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  • L'Ukraine et les gentilles armes du "monde libre"

     
    Sur le vif - Mercredi 27.04.22 - 16.59h
     
     
    Truffer l'Ukraine d'armes occidentales. Américaines, allemandes. Légitimées par le Bien : c'est pour aider les Ukrainiens à se défendre qu'on leur envoie tous ces arsenaux.
     
    Truffer l'Ukraine de chars, de lance-missiles, gracieusement mis à disposition par le "monde libre", expression chère au gentil Kennedy, dans son discours de Berlin, en 63.
     
    Truffer l'Ukraine, ou plus exactement la partie occidentale de ce pays. Celle que l'on convoite depuis tant d'années.
     
    Truffer l'Ukraine d'armes de l'Otan. Elles pourront y rester, très longtemps. On pourra en ajouter, encore et encore, au fil du temps.
     
    Truffer l'Ukraine d'une véritable armée. Les missiles de l'Otan seront sur place, avec bénédiction des bonnes âmes de la planète. Les chars. Les armes d'infanterie. Il n'y aura plus, le jour venu, qu'à envoyer aux Ukrainiens des "conseillers militaires", par milliers, comme au Vietnam. Du temps de qui ? Je vous le donne en mille. Du temps du gentil Kennedy ! Le tout premier à avoir engagé son pays dans ce qui allait devenir le cauchemar de l'Asie du Sud-Est.
     
    Truffer l'Ukraine d'armes de l'Otan. Et si c'était cela, depuis des années, l'objectif recherché par les Etats-Unis ? Il ne leur manquait qu'un prétexte. M. Poutine, sur un plateau en or, le leur a offert, le 24 février 2022.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Macron et l'océan du convenable

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 27.04.22

     

    La victoire d’Emmanuel Macron, ce dimanche 24 avril, nous invite à nous interroger sur un phénomène, d’une présence écrasante dans le monde de la presse et des médias, que j’appellerais « l’océan du convenable ». De quoi s’agit-il ? De l’incroyable propension des commentateurs, éditorialistes, pies bavardes des chaînes privées françaises (à quelques belles exceptions près), à se ranger instinctivement, comme par atavisme, du côté du pouvoir. Comme si le journaliste était devenu un être tellement faible, tellement fragile (il l’est souvent économiquement, il faut le reconnaître), qu’il aurait besoin d’un protecteur. Un mécène, comme dans la musique, jusqu’à la fin du dix-huitième siècle. Alors, pourquoi prendre des risques ? On veut bien être un bel esprit, faire briller sa plume ou sa voix, décocher des chroniques comme des flèches de curare, mais l’insolence a ses limites.

     

    Entre Marine et Macron, ce beau petit monde choisira toujours le second. Par conviction ? Sans doute, la sincérité n’est pas ici en cause. Mais c’est justement là l’inquiétant : tous sont pour Macron, ou presque, alors que plus de deux Français sur cinq (13 millions, près de 42%) ont donné leur voix à Marine. Ça pose tout de même un léger problème de représentativité des journalistes, non ? De même, en Suisse, connaissez-vous beaucoup de médias (à part la Weltwoche) qui affichent ouvertement leur sympathie pour les idées de l’UDC, premier parti du pays, près d’un Suisse sur trois ? Ils est où, l’éditorialiste sur trois qui partagerait au grand jour les valeurs de cette famille politique ? A la vérité, il n’y en a pas un sur vingt !

     

    En Suisse aussi, nous avons notre océan du convenable : il faut être à gauche, ou alors dans la droite européiste et libre-échangiste, bref PLR ou Centre. Là, vous n’aurez jamais aucun problème. Nul ne vous cherchera noise. Nul ne vous collera d’étiquettes, du style (chaque fois qu’on présente un journaliste de la Weltwoche) : « proche de l’UDC ». En clair, votre « proximité » ne sera précisée que si elle relève du camp du Mal. Pour celui du Bien, nulle estampille ne sera nécessaire. Là, on vous considère comme normal. Rafraîchissant, non ?

     

    La réélection d’Emmanuel Macron est sans appel. L’homme est légitimé, pour cinq nouvelles années, à présider la France. Il faut bien sûr en prendre acte. Mais le risque est énorme, avec la servilité naturelle des médias français, et surtout des petits marquis surexcités des chaînes privées parisiennes, d’un phénomène « Dieu », avec tout ce qu’il a de ridicule, comme au début du second septennat de François Mitterrand. Que les partisans de Macron se prosternent devant lui, grand bien leur fasse. Mais enfin, les journalistes ! Ils peuvent bien être macroniens, aucun problème. Mais, à deux ou trois exceptions près, où sont les résistants ? Où sont ceux qui oseront dire, cartes sur table : « Ces deux Français sur cinq qui soutiennent Marine, ces 42%, ces treize millions, j’en fais partie ».

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Des chars allemands en Ukraine : la puissance mnésique d'un symbole

     
    Sur le vif - Mercredi 27.04.22
     
     
    Il faut prendre la mesure de ce que représente, dans l’Histoire allemande de l’après-guerre, la livraison de chars allemands - je dis bien « de chars » - à l’Ukraine.
     
    L’Histoire des chars fait partie de l’Histoire allemande. La percée géniale des Ardennes en mai 40, ce sont les chars. Le passage de la Meuse par Rommel le 13 mai, ce sont les chars. La guerre à l’Est, dès le 22 juin 1941, ce sont les chars. Et l’un des principaux théâtres d’opérations dans cette guerre, voyage aller en 41, voyage retour en 44, c’est l’Ukraine. Le plus important choc de la Guerre à l’Est, ce ne fut pas Stalingrad, mais, six mois plus tard, la bataille de chars de Koursk, en juillet 43. Après Koursk, la Wehrmacht n’a fait que refluer.
     
    En 41, lorsque les chars allemands arrivent en Ukraine, ils sont accueillis, en maints endroits de l’Ouest du pays, comme des libérateurs. Cet élément factuel, parfaitement vérifiable, du reste largement connu, est une réalité de la guerre à l’Est. J’ai personnellement été initié à cette guerre il y a exactement cinquante ans, par un ancien combattant, chez qui j’ai passé l’été, tout au nord de l’Allemagne.
     
    Il y a donc, dans le char allemand livré à l’Ukraine, une puissante dimension symbolique. Mnésique. Pour qui connaît l’Histoire, il y a quelque chose qui parle, qui évoque. Renaissance, depuis 1989, d’une politique proprement allemande en Europe centrale et orientale. Réarmement totalement décomplexé. Budget militaire sans précédent voté par le Bundestag dès les premiers jours de la guerre en Ukraine.
     
    L’Allemagne est là, elle est de retour, elle mène sa politique à elle à l’Est, pour sauvegarder les marchés infatigablement conquis depuis la chute du Mur : Pologne, Hongrie, Pays Baltes, et bien sûr demain l’Ukraine. Là sont tous les enjeux de ce qui se passe, au-delà de Poutine, au-delà du Donbass, au-delà de Biden. Et surtout, au-delà de l’insoutenable naïveté de nos moralistes.
     
     
    Pascal Décaillet