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Sur le vif - Page 524

  • Un Conseil d'Etat béatement pro-UE

     

    Sur le vif - Mercredi 03.04.19 - 14.10h

     

    Composé de trois magistrats de gauche, de trois magistrats bien libéraux (y compris, hélas, le PDC), et d'un magistrat clignotant, mais censé être profilé sur les questions sociales, le Conseil d'Etat genevois réussit l'exploit de se prononcer en faveur de l'Accord-cadre institutionnel avec l'Union européenne !

     Outre que l'avis d'un gouvernement cantonal n'a guère d'importance sur une question à ce point fédérale - et qui devra absolument, le jour venu, être tranchée par le suffrage universel - on retrouve dans ce vote l'éternelle obédience du Conseil d'Etat genevois, même délesté de son Président 2013-2018, pour une Union européenne qui, dans ce dossier, met le pistolet sur la tempe des Suisses.

     La Suisse n'est pas membre de l'Union européenne. Elle détermine avec cette dernière les relations qu'elle veut, et n'a pas à se les laisser dicter par son partenaire de négociations.

     Depuis près de deux décennies, la libre circulation a laissé se creuser en Suisse un fossé social volontairement sous-estimé par les autorités, sous pression d'un certain patronat ne guettant que l'aubaine d'un profit facile.

     Les mesures d'accompagnement, promises à la gauche au début des années 2000, n'ont été qu'un monumental attrape-nigauds ; les syndicats commencent seulement à s'en rendre compte. Dans ces conditions, auxquelles s'ajoute l'abyssal déficit démocratique de l'Union européenne, comment la gauche suisse peut-elle encore se montrer ouverte, par un incroyable blanc-seing, aux partenaires de négociations, dans cette affaire "d'Accord-cadre institutionnel" ?

     Au Conseil d'Etat genevois, comment les magistrats de gauche peuvent-ils dire oui ? Comment le magistrat MCG peut-il dire oui ? Quant aux trois autres, trois libéraux (y compris le PDC), OK, c'est dans leur ADN de ne jamais contrarier les consignes du patronat.

     Mme Emery-Torracinta, quelle est votre position ? M. Apothéloz, quelle est votre position ? M. Hodgers, quelle est votre position ? M. Poggia, quelle est votre position ?

     

    Pascal Décaillet

     

  • Gilets jaunes : la carabistouille du "grand débat"

     

    Sur le vif - Samedi 30.03.19 - 16.14h

     

    J'avais dix ans en Mai 68, je me souviens de tout, j'avais suivi les événements avec passion, notamment via la radio. Le mouvement a duré plusieurs semaines, disons un peu plus d'un mois, si on veut considérer qu'après le 30 mai (contre-manifestation décisive des partisans de Charles de Gaulle), il y a eu encore quelques manifestations, moins connues mais bien réelles, en juin.

     

    Depuis, j'ai suivi toute l'actualité politique française, en un demi-siècle. Je me souviens des grandes manifs pour l’École privée, d'autres grands défilés, mais une chose est sûre : jamais aucun mouvement, ni en 1830, ni en 1848, ni en 1870-71, ni en 1936, ni à la Libération, n'a duré six mois !

     

    Le premier élément, déjà entré dans l'Histoire, de l'affaire des Gilets jaunes, c'est donc son exceptionnelle durée. Il y a des samedis violents, des samedis calmes, des samedis dans la fureur, des samedis dans la simple joie d'être ensemble, c'est selon. Mais tous les samedis, depuis un semestre, des Français descendent dans la rue, et cela c'est du jamais vu.

     

    Je n'ai, de ma vie, jamais participé à aucune manifestation. Cela n'est pas mon langage. Mais il se trouve que de gens manifestent, c'est ainsi. Il s'agit donc d'en décoder les motivations, d'en mesurer la pression réelle sur l'opinion et sur le pouvoir, d'analyser le terrain, avec le maximum de renseignements possibles. Ainsi considérée, la manifestation constitue, pour l'historien ou celui qui ambitionne un discours d'analyse politique, un matériau.

