Liberté - Page 64
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Allemagne-Crimée : l'essentiel n'est pas la fuite !
Sur le vif - Dimanche 03.03.24 - 08.52hLe problème, ça n’est pas la fuite. C’est le projet allemand d’attaque sur la Crimée ! Tout le monde s’époumone sur la fuite, nul ne parle du fond.Dans des cercles d’officiers allemands, le scénario d’une intervention directe de la Bundeswehr contre la Russie plane donc dans les esprits. 83 ans après Barbarossa. Qu’ils aient été assez légers pour en discuter sur un site non-sécurisé est une autre affaire, certes croustillante pour les amateurs de romans d’espionnage, mais d’importance minime par rapport au fond.« C’est très grave », nous dit Scholz, en direct du Vatican, avec des accents de Jugement dernier. Il sortait de la Sixtine ? Il veut nous faire croire que le scénario, y compris à son corps défendant, n’est pas envisagé ? Que seul un cercle d’officiers comploteurs (on se croirait le 20 juillet 44) aurait échafaudé cette hypothèse ?Le pays-clef, pour les prochaines années, dans l’affaire ukrainienne, c’est l’Allemagne. Olaf Scholz prône une solution politique, ce qui doit être porté à son crédit et contraste avec le bellicisme matamore de Macron. Mais il y aura un après-Scholz. Un après-Biden. Un après-Poutine. Un jour, les Etats-Unis se focaliseront sur un autre théâtre d’opérations, côté Chine par exemple.Mais l’Allemagne sera toujours là, avec son Drang nach Osten. La Russie sera toujours là. Et, entre les deux, il y aura toujours l’Ukraine.Pascal Décaillet -
L'esprit qui toujours dit non
Sur le vif - Samedi 02.03.24 - 16.53hJe l'ai dit, je le répète : dans la question ukrainienne, le pays qui doit nous intéresser de très près, ces prochaines années, est l'Allemagne.Les Etats-Unis ont un plan d'expansion de l'Otan à l'Est depuis 1989. Mais il n'ont pas d'équation particulière avec l'Ukraine. Ils s'en occupent juste ces temps, parce que le théâtre d'opérations de leur expansion est l'Ukraine. C'est tout. Il pourrait être un jour l'Estonie, les Pays Baltes dans leur ensemble, la Finlande ou la Suède.L'Union européenne n'existe pas politiquement. Elle n'a ni diplomatie, ni Défense. Elle n'a que de belles paroles. Seules existent les nations.La France, malgré ses rodomontades bellicistes, n'a aucune espèce d'intérêt historique pour l'Ukraine. Un conflit entre Kiev et Moscou, avant 1989, eût passé pour une affaire intérieure à l'URSS, et n'aurait intéressé personne à l'Ouest. On se serait même réjoui de voir l'Empire se disloquer.Reste un pays d'Europe. Lequel ? Le plus puissant. Il s'appelle l'Allemagne. Première puissance économique d'Europe, quatrième du monde. Un pays qui monte en force, sur le continent, non seulement depuis 1989, mais, pour qui sait lire l'Histoire à long terme, depuis Frédéric II de Prusse (1740-1786). C'est lui, ce souverain d'exception, qui, un siècle après la ruine absolue de la Guerre de Trente Ans (1618-1648), a remis les Allemagnes dans la course, en Europe.Il faut bien comprendre une chose : le 8 mai 1945, malgré l'immensité des ruines, n'est au fond qu'une défaite d'étape dans la très longue renaissance des Allemagnes depuis la Guerre de Sept Ans (1756-1763), les victoires de Frédéric II, le début du charbon, via la Silésie conquise notamment.Défaite d'étape : regardez à quelle vitesse vertigineuse l'Allemagne s'est reconstruite, sur les cendres de 1945. Et pas seulement à l'Ouest.Hypothèse : un jour, les Etats-Unis cesseront de s'intéresser à l'Ukraine, parce que, dans leur mouvement sinusoïdal interventionnisme/isolationnisme, il seront entrés dans la seconde phase. Restera en Europe, avec une équation passionnée sur la question ukrainienne, économique, financière et agricole notamment, un géant d'Europe centrale nommé Allemagne.Ce jour-là, les vrais acteurs historiques seront sur scène. Pour tenir quels rôles ? Lequel sera Faust, et lequel Méphisto ?Et lequel, sommé de se présenter, lancera à l'autre cette réplique inoubliable : "Ich bin der Geist, der stets verneint".Je suis l'esprit qui toujours dit non.Pascal Décaillet -
Le fantôme de Bruxelles
Commentaire publié dans GHI - Mercredi 28.02.24
Pas un seul jour sans que les médias ne nous parlent des faits et gestes de M. Josep Borrell, qui porte le titre fabuleusement ronflant de « Haut Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de Sécurité ». M. Borrell, qui fit une carrière politique en Espagne, est sans doute quelqu’un de très bien. Mais, désolé de le dire aussi sèchement, ses fonctions actuelles sont une pure et simple fiction.
Il ne saurait exister de ministre européen des Affaires étrangères. Et cela, pour une simple raison : l’Union européenne, politiquement, n’existe pas. Et, s’il est un domaine où son existence dépasse le néant, c’est bien celui de la politique étrangère, domaine régalien des nations, tout comme d’ailleurs la Défense. Il existe une politique étrangère française. Il existe (ou devrait exister, si l’actuel Chancelier n’était pas si faible) une politique étrangère allemande. Etc.
Politiquement, l’Europe n’existe pas. Seules existent les nations. Dès que le vent se lève, la chose est flagrante : il a suffi d’un virus, pendant la crise Covid, pour que chaque nation défende avec rage ses intérêts propres. C’était prodigieusement révélateur : on a vu où allaient les cœurs, les intérêts supérieurs, les appartenances profondes des peuples. L’Europe est un merveilleux continent : aimons-le, aimons ses langues, ses peuples. Mais M. Borrell est un fantôme.
Pascal Décaillet