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Sur le vif - Page 695

  • La rose, les épines, les mirages

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    Sur le vif - Lundi 07.11.16 - 12.38h

     

    Que les libéraux soient favorables à la libre circulation, cela se peut aisément concevoir : c'est le cœur de cible de leur engagement politique. Mais que des partis de gauche, en Suisse, par exemple un grand parti historique, comme le parti socialiste, puissent réaffirmer leur soutien à ce principe, il y a quelque chose qui m'échappe.

     

    Qu'ils fussent en accord avec l'ouverture des frontières il y a une quinzaine d'années, lorsque cela fut voté par le peuple, on peut le comprendre. Mais enfin, aujourd'hui, ils devraient quand même voir que leurs fameuses mesures d'accompagnement, notamment pour éviter la sous-enchère salariale, aucune d'entre elles n'a été mise en oeuvre. On commence seulement aujourd'hui à le faire, et encore, avec des moyens dérisoires.

     

    Alors non, décidément, je ne comprends pas qu'un parti comme le PS, plus que centenaire, gouvernemental depuis 1943, ayant donné de très grands hommes à notre pays (Tschudi, Chavanne, etc.), puisse ainsi s'accrocher à un dogme né de l'ultra-libéralisme de la seconde partie des années 1990. Et refusent de prendre en compte la souffrance de toute une série de Suisses, sur le marché du travail (ou celui, hélas, du chômage), en lien direct avec les flux migratoires. Notamment dans les cantons frontaliers, comme Genève ou le Tessin. Mais pas seulement.

     

    A noter qu'il y a vingt ans, justement, en plein délire de cette submersion ultra-libérale, où les marchés financiers étaient sanctifiés, le citoyen remplacé par le client, les nations, l'Histoire et les frontières méprisées, pour ma part, là où j'étais, je prenais la plume ou donnais de la voix pour dénoncer ces dérives.

     

    C'était l'époque où un certain Pierre-Yves Maillard, très seul dans son parti où régnait un parfum de blairisme, luttait contre la libéralisation du marché de l'électricité. Déjà à l'époque, j'étais 100% d'accord avec lui.

     

    La position des socialistes suisses sur la libre circulation est incompréhensible. Autant que celle des syndicats. Ont-ils encore vocation à défendre les travailleurs suisses ?

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Sauver le dialogue social en Suisse

     

    Sur le vif - Dimanche 06.11.16 - 12.00h

     

    Voilà bien longtemps que la majorité des ouvriers suisses ne votent plus à gauche. Ils ont émigré vers d'autres sphères politiques. Dès lors, pourquoi doivent-ils, par obligation, s'affilier à des syndicats noyautés par la gauche ?

     

    Il y a quelque chose qui ne va pas. Oui, une réflexion s'impose sur la constitution, ces prochaines décennies, de nouvelles formes de syndicats en Suisse.

     

    De même, symétriquement, il faut envisager de nouvelles associations professionnelles représentant le petit patronat, dégagées de l'emprise de l'idéologie libérale et libre-échangiste.

     

    Libérer le syndicalisme ouvrier de l'internationalisme de gauche. Libérer les associations patronales de l'internationalisme libéral-libertaire de la droite de l'Argent. Celle qui s'agenouille devant les États-Unis dans la négociation d'accords commerciaux unilatéralement dictés par ces derniers.

     

    Entre ces deux dérives, construire un dialogue social national, dans la grande tradition suisse, celle des accords de 1937, où sont mis en valeur le respect du travail, le partage des connaissances, la transmission des valeurs et du savoir-faire, la formation duale, le dialogue pragmatique. Autour de la seule chose qui prime : l'amour commun du métier.

     

    Pour y parvenir, il faut que d'autres univers politiques que la gauche internationaliste (d'un côté) ou les libéraux libre-échangistes (de l'autre) commencent à s'investir sérieusement dans les associations professionnelles, en Suisse. Ce travail de conquête et d'ancrage sera difficile, prendra des années. Mais il est indispensable.

     

    Ce chantier est prioritaire. Pour le maintien du corps social en Suisse, l'un des précieux équilibres qui fondent le secret de la réussite de notre pays.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • La chanson douce du Parlement britannique

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    Sur le vif - Jeudi 03.11.16 - 12.40h

     

    La toute dernière péripétie de l'après-Brexit, à Londres, est un magnifique exemple du fossé grandissant, dans nos pays d'Europe, entre suffrage universel (lorsqu'on veut bien lui donner la parole) et "démocratie représentative", un système que les Anglais ont d'ailleurs inventé, bien avant la Révolution française.

     

    Je dis et écris souvent que le temps des Parlements, né avec les Lumières, formidables outils de contestation de l'absolutisme en ces temps-là, acteurs majeurs de la Révolution française, puis des événements de 1848, dans toute l'Europe, ce temps n'est pas éternel.

     

    Avec la prodigieuse évolution des techniques, le partage des connaissances, la mise en réseau du savoir, il ne sera peut-être plus nécessaire, d'ici un ou deux siècles, de confier le pouvoir à des "représentants". Entendez des gens qu'on élit, suite à des campagnes électorales, et qu'on envoie, pour quatre ou cinq ans, siéger, quelques sessions par an, dans une lointaine capitale. Ce système avait tout son sens au temps des lampes à huile, des diligences et de l'analphabétisme.

     

    Mais à l'époque des réseaux du savoir, de la montée des connaissances communes, il n'est pas déraisonnable d'imaginer, pour les génération à venir, un autre mode, plus participatif par le suffrage universel, de la prise de décision politique. Oh, il y aura toujours des Parlements. Pour fabriquer techniquement les lois, se disputer sur les virgules. Mais la décision politique suprême devrait être prise par le corps le plus élargi possible des citoyennes et citoyens.

     

    A cet égard, il n'est pas sans saveur que la première grande crise institutionnelle entre suffrage universel, exécutif et législatif provienne du Royaume-Uni. Ce pays qui, avant les autres, nous a légué la démocratie représentative. Cette dernière, en deux siècles et demi, n'a pas à rougir de tout ce qu'elle a apporté à nos pays d'Europe. Mais elle a vieilli. Elle n'a pas voulu voir venir l'émergence du suffrage universel. Du coup, et jusqu'en Suisse, pays où nous avons pourtant tellement l'habitude des décisions populaires, elle donne l'impression de se boucher le nez lorsque, d'en bas, on décide dans un sens qui ne lui convient pas. Elle a tort, évidemment. Elle se défend elle-même, comme un ultime bastion, une sorte de Fort Alamo de la légitimité.

     

    Elle a tort, tort, et tort. Car sa légitimité même, à elle, ne provient de nul autre que, justement, du suffrage universel.

     

    Pascal Décaillet