passionnée, du combat.

     

    Pascal Décaillet

  • L'Europe de Macron : l'opium des élites

     

    Sur le vif - Vendredi 24.07.20 - 11.45h

     

    Entre frugaux et dévoreurs, on s'est bagarré sur quoi, à Bruxelles ? Sur un grand projet d'identité continentale ? Sur un socle de valeurs ? Sur la place de Rousseau, Goethe, Hölderlin, Paul Celan, Kafka, Dante, Pétrarque, Pessoa, Séféris, Odysséas Elytis, ou alors Dvorak, Sibélius, Bela Bartok, dans ce qui serait un Panthéon commun ?

    Pas du tout ! On s'est déchiré sur une affaire de croupiers. Une sombre et visqueuse cause d'arrangement du débiteur avec la banque du casino. Les plus puissants, les flambeurs, les mauvais garçons, les bluffeurs et les crâneurs, bref les Macron et séides, ont exigé de leurs camarades d'infortune qu'on fasse sauter la banque. "Nous sommes endettés ? Aucun problème ! Multiplions la dette !".

    Ça n'est plus l'Europe. Ça n'est plus la politique. Ça n'est plus Colbert, ni Kant. Adieu, la Raison ! Adieu, la responsabilité ! Adieu, l'appel à la Lumière ! Adieu, toute espérance de lucidité ! Adieu, le "Mehr Licht" de Goethe expirant ! En lieu et place, le pouvoir aux usuriers, le culte du Veau d'or, le chemin étoilé de la facilité, le renoncement au sacrifice.

    Et il est des naïfs pour s'en féliciter ! Tendres âmes ! Où le sureau tient lieu de clairvoyance. Sirupeuses errances. Dans le grand jardin du renoncement, elles étendront leur doux feuillage.

    La réalité du monde d'aujourd'hui, c'est encore celle des nations. Chacune d'entre elles, souveraine. Responsable de sa survie. De sa sécurité. De ses frontières. Garante de ses lois, démocratiquement votées. Soucieuse de sa cohésion sociale. Là est le concret. Le réel. Le palpable. Le vrai souci des peuples. Aux élites, laissons l'oisiveté. Et l'opium.

     

    Pascal Décaillet