Liberté
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La pantalonnade de Vernier déshonore la Suisse
Sur le vif - Dimanche 30.11.25 - 15.33hSi j'exerce, avec tant de passion, le métier de journaliste politique depuis quarante ans, c'est parce que tout ce qui touche à la Cité, à l'organisation collective des humains, à l'Etat, m'est viscéralement attaché.J'ai eu vingt ans le 20 juin 1978, c'était l'âge à l'époque pour voter, et mon tout premier vote fut, en septembre suivant, un OUI immense, indivisible, à la création du nouveau Canton du Jura. J'avais fait mon armée l'année précédente, à dix-neuf ans, il y avait un sérieux contingent de Jurassiens autour de moi, ils chantaient la Rauracienne pendant les marches, ils m'avaient convaincu. Depuis, en 47 ans, je n'ai jamais manqué un seul vote. Même en cette année 2005 où ma santé avait été atteinte au point de m'imposer, pendant près d'un an, un "traitement lourd". Je m'en tiendrai à ces deux mots. Ceux qui sont passés, ou passent par là, voient où je veux en venir. Je leur dis, en passant, mon invisible présence à leurs côtés.Tout ça, pour quoi ? Pour vous dire ma colère. La pantalonnade de Vernier, deuxième consécutive du genre, déshonore cette grande et respectée Commune, deuxième de notre Canton en nombre d'habitants, cinquième ou sixième de Suisse romande. Elle déshonore Genève, République et Canton, qui s'apprête à fêter l'Escalade. Elle déshonore la Suisse. Elle bafoue la confiance que nous, citoyennes et citoyens, plaçons en nos pairs, pour qu'ils exercent avec rigueur et dignité leurs droits civiques.Elle remet en cause, désolé si je brise un tabou en l'écrivant, une autre confiance : celle qui fut récemment accordée à une partie de la population genevoise, lorsque le corps électoral fut élargi. J'étais contre, mais je suis un démocrate : jusqu'à aujourd'hui, j'ai pris acte de cette décision majoritaire du peuple. A partir de ce dimanche 30 novembre 2025, je considère - et le dis - qu'il n'est pas tabou d'envisager un retour sur cet élargissement. La démocratie directe, par voie d'initiative, serait un outil pour y parvenir.La pantalonnade de Vernier déshonore la Suisse, mon pays, que j'ai servi près de 500 jours sous les drapeaux, quarante ans en animant le débat politique, partout où j'étais, radio, puis télévision. Je ne suis pas allé à Berne pendant des années, je n'ai pas lancé Forum il y a vingt-cinq ans, puis Genève à Chaud il y a vingt ans, pour qu'une bande de communautaristes jouent avec le feu, avec la confiance que nous leur témoignons, avec les institutions de ce pays que j'aime, que nous aimons tous.Les sanctions devront être exemplaires. Les leçons politiques, à la hauteur de l'exigence républicaine. Les libertaires communautaristes, n'ayant jamais rien compris à l'Etat ni à la République, aux idéologies flasques et sociétales, peuvent aujourd'hui se rhabiller. Nous reconstruirons la confiance, sans eux.Pascal Décaillet -
Claude Thébert, le passage éclairé de la vie
Sur le vif - Mercredi 26.11.25 - 16.52hHomme parmi les hommes, comédien parmi les comédiens, conteur parmi les conteurs, Claude Thébert était partout. Sur scène. Ou alors dans la salle, pour voir jouer. On allait au théâtre, on tombait sur le regard bleu de Claude Thébert. Partout où quelque chose se jouait, il était là.D'autres, mieux que moi, vous raconteront son trajet d'acteur, à travers les décennies. Les rôles qu'il a si profondément marqués, de Claude Stratz à Jean-Louis Hourdin. Sa passion pour les textes, les dire, les détacher du banal, les arracher au silence. Sa défense des mots, des scènes, des comédiens, du théâtre.Et puis, il y a 24 ans, dans la première mise en scène de Tintin (où Jean Liermier tenait le rôle-titre), il était l'un des deux Dupondt. Transposer à la scène la ligne claire, c'était le pari fou de Dominique Catton, cette aventure qu'on retrouve maintenant à Carouge.Cet infatigable promeneur à travers textes et tréteaux, cour et jardin, scène et public, était comme un passage éclairé de la vie. Au milieu d'un art qui doit, sous peine de notre mort à nous, demeurer vivant. A ses proches, ses amis, toute mon amitié. Et ma sympathie.Pascal Décaillet -
Cochons de payeurs !
Commentaire publié dans GHI - Mercredi 26.11.25
L’automobiliste, à Genève, est déjà taxé comme jamais. Des dizaines de milliers de détenteurs d’une voiture, n’ayant pas les moyens de s’offrir les normes bobo des véhicules électriques, attendent avec angoisse leur taxe 2026 sur les plaques. Echaudés par la plaisanterie d’il y a un an, ils se demandent si cet absolu scandale va recommencer.
Le même citoyen, la même citoyenne, s’il appartient à la classe moyenne (zéro subvention reçue, un maximum de taxes payées), donne trois mois de salaire aux impôts, se farcit les bouchons et les rues éventrées matin et soir, se fait insulter par l’administration, se tape les grèves de fonctionnaires, les manifs en semaine et le week-end, la robotisation des services publics, des banques, des assurances, des régies immobilières, l’absence de tout répondant au téléphone, la nécessité d’une « app » pour pouvoir exister. Et bientôt, à la déchetterie, il devra produire extrait de naissance, permis de pêche et certificat de baptême.
Les nababs, eux, s’en sortent. Ils ont des gens pour s’occuper de leur intendance. De l’autre côté, les assistés sont pris en charge. Mais entre les deux, le cochon de payeur de la classe moyenne n’en peut plus. Genève le méprise. Elle lui pompe son fric, comme un fermier général d’Ancien Régime, et ne s’intéresse absolument pas à lui. Le vent de révolte, c’est de cette classe-là qu’il soufflera un jour. Et ça fera mal. Très mal.
Pascal Décaillet