Face aux noirs de Soulages, l'œil errant du passant est saisi de lumière. Il est pris par la matière. Le goudron, impressionnant. La noix. L'acrylique. Plus le spectateur évolue au milieu des œuvres, plus il regrette la pauvreté de la langue française : le noir, le noir, le noir.
Et puis, le corridor des photographies. Pierre Soulages (99 ans le 24 décembre prochain) dans son atelier. L'homme en noir, au milieu de ses outils, de son matériau. Le petit coquillage posé à l'entrée, juste pour dire qu'il travaille.
Ici et là, de magnifiques citations du peintre, sur la solitude du spectateur, la quête incessante de la lumière.
Bref, allez voir Soulages. C'est à la Fondation Pierre Gianadda, à Martigny. Après le choc du noir, si riche et si nourrissant pour l'œil et pour l'âme, il y a les mille nuances de verts du jardin, où le feuillu de plaine est roi, sous la maternelle présence des montagnes.
Sur le chemin du retour, vous branchez Forum. Quelques minutes passionnantes sur la tragédie du glacier de Giétroz, 16 juin 1818, 16.30h, dans ce Val de Bagnes qui m'est si cher. La mort blanche, subite. Déjà, les noirs de Soulages, solaires, éblouissants, commencent à vous manquer.
Pascal Décaillet