     

    Depuis six mois, émergent du discours des Gilets jaunes deux types, très clairs, et fort bien exprimés, de revendications : la justice sociale (et fiscale), et l'aspiration au RIC (référendum d'initiative citoyenne). Davantage de justice, et davantage de démocratie, c'est simple, audible par n'importe quel gamin, facile à retenir. Même les grèves du printemps 36, à l'époque de Léon Blum, étaient plus complexes, dans leurs catalogues de réformes exigées.

     

    Face à cela, le pouvoir avait le droit de dire oui, et celui de dire non. Mais il devait entrer en matière sur le sujet , et non enfumer toute la France avec sa carabistouille de "grand débat".

     

    Le grand débat, il a eu lieu depuis longtemps, en amont. Les sujets ont émergé, ils ont mûri, ils sont exprimés avec une parfaite clarté, il n'y avait strictement nulle nécessité de jeter sur la France le voile opaque d'un "débat" voulu par le Prince, autour du Prince, montrant le Prince en majesté, daignant se mêler à la plèbe, souvent pour lui faire la morale. Car le Prince est aussi Cardinal, il se sent à la fois le représentant de la Noblesse et du Clergé, allant parfois se mêler, si les caméras sont là, au Tiers État.

     

    Ce Prince est une catastrophe. Un orléaniste de la pire espèce, blanchi sous le harnais de la grande finance internationale, celle pour qui l'échelon des nations ne compte pas. Un européiste, qui veut imposer le libéralisme continental comme modèle unique dans les relations économiques et sociales. Un moraliste, qui prend ses compatriotes de haut, leur assène la leçon. C'est cet homme-là dont les Gilets jaunes veulent le départ. L'affaire est aussi simple que cela. Ils l'obtiendront avant terme (printemps 2022) ou non, je n'en sais rien. Mais l'enjeu est là : justice sociale, et invention d'une forme française de démocratie directe, qu'ils appellent le RIC.

     

    Tout cela est parfaitement clair, simple, limpide. Il n'y a nul besoin de "grand débat" pour en saisir les enjeux.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Macron : les algorithmes de l'utopie

     

    Sur le vif - Mardi 26.03.19 - 18.35h

     

    A l'occasion de la visite du Président chinois, Emmanuel Macron multiplie les signaux visant à donner l'illusion d'une existence de l'Union européenne, et d'une vitalité du multilatéralisme. C'est un double mensonge.

     

    L'Union européenne n'existe pas. Tout au plus, tente de survivre une structure flasque, blessée grièvement par son déficit démocratique et son expansion démesurée.

     

    C'est très bien de se dire que, face au géant chinois, on oppose la belle unité d'un continent, pour mettre en balance des plaques tectoniques à peu près comparables. C'est très bien, mais c'est un mensonge. On se ment à soi-même. On ment aux Européens.

     

    Le Président chinois est un homme intelligent et renseigné. Il sait parfaitement que l'Union européenne n'est qu'une fiction. Il est totalement au parfum de la renaissance, partout en Europe, de l'idée nationale, portée par des peuples qui veulent, chacun, recouvrer leur souveraineté, leur indépendance, leur fierté de partager une communauté d'appartenance.

     

    Il sait que la France est la France, l'Allemagne est l'Allemagne, il sait que les vrais paramètres historiques et géostratégiques sont là, et non dans l'illusion abstraite, géométrique, philosophique, d'un continent uni. L'Europe, en 2019, n'en est pas un !

     

    Macron se ment à lui-même. Il ment à la France. Il ment à l'Europe. Il tient pour réels des concepts volatiles, évanescents. A la résurgence de l'idée nationale, il ne veut rien comprendre. Ignorant de l'Histoire, il ne raisonne que dans la fragile algèbre de ses rêves. Il a tort, immensément : une politique doit partir des réalités. Elle doit s'ancrer dans une immense connaissance de l'Histoire. Elle doit puiser ses racines dans ce qui fait vibrer les peuples, et non imposer, d'en haut, des structures aléatoires, une sorte d'algorithme de l'utopie.

     

    La France, hélas, a un Président à rebours de son époque. Il n'est jeune que par l'âge. Dans les concepts, il suinte la défense désespérée de l'Ancien Monde.

     

    Pascal Décaillet