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  • Armée : la bombe Maudet

     

    Sur le vif - Lundi 17.01.11 - 16.25h

     

    On savait depuis des années le capitaine Pierre Maudet, accessoirement membre de l’exécutif de la Ville de Genève, farouchement opposé à l’indécise mélasse dans laquelle patauge la vision d’Ueli Maurer, il faudrait dire « la cécité », en matière de politique de sécurité. Eh bien à l’instant, à Berne, Pierre Maudet vient de présenter SON rapport. Et, comme Maudet est aussi modeste que compétent, il l’intitule, tout simplement, « Le vrai rapport ».

     

    Il nous a fait la confiance de nous livrer le document ce week-end, sous embargo jusqu’à aujourd’hui 16h. Franchement dit, pour avoir appartenu, pendant toute l’année 1990, à la « Commission Schoch », qui devait réformer l’armée suite à la votation fédérale du 26 novembre 1989 (plus d’un tiers des Suisses pour sa suppression pure et simple), je dois reconnaître au « rapport Maudet » les vertus d’une immense clarté et d’une vraie vision.

     

    C’est le rapport de la rupture. Rupture avec l’obligation de servir (page 19). Rupture avec des effectifs encore aujourd’hui surabondants (page 19, toujours, préconisation d’une armée de 20.000 hommes, soit quatre fois moins qu’aujourd’hui). C’est, aussi, le rapport de la mise en réseau de l’ensemble des forces s’occupant de sécurité en Suisse. Maudet propose la création d’un Département fédéral de la Sécurité et la mise sur pied (attention fédéralisme !) d’une réserve fédérale de police.

     

    Malicieux, Maudet propose des exergues, où il place un extrait du dernier rapport sur l’armée, soumis à l’Assemblée fédérale le 1er octobre 2010, et, à chaque fois, propose en face ce qu’il aurait fallu dire. Inutile de dire qu’à tous les coups, la version Maudet y gagne en clarté, en concision, en vision. L’homme sait se vendre, à l’instar du jeune Bonaparte, avec ces célèbres « Bulletins de la Grande Armée », dès la campagne d’Italie.

     

    En résumé, un excellent rapport. Qui ne pourra qu’alimenter le débat public. Et qui tranche avec le stratus d’automne qui préside, 365  jours par an, à la vision d’Ueli Maurer.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La Suisse se polarise – Et alors ?

     

    Sur le vif - Lundi 17.01.11 - 12.27h

     

    Le mot qui leur fait peur à tous : polarisation. Il faudrait craindre, « pour la richesse de notre débat démocratique », avancent-ils hypocritement, que la Suisse, dans les quinze ou vingt ans qui viennent, devienne un pays comme un autre, l’Allemagne avec son SPD et sa CDU-CSU, la Grande-Bretagne avec ses travaillistes et ses conservateurs, les Etats-Unis avec les démocrates et les républicains. Cette évolution, pleurnichent-ils, serait « totalement contraire à l’esprit suisse ». Elle serait dangereuse, tueuse de notre démocratie.

     

    Contraire à quel esprit ? Dangereuse pour qui ? Liberticide, en quoi ? Ces trois questions, induites par leurs propres menaces, ils n’y répondent jamais. C’est dommage.

     

    La Suisse est-elle, bel et bien, en voie de polarisation ? Franchement, je n’en sais rien, c’est en effet une hypothèse, mais parmi d’autres, nul d’entre nous ne peut prévoir les mouvements de fond de notre politique fédérale, nul ne peut vraiment influer sur ces variations tectoniques, qui sont celles du temps long. L’Histoire, un jour, les constatera.

     

    Notre propos, ici, c’est la polarisation diabolisée. Et à l’inverse, la gentille concordance sanctifiée. De ce qui ne date que de 1959, on voudrait faire un mythe suisse surgi du fond des âges. C’est méconnaître la réalité de notre Histoire, aussi conflictuelle que celle des pays qui nous entourent : Réforme, Guerres de Religion, République helvétique, mouvements républicains, Sonderbund, Kulturkampf, grève générale en novembre 1918, etc. La Suisse n’est pas l’Histoire d’un peuple heureux, juste un peuple comme un autre, au milieu de l’Europe.

     

    La lutte des classes, les souffrances du monde ouvrier, la misère de la paysannerie de montagne, l’exode rural, le rapport à l’immigration, la lente conquête d’un système de protection sociale, tout cela fut aussi difficile que chez nos voisins, avec les mêmes combats, les mêmes aspérités. La Suisse est un pays comme un autre. Tout au plus avons-nous eu la chance d’échapper aux deux conflits mondiaux du vingtième siècle. Il serait assez singulier de s’en plaindre. Nous eûmes celle, aussi, non négligeable, de ne pas avoir à solder des colonies.

