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Sur le vif - Page 817

  • FN : la captation d'héritage

     

    Sur le vif - Lundi 26.05.14 - 10.17h

     

    Le Front national arrivé hier soir loin devant la « droite classique », nous sommes là, en politique intérieure française, face à une première depuis la Libération. Pour la première fois, cette mouvance dépasse le conglomérat de ce que furent le gaullisme, le libéralisme, une partie de la démocratie chrétienne des immédiates années d’après-guerre (le MRP), laquelle se disperse aujourd’hui entre UMP et formation centriste autonome. Mais tout cela, tout ce bloc, toute cette congrégation, fédérés pour de pures raisons électorales sous un seul sigle (UMP), oui tout cela réuni, est aujourd’hui dépassé de 5% par le Front national. C’est ce phénomène, ici, qui m’intéresse, à l’intérieur de la seule France. Pour les 27 autres pays, voyez vos journaux préférés.

     

    Il n’est, pour l’heure, de politiques que nationales. La dimension européenne n’existe qu’à l’horizon de la technocratie, mais pas à celle de la légitimité tellurique, ni à celle de la reconnaissance et de l’incarnation. On nous dit que M. Juncker sera peut-être président de la Commission. Savez-vous seulement qui est M. Juncker ? Vous remettez-vous son visage ? Avec-vous en mémoire le son de sa voix ? A-t-il provoqué chez vous la moindre émotion dans l’ordre de la politique ?

     

    Né au printemps 1958, donc exactement au moment du retour du général de Gaulle, passionné de politique française dès mes plus jeunes années, j’ai grandi dans l’idée que tout se construisait autour du gaullisme, qu’on l’appelât UNR, UDR ou, plus tard, RPR. Parfois, avec Giscard, les Républicains indépendants (plus libéraux) marquaient des points, parfois l’ombrageux souverainisme reprenait le dessus, mais enfin à droite, la partie se jouait entre ces deux camps. L’extrême droite n’existait quasiment pas, on savait bien qu’il y avait, dans l’ombre, des nostalgique de Vichy et de l’OAS qui s’activaient, mais la Cinquième République, avec son système majoritaire et surtout la prestance de son fondateur, reléguait ce petit monde dans les coulisses du théâtre politique. C’est au début des années 80 seulement, fédérés sous la bannière du Front national, que ces milieux entameront, longuement mais inexorablement, l’ascension qui les a conduits à la journée d’hier.

     

    Aujourd’hui, pour la première fois depuis la Libération, cette droite-là dépasse la coagulation de toutes les autres droites, issues des réseaux de la Résistance gaulliste, ou de la Résistance chrétienne (MRP), ou d’un courant libéral qui n’a jamais, à part sous Guizot et le Second Empire, été très puissant en France, auxquels s’accrochent des « divers droites » plus ou moins classables. Pour la première fois, la droite qu’on qualifie d’extrême dépasse l’addition des droites classiques. C’est cela, dans l’Histoire politique française, qu’il faut retenir de la journée d’hier.

     

    Encore faut-il quelques explications. Les 25% d’hier ne sont pas tous issus de la Contre-Révolution, de la lecture de Joseph de Maistre, du courant anti-dreyfusard des années 1894-1906, de l’Action française, des Camelots du Roi, de Vichy ni de l’OAS. Sans doute même le fond dogmatique, allant dans l’une ou plusieurs de ces références, est-il fort minoritaire à l’intérieur du FN d’aujourd’hui. Et c’est là la grande victoire – par rapport à son père - de Marine Le Pen. Le Front national, aujourd’hui, c’est le grand parti protestataire, drainant toutes les couches de la population, à commencer par les plus défavorisées, prétendant avoir avec lui « le peuple français », « le peuple profond ». C’est, aussi, le parti ayant fait clairement le choix du souverainisme national contre la machine européenne.

     

    Avoir avec soi « le peuple », contre les corps intermédiaires. Défendre la souveraineté de la nation. Ça ne vous rappelle rien ? Moi, si. Cela me rappelle le général de Gaulle. Autrement dit, le pire ennemi de cette mouvance historique. Le pire ennemi de Vichy. Le pire ennemi de l’OAS. Celui que cette dernière, au Petit-Clamart, a tenté d’abattre. L’homme qui a rétabli la République en 1944, sauvé le pays de ses ferments de dispersion, créé la Cinquième République, donné à la France sa plus belle décennie. Toute l’Histoire de Marine Le Pen, contrairement à son père, personnellement impliqué dans la férocité et l'extrême violence de l'antigaullisme, c’est d’avoir réussi une captation d’héritage sur certains des thèmes fondamentaux du gaullisme historique : souveraineté, appel au peuple, méfiance par rapport au supranational. Oui, cela s'appelle une captation d'héritage. Sur le legs d'un père qui n'est pas le sien, et que son père physique a combattu avec l'ultime énergie. Nous ne sommes pas loin de Shakespeare.

