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Liberté

  • Lisez Marx

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 29.10.25

     

    Ce qui frappe le plus, face aux tournicotés du Nasdaq et de l’ultra-libéralisme, c’est leur carence de discours, et donc de références solides, en matière de culture. Non qu’ils soient incultes. Mais le champ du savoir, l’univers du monde sensible, le rôle de la langue et du langage dans les sociétés humaines, ne paraissent pas prioritaires chez eux, et je suis poli.

     

    Prenez la DDR, le nom porté, entre 1949 et 1989 par la Prusse historique, la Saxe historique et la Thuringe. C’était un régime communiste, imposé par l’occupant soviétique. Il y avait une police politique, avec tous ses méfaits, il n’est pas question de le nier.

     

    Mais la DDR, dont je suis depuis ma jeunesse (du temps même de son existence, donc) un grand défenseur, c’était aussi la culture. Brecht, Heiner Müller, Christa Wolf, ces noms immenses, et tant d’autres avec eux, ont porté très haut, dans ce pays à régime autoritaire, une ambition culturelle. Dans l’Histoire de la langue allemande, si fondamentale (on l’a vu avec Fichte, puis les Frères Grimm) dans l’Histoire allemande tout court, ces grands noms ont ouvert des horizons.

     

    Et les autres ? Ceux qui ne cessent, depuis la chute du Mur, par obédience atlantiste, de nous annoncer « la victoire définitive du capitalisme », que nous ont-ils apporté, culturellement ? La réponse tient en un mot : la misère. Alors, par pitié, que vous soyez de droite ou de gauche, lisez Marx, Ca nous éclaire. Et ça nous éveille.

     

    Pascal Décaillet

  • Un être humain en vaut un autre

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 29.10.25

     

    Les gens ne comprennent pas qu’on puisse être de droite et anti-libéral. De droite, et pour l’Etat. Musclé, régalien, surtout pas tentaculaire, mais l’Etat, quand même. De droite, et souverainiste. De droite, et opposé au dogme de libre-échange. De droite, et dire non aux Bilatérales, parce que la souveraineté de notre pays s’en trouverait entravée. De droite, et anti-atlantiste. De droite, et contre l’impérialisme américain, tel qu’il s’impose au monde depuis 1945. De droite, et contre le colonialisme, sous tous ses visages. De droite, et pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. De droite, et ouvert au monde arabe, passionné par l’Orient compliqué, ses langues, ses récits. De droite, et tourné vers l’univers persan, tel qu’il se déploie sur des milliers d’années d’Histoire. De droite, et ami du peuple palestinien, tout en l’étant de celui d’Israël. De droite, et pour un Etat de Palestine, avec toute la dignité qu’implique cet échelon. De droite, et farouchement opposé à l’extension de l’OTAN sur les marches les plus orientales de l’Europe, continue depuis 1989, jusqu’aux frontières directes de la Russie.

     

    Les gens peinent à comprendre cela. En voici la cause. La droite, depuis la chute du Mur de Berlin (9 novembre 1989), est assimilée en Europe au libéralisme. Le dogme, vendu par le monde anglo-saxon : confondre la droite avec le dogme du libre-échange, le rejet des frontières et des nations, la construction de géants multilatéraux en forme de coquilles vides, l’ignorance de l’Histoire. En gros, la droite, ce serait le Nasdaq, la Bourse de New-York, la spéculation mondialisée, les multinationales, les délocalisations, l’abandon de notre puissance agricole et industrielle, au profit d’une grande illusion planétaire, virtuelle : un Veau d’or de l’imagination humaine. Bref, la droite, ce serait 36 années de crétinisme ultra-libéral triomphant.

     

    Je suis un homme de droite, mais je rejette le crétinisme. L’univers des droites, né, comme celui des gauches, de la géographie de la Convention, sous la Révolution française, s’inspire, depuis plus de deux siècles, d’autres sources, d’autres penseurs, d’autres aspirations que celles des décérébrés du néo-libéralisme des années 1990. Des exemples ? La communauté d’appartenance à une nation. La culture. La langue, sous toutes ses formes dialectales, toutes ses expressions, à commencer par celle de la poésie. La musique. La mémoire. La connaissance de l’Histoire. Le culte des morts. L’hommage aux sacrifiés, à ceux qui sont tombés au combat. On peut être pétri de ces valeurs, hélas beaucoup trop discrètes dans les droites européennes depuis 1945, et se sentir en même temps, dans l’esprit de Léon XIII, auteur de l’Encyclique Rerum Novarum (1891), l’âme profondément sociale, ennemie des injustices, respectueuse des fonctions les plus modestes. Une droite estimant qu’un être humain en vaut un autre. Riche ou pauvre, sachant lire ou non, Israélien ou Palestinien. La chose, ancrée dans les convictions les plus profondes de mon enfance, immuable tout au long de ma vie, est aussi simple que ces sept mots : un être humain en vaut un autre.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Israël-Palestine : un conflit territorial. Avec un colon et un colonisé

     
     
    Sur le vif - Dimanche 26.10.25 - 14.49h
     
     
     
    Depuis des années, je pose cette question : pourquoi diable la défense de la Palestine, dans nos pays d'Europe, est-elle l'apanage de la gauche ?
     