     

    Ce qu’on appelle « concordance » n’a rien d’ontologique, rien de consubstantiel à une quelconque « nature profonde des Suisses ». C’est le résultat d’enchaînements historiques : dès 1891, le premier catholique-conservateur entre au Conseil fédéral, mettant fin à la suprématie radicale ; dès 1943, le premier socialiste ; dès 1959, deux socialistes. N’allez surtout pas croire que les radicaux de 1891 se félicitaient de l’arrivée de Josef Zemp, ni les bourgeois de 1943 de celle d’Ernest Nobs. Ce sont les dents serrés qu’ils ont bien dû accepter ces nouveaux venus.

     

    A chaque fois, ce sont les rapports de force, comme toujours en politique, qui furent déterminants. A chaque fois, c’est à la force du poignet, et contre le gré de l’establishment, que l’opposition se taille une place dans le collège gouvernemental. Donc, cette « concordance », tant sanctifiée, n’est en réalité qu’une coexistence par défaut. Comme des gens forcés d’accepter des colocataires dans leur appartement. Ca n’est sans doute pas un mauvais système, en tout cas il permit de gérer fort correctement le pays pendant les paisibles et opulentes Glorieuses d’après-guerre. Mais c’est une résultante mécanique, rien d’autre. Cette mécanique, oui, si chère à Thucydide, Marx ou Tocqueville.

     

    Il n’est donc pas si certain que l’actuelle tambouille politique permettant à des partis totalement antagonistes de coexister dans un même collège, relève si puissamment du vœu du peuple suisse. On pourrait même gager qu’elle doit beaucoup à une confiscation du pouvoir par les corps intermédiaires. Ceux-là même qui hurlent au loup, au nom quasiment du visage sacré du pays, quand on évoque l’hypothèse, un jour, peut-être, d’ici quelques années, de l’émergence de deux grands blocs, la fameuse « polarisation ».

     

    Ils craignent quoi, en vérité ? La perte de leur pouvoir, pardi ! Cela, et strictement rien d’autre, tout le reste n’étant que paravent. Oui, le savant tissage de ces empires du Centre, ceux qui se retrouvent toujours là, quelles que soient les majorités, riches de leur seule tiédeur, n’ayant d’extrême que le flair animal de leur opportunisme. Ceux-là, oui, ont à craindre de la polarisation. Mais ça n’est pas le bien contre le mal, comme ils tentent de le faire croire. C’est juste un pouvoir contre un autre.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Il direttore illuminato della SSR

     

    Edito publié en première page du Giornale del Popolo - Lundi 17.01.11 - Un grand merci à mon ami et confrère Claudio Mesoniat, rédacteur en chef, pour la traduction - La version allemande sera publiée sous peu.


    Un bel giorno, sulle colonne di alcuni quotidiani svizzeri (era il 4 gennaio scorso), Roger de Weck si è messo a parlare di Lumi, con la L maiuscola, insomma quelli di Diderot e Voltaire, ripetendo a tal punto questa parola incantatoria che al posto dei Lumi è un saltellare di capretti che si è parato ai nostri occhi. I capretti del generale de Gaulle, quando parlava dell’Europa. Caso divertente, il nuovo patron della SSR si trova ad essere un partigiano accanito dell’entrata della Svizzera nell’Unione europea: l’Europa, i Lumi, cui va ad aggiungersi una devozione liturgica alle parole “servizio pubblico”, cullate nel discorso come virtù evangeliche, arca santa, inattaccabile. Dotata di tutti i poteri: voi mormorate “servizio pubblico” ed ecco la lebbra toccata, il male ripudiato. È davvero molto forte Roger de Weck. Un mago.

    Paginate intere di giornale per disegnare, col compasso e la squadra, una visione teorica, metallica, disincarnata del mondo dei media in Svizzera. Manichea, anche, tanto trasuda, sotto la penna dell’ammiratore dei Lumi, l’odio per tutto ciò che verrebbe dal privato, la demonizzazione della pubblicità, il sentimento di arroganza e di superiorità del Mammut debitamente ingrassato dal canone, di fronte alla fragile costellazione dei piccoli, meno viziati, che devono battersi infinitamente di più per sopravvivere. Da parte di un uomo che ha diretto giornali prestigiosi come “Die Zeit” o il “Tages Anzieger”, dei quali mi sfugge che fossero alimentati da fondi pubblici, si tratta di una giravolta di cui si apprezzerà l’opportuna “souplesse” (ogni via di Damasco, d’altronde ha il suo episodio di “Luce”).

