Analyse, suite aux Assemblées de délégués du PDC et de l'UDC, samedi 20.06.09, 17h
Il devait souffler, aujourd’hui à Delémont, comme un parfum de dame en noir. Le souvenir de Ruth Metzler. Ce mercredi de décembre 2003, le siège perdu : une alliance froide entre radicaux et UDC, la Realpolitik. Dès lors, le PDC n’avait plus qu’à mourir, mourir pour renaître, renaître pour reconquérir. Devant le congrès de son parti, tout à l’heure dans la capitale jurassienne, Christophe Darbellay a confirmé avec une dionysiaque ivresse sa rage de Reconquista. Au même moment, devant l’Assemblée des délégués de l’UDC, Toni Brunner accusait le Valaisan de vouloir pulvériser la concordance suisse.
Brunner se trompe. C’est une autre concordance que va tenter (par un travail estival qui promet d’être acharné) de mettre en place le président du PDC. Un nouvel axe, où l’épée du monde serait le Centre, avec des tentatives de séduction sur les Verts, quelques socialistes, quelques libéraux-radicaux, et pourquoi pas quelques UDC. Bref, un patchwork. Pour parachever ce montage, il s’agira de grappiller les suffrages à l’unité près, jusqu’à la nuit du 15 au 16 septembre, incluse. Et arrosée.
Car les libéraux-radicaux, titulaires du siège vacant, ne feront pas le moindre cadeau à leurs chers ennemis du Sonderbund. La majorité numérique, ils l’ont. Les hommes et les femmes de valeur, aussi. La légitimation de l’Histoire, le rôle de leur famille politique dans le façonnement de la Suisse moderne, encore plus. Dès lors, la seule carte de Darbellay sera d’afficher un programme gouvernemental de rupture, ce qui a déjà été esquissé, aujourd’hui à Delémont, avec une proposition de refonte en profondeur du système de santé. Et, à la volée, cette petite gentillesse pour Pascal Couchepin, en guise de droit d’inventaire : « Ces dernières années, la politique de santé a été une politique de rafistolage ». Ou quand Brutus nous raconte la vie de César…
Comment Christophe Darbellay va-t-il se débrouiller pour que sa tentative de recomposition ne soit pas perçue, une nouvelle fois après le 13 décembre 2007, comme une trahison de la droite suisse ? À cette question majeure, en ce samedi 20 juin 2009, je n’ai pas de réponse. Car le grand défi des anciens adversaires du Sonderbund et du Kulturkampf, c’est justement de dépasser les fractures de l’Histoire et de se rassembler. Un grand parti de centre-droit, en Suisse, entre la gauche et l’UDC. La haine qui oppose MM Pelli et Darbellay, la cruauté de la compétition estivale qui s’annonce, tout cela pourrait bien, après l’élection, laisser des traces. Et ralentir, voire geler un processus de rapprochement que le sens de l’Histoire devrait pourtant dicter à ces deux grandes familles politiques qui ont tant fait pour inventer la Suisse moderne.
Pascal Décaillet