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  • Aide à la presse : en quel honneur ?

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 25.01.23

     

    C’est incroyable, le nombre de puissants intellectuels qui se torturent les méninges, dans d’improbables Facultés de sciences sociales, souvent alémaniques d’ailleurs, pour nous proposer, tous les trois ou quatre mois, un nouveau modèle, révolutionnaire selon eux, « d’aide à la presse » ! Qui sont-ils, ces lumineux chercheurs ? Qui les a mandatés pour nous pondre d’onéreux rapports, ennuyeux comme la face obscure de la lune, sur le meilleur moyen de « sauver le journalisme en Suisse » ? Pourquoi font-ils cela ? Que connaissent-ils du métier ? L’ont-ils, au moins quelques années, pratiqué de l’intérieur ? De quel droit, de quelle autorité intellectuelle, ou professionnelle, viennent-ils statuer sur le « journalisme de qualité » ? Qui les a légitimés pour émettre des jugements sur un monde qu’ils ne connaissent pas ?

     

    Surtout, la question essentielle : au nom de quoi faudrait-il à tout prix « sauver la presse » ? Si tel journal payant, au numéro ou à l’abonnement, n’a plus les moyens de survivre, parce que les annonces l’auraient déserté par exemple, ou surtout parce que plus personne ne voudrait le lire, en quel honneur faudrait-il que l’argent public soit affecté à la rescousse ? L’argent des contribuables ! Comme si nous tous, qui payons des impôts, n’étions pas déjà suffisamment tondus comme cela. Il faudrait que le fruit de notre travail, à nous, qui constitue hélas l’essentiel des ressources fiscales, soit attribué à des opérations de repêchage d’entreprises privées ayant échoué. Mais alors, pourquoi la presse, et pas la cordonnerie, la blanchisserie, le lavage de voitures, l’épicerie fine ? Dans quel monde vit-on, pour oser proposer cela ?

     

    L’argument de nos chers théoriciens : « Il faut sauver la presse, parce qu’elle est indispensable à la démocratie ». Je le conteste, frontalement. Ce qui est vital, c’est la liberté de circulation de toutes les opinions, je dis toutes. Cette liberté, ce courage, cette vivacité, vous les trouvez particulièrement dans les médias, vous ? Je dis qu’on y trouve plutôt la conformité. Pour la différence, celle qui heurte, celle qui dérange, celle qui ose mettre en cause le pouvoir, il faudra plutôt vous rendre sur les réseaux sociaux, haïs par les universitaires, mais de plus en plus appréciés par le public. Bien sûr, certains vont trop loin, voient des complots partout, exagèrent la posture d’opposition. Mais combien de plumes insoupçonnées, de regards rafraîchissants, de courages solitaires, que vous lirez rarement dans la grande presse officielle, adoubée par les puissants !

     

    S’il faut sauver quelque chose dans l’ordre de l’expression, ce ne sont pas des entreprises qui périclitent. Ni même le métier de journaliste, qui n’est pas éternel. Non, il faut sauver la démocratie, qui nous est  si chère. Pour cela, chacun doit pouvoir s’exprimer. Rien ne doit être tabou. Seule la loi doit être respectée. La loi, oui. Mais pas l’opinion dominante. Ni les dogmes des puissants. Il ne faut pas sauver la presse. Mais la liberté indivisible de chacune de nos âmes.

     

    Pascal Décaillet

  • Richard Wagner, 1971 : l'éveil au monde sensible

     
    Sur le vif - Mardi 24.01.23 - 16.17h
     
     
    Mon premier contact avec la musique de Richard Wagner, à l'âge de treize ans (je venais de finir ma deuxième année secondaire, été 1971), a été pour moi un choc électrique. La foudre. Pas celle qui vous anéantit : non, celle qui vous éveille à la vie. Elle vous traverse, elle vous tétanise, elle vous illumine, elle vous fait poindre la possibilité d'une aventure, dans votre existence.
     
    Je connaissais déjà très bien l'Allemagne, la musique de Beethoven, mais pas celle de Wagner. A peine en avais-je entendu parler. Le choc de la première écoute fut invité par moi, pendant toute l'adolescence, à se reproduire, sur le même morceau exactement, dix-mille, quinze-mille fois, que sais-je, jusqu'à l'extinction du microsillon, sur mon 33 tours. Il fallait, tout en m'évertuant à découvrir les autres oeuvres du compositeur, que je revive l'expérience première, comme au premier jour, sans rien changer.
     
    J'étais tombé amoureux, non seulement d'une musique incomparable, mais du moment même de l'écoute première, celui de l'initiation. J'ai passionnément, dans ma vie, aimé quantité d'autres musiques, d'autres compositeurs, et aujourd'hui plus que jamais. Mais ce morceau-là, de Richard Wagner, c'est une partie de moi-même, à la fois laissée (comme l'enfance, qui s'en allait ?), et néanmoins surgie à la vie.
     
    Quelle vie ? La seule qui vaille : celle du monde sensible.
     
     
    Pascal Décaillet

  • Résistez, M. Scholz !

     
    Sur le vif - Mardi 24.01.23 - 07.36h
     
     
    Résistez, M. Scholz ! La politique allemande se décide à Berlin, pas à Washington.
     
    Vous êtes le Chancelier du plus fort pays d’Europe, quatrième puissance économique du monde, d’une dynamique intellectuelle et culturelle exceptionnelle. Vous avez votre Histoire, votre équation millénaire avec l’Est, cette Ostpolitik qui fut le fleuron du grand Willy Brandt (1969-1974), SPD comme vous.
     
    Vous n’êtes en aucun cas le 51ème État américain. Et en Europe, personne, je dis bien personne, n’a à vous faire la leçon. Ni à vous dicter l’usage de vos chars, parmi les meilleurs du monde. Ni à vous forcer de rejouer une partition qui a suffisamment remué votre mémoire nationale.
     
    La Russie a toujours été et sera toujours pour l’Allemagne un partenaire de premier plan. Elle le demeurera, le jour où l’impérialisme américain se sera choisi d’autres théâtres d’opérations que celui de l’Europe.
     
    Résistez, M. Scholz ! Ne faites pas à l’Est la guerre des Américains. Défendez les intérêts supérieurs du peuple allemand, qui n’a strictement aucune leçon à recevoir des valets de l’atlantisme.
     
     
    Pascal Décaillet