    I Lumi, citati cinque volte nella sola prima colonna, ci abbagliano in tutte le salse: sarebbero all’origine non solo del dibattito democratico, ma anche della satira! La quale, com’è noto, non esisteva né nell’Antichità né nel Medioevo, e neppure all’epoca di Molière, che commise l’imprudenza di nascere un secolo in anticipo. Proporre, nello stesso testo, l’apologia della satira e quella della «forza tranquilla dei buoni argomenti», ci promette dibattiti appassionanti -sotto il regno illuminato di monsieur de Weck- sulla definizione del “buon argomento”, tra buon gusto e tracotanza, là dove sta la linea gialla nella geometria del pensare corretto. Demolendo, qualche giorno fa, ai microfoni della radio romanda, Sarkozi e Berlusconi, stimando una fortuna che l’Ungheria sia nell’Unione europea, il nuovo capo della SSR ha d’altra parte inventato un nuovo concetto, rinfrescante, del ruolo del primo funzionario di una radiotelevisione di Stato: quello di una neutralità per lo meno... impegnata.

    Senza ironia, il testo di Roger de Weck mi inquieta soprattutto su un punto: che, sotto la copertura dei buoni sentimenti, seminati sul cammino come altrettante virtù teologali, con veste di oggettività, il servizio detto “pubblico”, in Svizzera, sia sornionamente fatto ostaggio di un’ideologia piuttosto che di un’altra. È noto il profilo politico del nuovo patron della SSR, la sua devozione all’Unione europea, il suo disprezzo per il partito più votato dagli svizzeri alle ultime elezioni federali, tutte cose che rientrano nel suo diritto più assoluto in quanto cittadino, ma che sarebbe meglio non facessero capolino nell’esercizio delle sue funzioni. Lo stesso vale per la lotta contro la «polarizzazione» nei dibattiti: ma insomma, signor de Weck, se la Svizzera fosse chiamata nei prossimi vent’anni a polarizzarsi, e magari il centro-destra a sfumarsi dolcemente, in nome di cosa la SSR dovrebbe assumersi, unilateralmente, la missione di contrastare questa realtà politica? Esempio: la zuppa in cui si sta trasformando “Arena”, a Zurigo, in realtà per diminuire il potere d’influenza di un partito giudicato (da chi, e con quale diritto?) più degno della notte che dei Lumi.

    Per il resto, la Sacra Scrittura di monsieur de Weck riprende lo strano dogma della SSR sola capace, in Svizzera, di proporre dei servizi di qualità. Suppongo che l’uomo di cultura che è de Weck legga tutti i giorni giornali come “Le Temps” o la “NZZ”, cosa che a buon conto io faccio, e questi giornali, finanziati dal solo settore privato mi insegnano, sulla politica, l’economia, la cultura, in Svizzera, almeno tanto quanto molte trasmissioni della SSR. Quanto ai canali radio e tv privati, che manifestamente de Weck non conosce, invito tutti, quando volessero, a confrontare i loro costi orari (per esempio quelli dei programmi di informazione e dei dibattiti) con quelli del Mammut.

    Leggendo il nuovo capo della SSR si resta confusi dalla quantità d’energia spesa in fondo con l’unico intento (come certe costruzioni di Tinguely) di salvare la ragion d’essere della macchina stessa. Non ciò che produce, ma lo strumento come tale. Di fronte a questo manifesto di sopravvivenza, cosa devono fare i media privati, radio, tv, e (ben presto!) siti internet? Risposta: battersi. Mostrare che possono fare altrettanto bene con infinitamente meno. Essere i migliori nell’informazione di prossimità, nei dibattiti locali, ma anche nella promozione della cultura, della vita sportiva, associativa. E soprattutto, continuare a lavorare nella gioia e nell’entusiasmo, a qualche migliaio di leghe dagli apparati e dalla loro pesantezza. La sola prova in questo mestiere, in fondo, è la prova dei fatti. Ai grandi disegni teorici, quelli del compasso e della squadra, non è vano opporre l’infaticabile fatica delle formiche. Lontano dai Lumi. Ma nell’illuminante oscurità del loro artigianato. Sempre da ricominciare.

    Pascal Décaillet