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Sur le vif - Page 886

  • Scénario pour une Revue

     

    Fagments - Mercredi 24.10.12 - 15.08h

     

    Acte III, scène 1 – Bureau crasseux, rideaux jaunâtres, vieilles Remingtons, ventilateurs années quarante empesés de sirocco. Bouteilles de whisky bon marché servant de vases à des plantes pestilentielles. Le bureau du juge D. Rien ne se passe. C’est la scène du silence.

     

    Acte III, scène 2 – Le juge D. somnole. Dans un tintamarre d’enfer, le juge G. surgit comme un métal hurlant, se rue sur son collègue, veut lui faire avaler sa barbe. Par la fenêtre ouverte, on n’entend que le bruit des sirènes. C’est le Super-Procureur qui arrive.

     

    Acte III, scène 3 – Déjà, le juge G. a pris la fuite. Le juge D. cherche ses lunettes, hélas écrasées par la piétinante folie de l’intrus. Il saigne du nez, tente de se relever. Retombe. Il revoit passer sa vie, une vie de juge, l’intimité des prétoires, la jouissance des dossiers. Il est là, presque heureux, à gésir au milieu des cafards.

     

    Acte III, scène 4 – Brisant la fenêtre, le Super Procureur arrive. Du ciel ! Cuir noir, moulant, masque sur les yeux, grande cape, celle des side-cars de la Wehrmacht, à l’époque bénie de la Meuse franchie. Incommodé par l’odeur, le Super Procureur se protège les narines d’un revers de son gant de dresseur d’aigles.

     

    Acte III, scène 5 – Les scellés – Le juge D., encore à terre, tout à gésir, regarde, impuissant, la porte du paradis se refermer. Rends-nous les documents, hurle le Super PG, l’infortuné juge déjà n’entend plus. Déjà, il est ailleurs. Une délicate mésange, sur le rebord de la fenêtre, vient se poser. Elle a la grâce du passage. Rideau.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Budget: les leçons d'un refus

     

    Sur le vif - Samedi 13.10.12 - 10.15h

     

    Le refus du budget, hier soir, par une nette majorité (54 contre 38), constitue un signal de premier ordre et un tournant dans une législature qui, pour le Conseil d’Etat, s’achève lamentablement. Il est certes revigoré, ce gouvernement, par le sang frais d’un Maudet, mais l’équipe est catastrophique, elle ne dégage aucune vision, aucune projection, si ce n’est de lointaines chimères concernant la région, ou la (congestion de toute) circulation en 2030. À ce Conseil d’Etat-là, incapable de s’en sortir (dixit l’UDC Eric Leyvraz) avec un budget de 8 milliards, il convenait de donner une leçon.

     

    C’est chose faite. Et l’arrogance d’un François Longchamp, oubliant parfois qu’il parlait aux élus du peuple, et ultimes responsables du budget, n’y changera rien. En voilà un, d’ailleurs, dont on ne cesse de nous dire, qu’on va en prendre pour cinq ans avec lui (en voilà une belle raison de voter non demain), dont il va falloir, de très près, contrôler les appétits de pouvoir absolu. Le pouvoir d’un super administrateur, d’un géomètre précis, plaçant ses hommes partout, ne laissant rien au hasard, et beaucoup d’autres choses encore.

     

    Revenons au budget. La leçon politique d’hier, c’est qu’allié avec deux partis de la Marge qu’il a jusqu’ici considérés comme des gueux, un PLR clairement inscrit dans sa famille politique naturelle, refusant les tiédeurs de bénitier des uns et les illusions écolo-libertaires des autres, peut faire la politique de ce canton. L’infléchir sérieusement, en tout cas. Et cette fois, enfin, avec une lisibilité politique (pour le rejoindre ou pour le combattre) que la population appréciera. Toutes ces années de gages, à pures fins électoralistes, donnés aux Verts (qui, bien sûr, hier soir, s’étouffaient d’indignation), ont été de nature, hélas, à diluer l’entendement même de la politique radicale, ou libérale.

     

    Mais cette ère est révolue. La récréation est terminée. On la vu avec l’affaire Vibourel, on l’a vu, en Ville, avec le camouflet aux rues piétonnes. Il y a, dans ce canton, une gauche et une droite. Il y a, quelque part, un Marais centriste qui pourrait bien payer assez cher, à l’automne 2013, la moiteur de son opportunisme poitevin. Et les mêmes hommes, chez les radicaux, qui faisaient il y a peu des courbettes aux Verts, sont ceux qui, aujourd’hui, reprennent à leur compte (par exemple en matière de préférence cantonale) le discours honni du MCG.

     

    Oui,  cette décision d’hier soir marque un tournant. Et peut-être, au fond, la première mise en action des troupes pour la campagne électorale. Sur des bases qui méritaient d’être clarifiées. Les mêmes qui, pour leur destin personnel, avaient brouillé le message en 2009, sont ceux qui, aujourd’hui, lui rendent clarté et lisibilité. Par pragmatisme : ils ne connaissent d’ailleurs que cela.

     

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Genève: l'Etat PLR

     

    Sur le vif - Mercredi 26.09.12 - 17.25h

     

    Je ne doute pas une seconde des compétences de Michel Halpérin pour présider les HUG. Ni de celles d’Alain Peyrot pour les SIG. Mais enfin, ils sont les deux PLR, et même clairement libéraux, ils ont l’un et l’autre présidé le parti, ils en sont l’aristocratie, la chevalerie, la nocturne continuité, même sous l’étoile de la fusion. Deux radicaux au Conseil d’Etat, et pas les moindres, il fallait bien un gage au cher cousin, non ?

     

    Les gages. Un libéral à la tête des HUG. Un libéral à la tête des SIG. Une libérale (Mme Rochat, directement présidente) à la tête de l’AIG. Pour des institutions qu’on voulait expressément « dépolitiser », c’est bien parti ! Des PLR partout, deux conseillers d’Etat radicaux qui sont en train de nous bichonner un amour de petit noyautage de la haute administration et des régies par les leurs, cela porte un nom : cela s’appelle l’Etat PLR. Une armée. Propre, organisée, avec ses réseaux : le renseignement, l’intendance, les troupes de choc. Il ne manque que « le noir kolback ou le casque poli », chers au poète.

     

    Les deux conseillers d’Etat radicaux sont intelligents et compétents. On ne va pas s’en plaindre ! Mais leur manière de placer leurs hommes, tisser leur toile, est un peu trop visible. Et puis, qui dirige vraiment le PLR ? L’aimable bailli, ou les magistrats exécutifs ? Vertige du pouvoir, quand il s’offre trop à vous. Par la faiblesse de certains autres, c’est vrai. Mais jamais, en Suisse, pour très longtemps. Pour l’heure, en tout cas, et pour pas mal de mois qui nous attendent, nous sommes sous le sceau de l’Etat PLR. Puisse-t-il, lui qui aime tant se prévaloir des Lumières, exercer de façon éclairée son despotisme.

     

    Pascal Décaillet