Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Liberté - Page 1521

  • Julia Varady : le passage de flambeau

     

    Mardi 21.10.08 – 13h

     

    Hier soir, 22.25h, sur Arte : un documentaire à vous prendre aux tripes. Une heure avec Julia Varady, l’une des plus grandes cantatrices du vingtième siècle, enseignant le chant à l’une des ses élèves, elle-même déjà de très haut niveau. Deux femmes, en espace clos, l’une face à l’autre. Celle qui donne, celle qui reçoit. En arrière-fond, deux pianistes, muettes et comme fascinées par ce privilège d’humanité, d’intimité, le passage d’un flambeau.

    Il y a de quoi : tout ce qu’on a pu écrire sur la transmission s’efface et se transcende dans l’archaïque magie du contact entre ces deux femmes. Julia, 67 ans aujourd’hui, retirée de la scène depuis 2003, a choisi de transmettre son incomparable savoir-faire, dans l’art vocal, à des élèves. Bien plus qu’une master class, c’est un rite d’initiation, de l’ordre du feu, détail par détail, tellement physique, un appel à la résonance (celle des os du visage, du crâne) bien plus qu’au raisonnement.

    Julia ne laisse rien au hasard. Ce corps comme instrument, elle veut en tirer le maximum. Eprouvant, dur, épuisant, sublime. Ce chant qu’on croirait venu du ciel, surgit en fait de toute la matérialité de nos artères, nos entrailles, nos cartilages, jusqu’à ces cloisons nasales qu’il faut torturer pour en extorquer quelque son. A noter que l’élève, exceptionnelle de souplesse et d’adaptation, contribue largement au bonheur total de cette émission.

    Surtout, Julia chante. Avant l’élève, en même temps qu’elle, ou juste après. Des yeux, même au sommet des vocalises, elle ne quitte jamais son disciple. En fusion avec elle. Elle l’élève. Encore plus haut. Elle chante, s’interrompt une seconde pour une injonction ("Prends du plaisir !"), reprend la note au scalpel, saisit des mains les joues, ou le nez, ou le cou, ou le haut de la tête de l’autre, en appelle au physique, au corporel, ductile, rapide comme une comète, et voilà les deux femmes qui rechantent ensemble, sans avoir perdu une seule mesure. Fascinant.

    C’était hier soir, sur Arte. Un moment de grâce. Lumineux comme une Annonciation. A voir et revoir, absolument.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • JSE président ?

    Sur le vif  -  Lundi 20 octobre 2008  -  12.20h

     

    Il est élégant, gentleman, fin politique, et pourvu d’une belle culture historique. Libéral, il n’a jamais fait partie des ultras, ceux qui prônent l’économie de casino au détriment de celle de l’entreprise, et dont les dernières semaines viennent de montrer le merveilleux résultat. Homme de droite, il a toujours cherché le dialogue et les solutions. Genevois, il aime passionnément la Suisse, ce qu’elle a de multiple, ce charme discret dont parle si bien Denis de Rougemont. Peut-être pour consacrer tout cela, cette tonalité assagie par l’expérience, cette attention portée aux idées, le peuple genevois, hier, a fait de Jacques-Simon Eggly le meilleur élu de la future Constituante. Juste récompense.

    De cet ancien confrère du Journal de Genève, je ne dirais pas, comme de Blocher, Maillard, Maudet ou Darbellay, qu’il est habité par le démon politique. Non. Chez JSE, la passion, l’ambition sont moins immédiatement viscérales, moins telluriques. Plus aériennes. Avec ce que ce mot comporte de survol. Je n’ai pas dit « amateurisme ». Eggly, comme Pierre Weiss, est un esprit avant tout parlementaire : nul, ni sans doute lui-même, ne l’imaginerait dans un exécutif. Excellent orateur sans être tribunitien, toujours clair sans être populiste, bretteur sans être un tueur, ce que sont les quatre fauves cités au début de ce paragraphe.

    Dès lors, une idée, juste en passant. N’avons-nous pas là le portrait-robot du président idéal, pour le cercle des quatre-vingts chargés d’imaginer une nouvelle Charte fondamentale, à Genève ? Affable et assagi, éternel jeune homme déguisé en aîné comme Ulysse en mendiant, mémoire de quatre décennies de vie politique suisse. Seul, dans ce futur cénacle, Christian Grobet peut aligner une expérience comparable, et même supérieure. Mais pas dans l’art du dialogue. Et puis, a-t-on idée de laisser paître un carnassier sur un perchoir, gâchis que même Noé, dans la joyeuse exiguïté de son Arche, n’aurait imaginé ?

    Il y aurait bien Pierre Kunz, aussi, ou le Sage Albert Rodrik, l’un et l’autre excellents, mais il me semble que ces deux-là se feront mieux valoir dans l’arène qu’en position d’arbitre. Dans tous les cas, ce poste ne doit pas échoir au premier venu : il y faudra de la patine et du ressort, du cuir épais et de l’élasticité, des idées propres et de l’écoute, la vivacité d’un verbe et l’attention à l’autre. En filigrane, Jacques-Simon Eggly. Aux quatre-vingts de juger. Cette solution-là, en tout cas, ne manquerait ni de panache, ni d’éclat.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • Pour le retour de Victor Dumitrescu

    Sur le vif  -  Jeudi 16.10.08  11.10h

     

    Il semblerait que Victor Dumitrescu ait été évincé de cet espace de blogs. Je ne sais si cela est exact.

    Victor Dumitrescu est quelqu’un dont je ne partage pas les options politiques. Mais sa plume est vive, sa réactivité remarquable, et il est toujours courtois. Il a de l’humour, de la culture, un arrière-pays, et sans doute une souffrance, hautement dignes d’intérêt.

    Surtout : il a le courage de signer ses papiers. D’un nom et d’un prénom.

    Il est très clair, pour moi, que Victor Dumitrescu a totalement droit de cité dans ces blogs. Et qu’il doit y être réintégré au plus vite.


    Pascal Décaillet