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Liberté - Page 1523

  • Samuel Schmid seul contre lui-même

    Chronique publiée dans le Giornale del Popolo du jeudi 02.10.08

     

    Cette session d’automne 2008 aura présenté, avec le débat sur l’armée et celui sur le programme d’armement, l’une des lignes de front les plus surréalistes depuis la très regrettée guerre de 14-18. Un ministre seul au monde, seul contre tous, seul contre lui-même, nu, au milieu de nulle part, dans un grand terrain vague où ne règne plus qu’une épaisse fumée. Pas la fumée blanche des papes, non : juste celle, grisâtre, opaque, de l’incertitude, et, peut-être même, de la déroute. De quoi lui rappeler, comme dans « Amarcord », quelques délicieux souvenirs d’enfance : non pas Rimini, hélas, mais le Seeland, et la suave humidité de ses marécages.

    Aux Chambres fédérales, on a discuté des chars sans y croire, on a parlé des avions sans vraiment s’y intéresser : le problème, manifestement, n’était pas là. Il était – mais nul ne l’avouait vraiment – dans l’extrême fragilité politique de Samuel Schmid, conseiller fédéral sous perfusion : on guette l’encéphalogramme, on se demande combien de temps il tiendra. Tout est prêt, déjà : les fleurs, l’ultime oraison, le cortège. Et, bien sûr, quelques successeurs. Prêts à bondir, tous. Mais simulant l’indifférence. Comme dans un jeu de séduction qui, bien sûr, ne dupe personne. Mais c’est le jeu.

    Sur quelle alliance s’est construit le rejet du programme d’armement ? Sur un compromis de passage, aussi hasardeux qu’il est dénué de sens, entre l’UDC blocherienne (ce qui demeure, au passage, un pléonasme) et la gauche rose-verte. La belle alliance ! Le voilà donc, l’axe du monde de l’après -12 décembre ! La vague mixture des partisans de l’armée de papa avec ceux qui, au fond, rêveraient de l’abolir. Parler d’alliance malsaine est un euphémisme : nous sommes là dans le degré zéro de la politique. Même les brumes du Seeland, dans toute leur fatigue d’automne, sont le soleil d’Austerlitz, en comparaison.

    Dans ce casse-pipes ouaté d’incertitude, un seul axe de cohérence demeure : la fidélité – un moment encore – des radicaux et des démocrates-chrétiens à la construction raisonnable d’une future politique de sécurité. C’est bien. Mais c’est trop tard. L’UDC a obtenu ce qu’elle voulait : venger le 12 décembre, venger Blocher, humilier le parlement et, plus encore, celui des conseillers fédéraux qu’elle tient pour un traître. Pour y parvenir, elle n’a pas hésité à prendre en otage le thème, pourtant essentiel, de l’avenir de notre politique de sécurité. On savait déjà que cette législature allait être celle de l’impossible. Elle est bien partie, aussi, pour devenir celle du ridicule. Heureusement, ce dernier, contrairement aux guerres et aux batailles, ne tue pas. Ou alors, tout juste, symboliquement. Comme aux échecs. Ou comme dans les rêves d’automne.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Démagogie fumeuse


    Edito du 7-8  -  Radio Cité  - Mercredi 01.10.08  -  07.05h

     

    Hier matin, 10.38h, nous vous annoncions en primeur, sur cette antenne, la décision du Tribunal fédéral sur la fumée à Genève. Ce matin, la presse en est pleine. Hier soir déjà, les bistrots ne bruissaient que de fumeuses conversations sur le pouvoir des juges et le travail un peu trop rapide du Conseil d’Etat.

    Hier, bien sûr, notre Cour suprême était totalement habilitée à statuer, puisqu’il s’agissait d’un règlement, donc d’un texte passible de recours. Et c’est bien là le problème. En politique, en toutes choses, il faut des lois. Avec une onction, une légitimité, soit du parlement, soit du peuple.

    Dans l’affaire de la cigarette à Genève, il y a eu, le 24 février, une majorité sans appel du corps électoral genevois, le signal politique était parfaitement clair. Et il méritait, ce signal, d’être ancré proprement dans la législation. Quitte à aller un peu moins vite en besogne. De là à imaginer que cette excessive célérité fût animée par des motifs démagogiques, la pression de l’opinion, il y a un pas. Que nous franchissons sans état d’âme.

    Tout cela est un beau gâchis: lorsqu’il s’agit de décisions souveraines du peuple, moins on sollicite les juges, mieux la démocratie se porte. Le Conseil d’Etat, à la fin de l’hiver, a voulu faire un tabac. Il n’aura réussi qu’un écran de fumée.

     

    Pascal Décaillet

  • Roger Deneys, l'impasse du destin


     

    Sur le vif – Mardi 30.09.08 – 09.25h

     

    Député au Grand Conseil, élu pour s’occuper du bien commun, le socialiste Roger Deneys passe le plus clair de son temps à expectorer, dans un style où l’approximatif le dispute au nauséabond, le plus noir de son fiel contre tout journaliste de ce pays donnant la parole à d’autres voix que celles de son seul camp. C’est son occupation principale. Son moteur.

    Cet élu, dont on attend vainement, au passage, l’amorce d’une idée pour faire avancer la vie de la Cité, s’en va vitupérant, toutes stridences sifflées, toute haine de l’autre joyeusement crachée, sur les chemins d’impasse de son destin. C’est son droit. Chacun occupe son existence comme il peut. Mais Roger Deneys, au fond, existe-t-il ?

    Ce qui est un peu plus inquiétant, c’est la confirmation, chez certains socialistes genevois (Dieu merci, pas majoritaires) de l’incapacité à perdre une élection sans immédiatement en rendre responsable la presse, comme on tue le messager de la mauvaise nouvelle. Oui, il y a, dans ce parti cantonal, une petite clique de censeurs, détestant au fond la presse, la libre circulation des idées, rugissant dès qu’on donne la parole à leurs adversaires, ou qu’on exprime un point de vue contrariant leur dogme. Juste une clique, mais qui fait du bruit : naguère un conseiller national, aujourd’hui une magistrate de la Ville, ainsi qu’un maire, lorsqu’on omet de faire la révérence devant la Lumière de sa Préciosité. Autant dire, pas grand monde.

    D’autant plus dommage que le président de ce parti, René Longet, se trouve être, lui, un véritable homme de dialogue, de tolérance, et de confrontation d’idées. Lui, et tant d’autres, nettement majoritaires dans le parti. Pourrait-on espérer que cette majorité rappelle au petit clan des aigris et des mauvais perdants qu’une démocratie passe par le choc des idées, l’acceptation de la différence éditoriale ? Bref, la liberté. Les socialistes connaissent-ils encore ce mot ?

     

     

    Pascal Décaillet