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  • Coquille vide

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    Commentaire publié dans GHI - 22.03.17

     

    Un homme charmant, bien coiffé, bien habillé, gendre idéal. Un regard bleu, allumé, en phase avec l’excitation de vivre. Emmanuel Macron, chouchou des sondages, candidat des milieux bancaires, européens, candidat de l’euro, candidat de l’Allemagne, candidat de la Côte Est américaine, candidat de la mode, des médias, des chaînes TV, de la gauche urbaine branchée, a eu l’occasion, lundi 20 mars, de transpercer l’armure du paraître : lors du grand débat de TF1, il a parlé.

     

    Je m’en suis réjoui. Pour la première fois, il nous était donné d’accéder, chez ce produit de luxe de la course à la présidence, non à des apparitions de phénix, mais à un discours articulé. Vous savez, des phrases. Avec des sujets, des verbes, des compléments. Et, pourquoi pas, soyons fous, un contenu. Du sens.

     

    Las ! L’homme parle. Il est sympathique, c’est sûr. Le regard bleu attire. Il parle, mais ne dit rien. Les mots s’échappent, s’envolent, la parole est ailée, elle glisse, virevolte, chatouille l’entendement, mais personne ne saisit ce que le locuteur a bien voulu nous signifier. Je crois qu’on appelle cela, en linguistique, un discours sans référent.

     

    C’est un peu ennuyeux. Non pour le plaisir de l’oreille, encore moins celui des yeux, car l’homme est affable et fort agréable. Mais par rapport à la fonction briguée. Car enfin, il ne s’agit pas d’élire un bateleur aux Arts ménagers. Mais le Président de la République française. Un successeur à des hommes comme Charles de Gaulle ou François Mitterrand. Oui, c’est un peu ennuyeux. Malgré le regard bleu.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Jacques Nicolet et l'armada des censeurs

     

    Sur le vif - Mercredi 22.03.17 - 17.07h

     

    Proprement hallucinante, la police de la pensée qui vient de sévir dans le canton de Vaud, autour du candidat UDC au Conseil d’État, Jacques Nicolet.

     

    Lundi soir, M. Nicolet vient dans Forum, affronter la socialiste Cesla Amarelle, dans le cadre de la campagne. A l'issue du débat, le candidat (qui n'était pas venu pour cela) se voit poser une question sur la présidentielle française. Il lâche, en guise de pronostic, l'idée que Mme Le Pen pourrait être élue. C'est tout.

     

    A partir de là, tollé. Brouhaha. Levée de boucliers. L'armée des belles consciences vaudoises, toute de rectitude vêtue, somme le candidat de se rétracter. Ses alliés PLR s'étranglent. On se croirait au dernier acte, chez Shakespeare, quand tout le monde trépasse.

     

    Je ne connais pas M. Nicolet personnellement. Mais je lui dis ici, très clairement, que non seulement il avait le droit de pronostiquer Mme Le Pen gagnante, mais qu'il aurait aussi, tout autant, celui de SOUHAITER cette victoire. Ce qu'il n'a, répétons-le, pas fait.

     

    Car enfin, nous avons affaire à un candidat UDC. L'idée qu'il puisse, peut-être, par aventure, se sentir des affinités avec cette candidate-là, n'apparaît pas comme extraordinairement saugrenue.

     

    Et puis, disons-le, une fois pour toutes : M. Nicolet a le droit d'être pour Mme Le Pen. Nous avons tous ce droit, si telle est notre sensibilité. Un Français sur trois, peut-être, exprimera bientôt cette préférence politique. Faut-il l'ostraciser ?

     

    Il n'y a donc pas d'affaire Nicolet. Il n'y en a jamais eu. Mais il y a un sacré problème avec cette bande de censeurs qui, partout dans l'espace public, entend régenter ce que nous aurions à dire comme citoyennes ou citoyens, sur notre pays, ou sur un grand voisin qui nous est cher.

     

    En clair, si vous n'êtes pas pour Mme Le Pen, dites-le. Si vous êtes pour elle, dites-le aussi. C'est votre droit le plus total. Nul n'a à censurer votre droit à la libre expression de votre opinion politique.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Médias et politique : l'état de guerre est naturel

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    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 22.03.17

     

    D’aucuns s’offusquent que M. Trump s’en prenne directement à des journalistes, moi pas. J’exerce pourtant cette profession depuis plus de trente ans, je la défends de toutes mes forces. Mais je ne m’étonne pas que certains politiques, lorsqu’ils se sentent violemment attaqués, ripostent directement aux médias. Pourquoi ne le feraient-ils pas ? Pourquoi celui qui a porté l’estocade ne devrait-il pas s’attendre à une contre-attaque ? Au nom de quelle immunité ? Pourquoi une corporation, la mienne, aurait-elle le droit de mener l’offensive, et la personne lésée n’aurait-elle pas celui de se défendre ? Surtout, pourquoi cette tension devrait-elle nous étonner ? Depuis que la presse existe, celle d’opinion surtout, dont je me réclame ici, l’état naturel des relations entre éditorialistes de pointe et politiques, ça n’est pas la paix. Mais la guerre.

     

    Lorsqu’une chaîne de télévision américaine a passé des mois, sans discontinuer, à attaquer M. Trump, sous tous les angles possibles, et que cette chaîne a le culot d’envoyer un journaliste à la conférence de presse de la Maison Blanche, elle ne va tout de même pas pleurnicher si le Président n’a pas immédiatement envie de parler à son représentant. Ils ont vomi sur le candidat, avec une violence inimaginable, il réplique, c’est la vie. Et pour ma part, ça me convient très bien. La guerre frontale a quelque chose d’infiniment plus sain, plus vrai, que les ronds-de-jambes de cocktails, les tutoiements sous les lambris, le chuchotement de fausses confidences, la gluance du copinage. Homme politique, c’est un boulot, parfaitement respectable. Editorialiste, ou commentateur, c’en est un autre, qui nécessite l’usage de la lucidité, de la critique, et amène tout naturellement à se faire des ennemis.

     

    Un journaliste politique qui n’aurait pas d’ennemi, passerait son temps à frayer avec les politiques comme larrons en foire, serait méchamment de nature à m’inquiéter. Son exigence de lucidité, de vision critique, le courage de dire sa vérité, les a-t-il assumés, ou laissés au vestiaire de la réception mondaine ? Soyons francs : si on prend position, de façon claire et tranchée, dans un commentaire ou un édito, ce que j’appelle puissamment de mes vœux, alors on devient, comme les autres, un belligérant. On en a parfaitement le droit, c’est même indispensable dans une société de libre expression, mais il faut en assumer les conséquences. Je ne vous raconte pas à quelle vitesse le même politique, qui disait encore adorer votre « liberté de ton » la veille, deviendra le premier à chercher, par tous les moyens, à avoir votre peau, si vous l’avez écorné. C’est ainsi, c’est la vie.

     

    Je suis un passionné de l’Histoire de la presse. Pour ma Série radiophonique de l’été 1994 sur l’Affaire Dreyfus, j’ai lu des milliers de journaux de l’époque, de tous bords. Ils étaient, les uns envers les autres, d’une violence inimaginable aujourd’hui. L’état naturel, entre presse et pouvoir, et même entre journalistes, c’était la guerre. C’était au moins clair. Plus que tout, j’aime la clarté.

     

    Pascal Décaillet