     

    Et le plus fou, c’est que ça a marché. Parce que les héritiers organiques du Général, qui ne sont en fait héritiers de rien du tout tellement ils n’ont rien à voir avec lui, les orléanistes Sarkozy et Copé, ont laissé filer ces fondamentaux dans les mains de gens trop heureux de s’en emparer. De Gaulle n’était pas un homme d’argent. Il était un moine entré dans l’Histoire, vivant dans la seule ascèse de la France et de la République. Le dévoiement de ceux qui, aujourd’hui, osent se réclamer de lui, leur intrication dans les puissances financières, la permanence et la récurrence des « affaires », tout cela, au fil des ans, a organisé l’émigration massive d’une bonne partie de l’électorat vers le Front national. Ce dernier, historiquement, se renforce lorsque la gauche ou la droite de l’argent sont au pouvoir. Avec l’austère majesté, l’assise populaire, la mission historique d’un Charles de Gaulle, ces gens-là étaient laminés. Et rongeaient leur frein dans le caniveau. Oui, la faiblesse morale de la droite classique est un facteur majeur de la montée de « cette droite-là ».

     

    Je n’ai parlé, ici, que d’un pays sur vingt-huit. Et, dans ce pays, que de la famille de droite. Disons que j’ai parlé de ce que je connais, ce qui nourrit mes lectures depuis quatre décennies. Pour les vingt-sept autres pays, merci de vous reporter à vos journaux préférés.

     

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le bon Docteur et la République

     

    Sur le vif - Mercredi 21.05.14 - 17.21h

     

    J’entends ce matin, à la RSR, que le bon Docteur Buchs, chef du groupe PDC, envisage un « Front républicain » contre les vainqueurs du scrutin du 18 mai sur les P+R en France voisine. Entendez, contre l’UDC et le MCG. Au passage, égrenant les partis qui constitueraient ce Front, il recense le PDC, le PLR, le PS et les Verts. Que fait-il d’Ensemble à Gauche ? A la vérité, par ce lapsus, le Docteur nous révèle qu’il songe avant tout à la bonne vieille coagulation des pouvoirs qui tient Genève depuis si longtemps. Tiens, l’alliance d’intérêts du CEVA, par exemple. En réalité, le bon Docteur nous fait une belle démonstration d'exclusion des Marges. Sur la gauche, comme sur la droite.

     

    Mais passons. Et revenons sur ce terme, qui fleure les Brigades internationales et la Bataille de l’Ebre : « Front républicain ». L’adjectif doit-il nous laisser entendre que le Docteur exclut sémantiquement du champ de la République deux partis, l’UDC et le MCG, qui réunissent ensemble 31 des 100 députés du Grand Conseil ? Deux partis qui, à ma connaissance, ont toujours joué le jeu des urnes, de la démocratie, qu’elle soit directe ou parlementaire. Je ne sache pas (mais peut-être suis-je mal informé) qu’aucun des deux ait tenté jusqu’ici la moindre faction contre la République. Au contraire ! Sollicitant régulièrement le peuple par des voies parfaitement prévues dans notre Constitution (initiative et référendum), ces deux partis donnent à la démocratie et à la République une vitalité qui les réveille, les stimule, et finalement aiguise la responsabilité citoyenne.

     

    Que l’excellent Docteur envisage de créer un Front contre qui il veut, c’est totalement son droit. Mais le qualifier de « républicain » lorsqu’il est dirigé contre deux partis qui s’activent – comme les autres – à la vie de la République, il y a quelque chose, dans l’ordre de la terminologie, qui doit m’échapper.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Le cadeau empoisonné à M. Dal Busco

     

    Sur le vif - Mardi 20.05.14 - 10.21h


    Nous avons été les premiers, il y a quelques semaines, à pointer les problèmes de l'Office des Bâtiments, à Genève. Il y a deux semaines, nous dévoilions le chiffre de 750 millions, avancé devant la Commission des Finances par le chef de cet Office, dont on apprenait par hasard le départ quelques jours après. 750 millions, nécessaires selon lui à la rénovation du parc immobilier de l'Etat.

     

    Comment fut opérée, ces deux dernières années, la direction politique de cet Office ? Comment furent décidés les arbitrages financiers ? Toutes ces questions, nous les poserons lundi 26 mai, à GAC, à Serge Dal Busco, qui écope là, en reprenant cet Office, d'un cadeau empoisonné.



    Les citoyens de ce canton veulent savoir pourquoi on n'arrive pas à débloquer les sommes nécessaires à la rénovation d'écoles qui tombent en lambeaux, sujet que nous avons traité la semaine dernière dans GHI. Tant qu'ils n'auront pas la réponse à ces questions, et qu'on répondra par la rigidité de lignes budgétaires figées, ou l'application métronomique de plans quinquennaux, il sera vain - et déplacé - de venir leur parler de Grand Genève ou d'investissements en France voisine.



    Pour l'heure, la responsabilité politique d'éventuelles errances à l'Office des bâtiments doit être établie. Il n'est pas question que M. Dal Busco, qui hérite d'une situation, soit tenu pour responsable de fautes qui lui seraient antérieures. Idem M. Barthassat, pour le CEVA. Mais alors, Messieurs les Conseillers d'Etat PDC, montrez-nous que vous savez faire le ménage. Et vous affranchir de quelques lourdes tutelles, internes à votre collège.

     

    Pascal Décaillet