    Je ne reproche rien à la gauche. Elle a parfaitement raison de défendre la Palestine. Tout au plus, n'ayant jamais manifesté de ma vie, parce que ce mode d'expression n'est pas le mien, je peux regretter le côté fourre-tout de certaines liturgies de rue de gauche, où la cause palestinienne se trouve mêlée à un foisonnement d'autres revendications, d'ordre sociétal par exemple. Lecteur d'Aristote, je plaide pour l'unité de matière. Mais enfin, cette réserve posée, je remercie la gauche de nous rendre sensibles aux souffrances du peuple palestinien. Là où la droite se tait.
     
    L'unité de matière. Dans mon soutien, depuis l'adolescence, à la cause palestinienne, elle consiste à m'en tenir à l'aspect politique, depuis 1948 en tout cas, du conflit Israël-Palestine. Je refuse absolument, depuis toujours, de le ramener à une guerre confessionnelle : le judaïsme en tant que tel, l'Islam en tant que tel, ne sont en aucun cas les leviers principaux du conflit. Il y a déjà suffisamment de Guerres de Religion au Proche-Orient pour qu'on s'abstienne d'y ranger le CONFLIT TERRITORIAL Israël-Palestine.
     
    Non. Ma lecture, née d'autres chemins anticoloniaux que j'ai pu emprunter (sur l'Algérie de 1830 à 1962, par exemple), est volontairement ciblée sur un assez classique (au fond) conflit colonial, ou post-colonial. Avec, de plus en plus clairement depuis juin 1967, un colon et un colonisé.
     
    Ma lecture heurte une vision : celle d'un conflit, depuis 77 ans, qui devrait absolument, en vertu de la dimension mystique en effet phénoménale (je suis le premier à en être fasciné, depuis l'enfance) de tous les courants qui soufflent depuis des milliers d'années dans l'Orient compliqué, être lu comme unique au monde, incomparable avec les autres, ombilical, parce qu'il provient de l'une de nos matrices.
     
    Cette dimension profondément spirituelle du Proche-Orient, comme d'ailleurs de l’Égypte, complexe, nouée de mille sectes, où la richesse et la subtilité du soufisme côtoient d'antiques mosastères coptes, ne me laisse de loin pas indifférent, c'est le moins qu'on puisse dire. Point n'est besoin d'avoir lu Chateaubriand, le prodigieux "Itinéraire de Paris à Jérusalem", ni la lumineuse biographie de Champollion par Lacouture, ni celles de l'Emir Abdel Kader, pour engager toute son âme dans un tropisme incurable vers ce monde-là.
     
    Mais désolé, le conflit parfaitement circonscrit, depuis 1948 (oh, on peut toujours remonter à Theodor Herzl, Lord Balfour, ou au Mandat britannique) est à lire dans sa dimension purement politique, prosaïquement territoriale (Arafat n'a jamais déclaré autre chose), avec toute sa dimension économique, le partage de l'eau, denrée rare, et celui des richesses. C'est une affaire entre possédants et dépossédés. Entre dominants et dominés.
     
    Bref, dans le conflit Israël-Palestine, les outils de lecture que proposait Karl Marx au 19ème siècle peuvent nous être, une fois de plus, diablement utiles : chercher les VRAIES RAISONS des conflits. Dans les rapports, évidemment, de pouvoirs économiques. Thucydide, il y a 25 siècles, dans sa Guerre du Péloponnèse, nous invitait déjà à cette ascèse, pour décoder les ressorts réels du conflit entre l'impérialisme de Sparte et celui d'Athènes.
     
    Toujours, à propos du conflit Israël-Palestine, j'inviterai mes lecteurs à actionner leurs cerveaux, leur lucidité face aux vrais enjeux, leur décodage de toutes les propagandes, plutôt que leur seule émotion, leur seule empathie. Ces dernières sont certes nobles. Et peuvent être motrices pour actionner l'urgence humanitaire. Mais l'humain doit avant tout comprendre. Et pour cela, il doit observer, se renseigner, étudier.
     
    Ce chemin de lucidité n'est ni de gauche, ni de droite. Alors, pourquoi diable les droites suisses y sont-elles si absentes ? On aurait besoin d'elles, aussi, de leur intelligence, de leur capacité d'analyse, pour soutenir la cause palestinienne. Et pas seulement des liturgies foisonnantes, toujours recommencées, de la gauche.
     
    A propos d'indigeste désordre, je vais vous dire une chose : chaque fois que je me suis rendu au Saint-Sépulcre, à Jérusalem, j'y ai regretté l'incroyable fouillis, le capharnaüm d'objets, la superposition non-expliquée aux visiteurs de strates historiques tellement différentes. Ce tombeau-là, j'aurais préféré avoir le privilège de le trouver vide. Saisissant. Déroutant. Mais LISIBLE. Et porteur, peut-être, allez soyons fous, d'une espérance de lumière.
     
     
    Pascal Décaillet