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Liberté - Page 1417

  • Bernard Genoud, un homme parmi les hommes

     

    Chronique publiée dans le Nouvelliste - Jeudi 23.09.10

     

    La mort d’un évêque n’est rien d’autre que la mort d’un homme. Homme, parmi les hommes. Mort, parmi les morts. Face au terme, face à ce mystère, il n’est plus ni crosse ni mitre, ni princes de l’Eglise, ni places d’honneur dans la Fête-Dieu, ni bruissements de courtisans. Il n’y a plus que l’équation de cette vie qui s’arrête. Pour aller où ?

     

    La mort de Mgr Genoud est justement celle d’un homme au milieu des siens. Pas d’un évêque. Même pas d’un prêtre. Même pas d’un baptisé. Non, juste un être humain. La mort est la mort, elle est notre lieu commun, elle est le lot des choses humaines. L’accomplissement, enfin, de l’égalité. Il n’y a pas de mort d’évêque, ni de prince. Il n’y a que la mort des hommes. Et d’abord, il est grand temps que les évêques ne soient plus princes. Mais serviteurs.

     

    Cette Eglise que j’aime et qu’a si bien servie Mgr Genoud, n’est jamais aussi catastrophique que dans les allées du pouvoir, jamais aussi sublime que dans la résistance. Adieu les princes, adieu lambris étoilés, l’heure qui sonne est celle de Dom Helder, des grands saints de la marge, des illuminés méprisés par la Raison, des bergers visionnaires. Et, sans doute aussi, de quelques hautes solitudes, du côté de Riddes. Qui serions-nous, nous les raisonnables, pour les condamner ?

     

    Bernard Genoud n’était ni ermite, ni mondain. Juste un homme au milieu des autres. Il portait la parole, et je sais qu’à la fin, il a aussi porté sa croix. Avec Fathi Derder, nous sommes allés le voir début août à l’EMS La Providence, en Basse-Ville de Fribourg, pour un grand entretien télévisé diffusé le jour de l’Assomption. C’est un homme simple et serein que nous avons rencontré. Il nous a dit que la maladie le grandissait. Sa souffrance n’était pas celle d’un évêque, mais un fragment de notre passion à tous, hommes ou femmes, croyants ou non. La passion des humains sur la terre.

     

    Quel plus beau message de la part du responsable d’un diocèse, cette unité fondamentale des premiers temps chrétiens, que l’acceptation et le partage de sa souffrance ? La sienne, la nôtre. Celle de notre espèce. Hier, c’est lui qui est mort. Demain, nous. Et le mystère est toujours là. Comme une dalle ouverte. Silencieuse. Et déjà invisible.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • Le silence de l’Amer

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Jeudi 23.09.10

     

    Un Neuchâtelois muet, et un entrepreneur bernois parlant très mal le français. Avec le couple Burkhalter – Schneider-Ammann pour incarner, au plus haut niveau, le parti qui a fait la Suisse, il y a quelque chose de pourri au pays du cassoulet. De l’ordre d’une gouaille grognarde et populaire, un résidu d’Empire qui sentait bon la poudre et la gamelle.

     

    Où sont-ils, nos bons vieux radicaux, certes à nuques raides et ceinturons à l’heure, le Chevallaz de Belles-Lettres, le Delamuraz pirate et capitaine, une Louise dans chaque port, et même notre bon vieux Couchepin, sale tronche, inventeur d’inédites syllabes, bouffeur de PDC mais pas de curés, dernière figure avant l’entracte.

     

    L’entracte, ou la fin ? Le muet Burkhalter ne parle même pas le langage des signes. Et hier, en renvoyant à Saint-Gall, parce qu’elle brillait trop, Karin Keller-Sutter, le parlement a privé la Suisse d’une femme d’exception. Des comme elles, j’en veux bien cinq. Ou même sept. Je ferai Blanche-Neige, s’il le faut.

     

    Oui, le radicalisme tendance charbon et mazout de Robert Ducret se meurt. Pire : entre le silence de l’Amer et les borborygmes du Bernois, c’est toute une certaine dimension rhétorique du radicalisme suisse, populacière, qui se retrouve en berne. Comme une bataille sans l’Empereur. Ou une poudre sans odeur.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Velasco, le désir demeuré désir

     

    Sur le vif - Et sans décodeur - Mercredi 22.09.10 - 14.26h

     

    Dites 33 ! Les socialistes de la Ville de Genève ne manquent pas de gourmandise en présentant un nombre assez impressionnant de candidats sur leur liste pour le Municipal. Sympathique auberge espagnole, avec des hommes et des femmes, de jeunes pouliches et quelques chevaux de retour, des idéologues et des pragmatiques, un Papy Moustache et son épouse, on coupe, on mélange, on distribue.

     

    Espagnole, l’auberge l’est d’autant plus qu’on y découvre l’une des créatures plus attachantes du socialisme genevois, le très ibérique et très codé Alberto Velasco, l’homme à la parole oraculaire et à la polysémie triomphante.

     

    Il fut député. Il est constituant. Il a tout fait. Et il repart à zéro. A lui, René Char, dans les Feuillets d’Hypnos : « Le poème est l’amour réalisé du désir demeuré désir ».

     

    Aux autres, quelques bons pour une louche de caviar, chez Globus.

     

    Pascal Décaillet