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Liberté - Page 344

  • La jouissance durable

     
    Sur le vif - Jeudi 29.04.21 - 10.15h
     
     
    Jadis, les financiers faisaient de la finance. Et les savetiers, quelque chose comme de la savate.
     
    Aujourd'hui, les banquiers ne disent plus "Je fais de la finance", mais "Nous faisons de la finance éthique". Et les investisseurs font de "l'investissement éthique et durable".
     
    Et les éthiciens ? Ma foi, ils ne savent plus trop ce qu'ils peuvent faire. L'éthique, tout le monde le leur a piquée. Ils peuvent certes dire "Je fais de l'éthique durable", mais ce genre de tics ne dure pas.
     
    Les architectes, les bâtisseurs, affirment s'investir dans la "construction durable". Avec des moyens éthiques.
     
    Les philosophes, qui ont appris le mot "éthique" en lisant en grec un célèbre ouvrage d'Aristote, font désormais de la philosophie durable.
     
    Les proxénètes tiennent à signaler que leur métier aussi, s'il veut s'avérer durable, a une éthique. Le prix de la passe inclura désormais une taxe sur les dégagements de CO2 pendant les ébats. On servira ainsi la cause mondiale. Ce sera la jouissance durable. Une sorte d'impôt sur le sel de la vie. La gabelle de l'extase.
     
     
    Pascal Décaillet
     

  • Rapperswil, Altdorf, Liestal

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 28.04.21

     

     

    Rapperswil, Altdorf, Liestal : trois paisibles bourgades de notre beau pays. Rapperswil, dans le canton de Saint-Gall. Altdorf, chef-lieu d’Uri, avec sa place centrale et sa statue de Guillaume Tell. Liestal, capitale du demi-canton de Bâle-Campagne. Pas vraiment l’ambiance Quartier Latin, Mai 68, jets de pavés, combats contre les CRS !

     

    Rapperswil, Altdorf, Liestal : le réveil, pourtant, d’une Suisse profonde. Une Suisse en colère. Une Suisse qui n’en peut plus de la gestion politique de la crise sanitaire. Tous ne contestent pas les mesures, loin de là. Mais les gens en ont marre : changements d’avis continuels, mouvement de yoyo pour les cafés-restaurants, autoritarisme de Berne. Certes, ça n’est pas la France, qui est allée beaucoup plus loin que nous dans la coercition. Mais ça n’est pas la Suisse. Nous avons, entre nous, et c’est notre richesse profonde, des tonalités de respect, de mesure, d’attention aux libertés citoyennes, qui sont la grandeur de notre pays.

     

    Rapperswil, Altdorf, Liestal : qui d’entre nous, habitué aux manifestations en théâtre urbain (Genève, Lausanne, Berne, Zurich), eût imaginé que les grandes colères de 2021 vinssent des petites villes de notre Confédération ? On est très loin des manifs de bobos, ou des liturgies de kermesses annuelles de la gauche des grandes villes, comme les processions du 1er Mai. On est dans une rage viscérale de la Suisse profonde, sans doute beaucoup de monde des classes moyennes. Dans notre pays, la colère a changé de camp.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Le travail est beaucoup trop taxé à Genève !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 28.04.21

     

    Mais pourquoi diable, à l’école, le principe de l’impôt n’est-il pas enseigné ? D’où vient l’impôt, quelle est son Histoire ? Que fut-il sous l’Ancien Régime ? Comment a-t-il été transformé par la Révolution française ? Comment a-t-il évolué aux dix-neuvième et vingtième siècles ? Quelle différence entre perception directe et indirecte ? Entre l’impôt et la taxe ? Ces questions-là sont non seulement passionnantes sur le plan intellectuel, mais surtout diablement utiles pour éveiller la conscience des futurs contribuables. Ou, tout au moins, des quelque 62% de Genevois qui auront l’honneur de payer l’impôt, près de 38% en étant exonérés, ce qui constitue d’ailleurs un problème, et doit être soulevé, même si c’est tabou.

     

    Bref, la fiscalité, ça nous concerne. L’argent de l’Etat, c’est le nôtre. C’est à nous qu’il le prend pour conduire ses politiques publiques. Et, disons-le tout net, il y a des secteurs où on nous ponctionne beaucoup trop, au point que nous étouffons. Le principal d’entre eux, il suffit de regarder votre feuille d’impôts (si vous n’avez pas la chance d’appartenir aux 38% de dispensés, cités plus haut), c’est celui sur le revenu. Or, le revenu, pour l’immense majorité d’entre nous, de quoi s’agit-il ? La réponse est simple : du fruit de notre travail ! Celui de notre sueur. Et c’est là qu’intervient l’absolu scandale déjà maintes fois dénoncé dans cette page : la taxation ahurissante des classes moyennes. Entendez ceux qui ne touchent aucune subvention, aucune aide, ne vivent que de leur travail, ont peur de le perdre, ne sont pas assez aisés pour tenir plusieurs mois sans revenus.

     

    On dirait que les puissances dirigeantes et les assistés auraient passé comme un pacte tacite : en échange de la paix sociale (notre pays a connu de grandes secousses, comme la Grève générale de 1918), on s’entend pour faire cracher au bassinet les classes moyenne. En leur prélevant un maximum sur le revenu de leur travail. Car ils bossent, ces gens-là, et même plutôt dur ! Les Suisses sont des travailleurs modèles, très comparables en cela aux Allemands, fiables, honnêtes, compétents, qualifiés. Mais attention, je vous l’affirme : ces classes moyennes vont finir un jour par se révolter, tellement elles seront écœurées d’être à ce point mises à contribution, sans jamais rien recevoir en contrepartie. Et ce jour-là, dans notre bonne et paisible Suisse de la Paix du Travail (1937) et du consensus, ça fera mal.

     

    Pour ma part, je défends les classes moyennes, bec et ongles. C’est l’un de mes principaux combats dans la bataille des idées, autour de la politique en Suisse. Et les partis, les élus, les intermédiaires, tous ceux qui se targuent de « faire de la politique », ils feraient bien de les défendre, aussi. Car notre prospérité, notre paix sociale, notre qualité de vie en Suisse ne sont pas éternelles. Notre pays repose même sur des équilibres beaucoup plus fragiles qu’on ne l’imagine. Pour que la Suisse perdure, la justice fiscale doit constamment se réinventer. En évitant à tout prix de surcharger une catégorie de contribuables. A terme, cela peut se montrer dévastateur.

     

    Pascal Décaillet