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Liberté - Page 1420

  • Raus, Béglé !

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Jeudi 06.05.10

     

    Il suffit de passer huit secondes face à Claude Béglé pour comprendre que l’homme est un maelström. Une tornade. Une bombe atomique. Dès la première fois qu’ils ont dû le voir, les apparatchiks de la Poste ont dû se jurer d’avoir sa peau. A tout prix. Et par tous les moyens.

    C’est qu’il aime la vie, le bougre. Il aime le pouvoir. Il aime dominer. Et il le montre. Et il le dit. Et, plus il parlait, plus les autres, jaunes d’effroi, devaient s’étrangler de jalousie. Douleurs ventrales. Malaise. Eructations. Ca les gratouillait, ça les chatouillait, ça les brûlait. Raus, Béglé ! Vengeance.

    Et ils ont fini par avoir sa peau : c’était tellement plus simple de virer l’emmerdeur. Plus peinard. Plus syndical. Surtout, pas de remous. Au lit ! Bon, maintenant, il est à Genève, cet homme-là, il va s’occuper des « cleantechs », personne ne sait exactement ce que c’est, mais peu importe : il est là.

    Il est là, et Genève tient une aubaine. Parce que, question énergie, c’est Verbois multiplié par le salaire de Mouchet. Tiens, je vais vous dire, mais c’est perso, les cleantechs, c’est un peu sous-modulé : c’est l’Etat qu’on aurait dû lui donner, allez disons les sept Départements, et puis en prime la SSR. Pour la privatiser rapidos. Et puis les SIG, les TPG, la FAD, et même en prime le Palais Mascotte. Histoire de vivre. Oui, simplement vivre.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Haras qui rit

     

    Alors que son parti cantonal est à feu et à sang, la jeune (et, je l’affirme, prometteuse) députée UDC Céline Amaudruz, nullement effarouchée par le fatras et le fracas du combat des étalons suprêmes, dépose au Grand Conseil une résolution (610) visant à « maintenir durablement le Haras national d’Avenches ».

    A l’UDC genevoise, on a le sens des priorités. Entre deux charges de hussards qui s’étripent, certains savent maintenir la quiétude du trot. C’est peut-être un peu plus lent. Mais au moins, on va quelque part. Et « quelque part », dans ce parti-là, c’est toujours mieux qu’ici.

     

    PaD

     

  • Anciens et Modernes


    J’ai toujours détesté, en politique, l’argument de l’âge. Dans un sens comme dans l’autre. Il n’est pas de jeunes ou de vieux politiciens, il n’en est que de bons ou de mauvais. Maudet brillait déjà dans la vingtaine, c’est vrai, mais Konrad Adenauer, qui rendit à l’Allemagne son honneur, fut, bien au-delà de ses 80 ans, un grand chancelier. Il n’y a pas plus un problème d’âge qu’il n’y aurait un problème de sexe, ce sont là des catégories inventées pas des jaloux ou des impatients. Je vous dispense de l’épicène, par indulgence.

     

    En mai 68, j’avais dix ans, je me souviens parfaitement de tout, j’avais quelque peine à comprendre qu’on pût contester de Gaulle sur la seule question de l’âge. Qu’on le fît sur son modèle de société, sa conception royale du pouvoir, l’étouffement de l’audiovisuel, le mandarinat dans les Universités, tout cela méritait en effet discussion. Mais qu’on se contentât de l’attaquer sur ses 77 ans était un peu court. Cet homme qui avait libéré son pays, donné le droit de vote aux femmes, réglé la question algérienne, offert à la France une nouvelle Constitution, élevé le verbe comme nul ne le fit avant lui, était sans doute plus jeune, dans la tête (et moins bourgeois !) que nombre de contestataires.

     

    C’est de cette époque qu’est née ma méfiance viscérale à chaque fois que venait poindre sur la scène une Querelle d’Anciens et Modernes. Que sont devenus les Michel Noir qui, du côté de 1990, avaient tenté un putsch sur le « vieux Chirac » ? Qu’est devenu le jeune Rocard qui tenta, au Congrès de Metz, en 1979, d’avoir la peau du vieux Mitterrand ? Où sont-ils, aujourd’hui, ces jeunes loups aux soubresauts de cabris ? Où sont-ils, dans les livres d’Histoire ?

     

    Ainsi, Antonio Hodgers. Toujours jeune, toujours beau, toujours sautillant, toujours cabri. Un politicien charmant, doux en toutes choses : mobilité douce, verbe doux, idées douces. La perpétuelle illusion d’une humanité meilleure, transcendée par le Rayon Vert. Toujours, la jeunesse brandie contre l’archaïsme. Toujours, la douceur contre la rudesse. Toujours, le grand mythe du Centre (un Centre doux, of course), contre cet antagonisme ringard et dépassé que serait le clivage gauche-droite.

     

    L’archaïque, en l’occurrence, ce serait Ueli Leuenberger. Le Climatique. Qui réagit avec beaucoup d’humour, dans « Le Matin » d’aujourd’hui, à ces attaques au pistolet à eau : « Je ne vais tout de même pas me teindre les cheveux en noir ! ». Ou encore : « C’est le vieux contre le jeune, le beau et le moins beau, le mince et le gros, l’alémaniaque et celui qui apprend le suisse allemand ». Bref Ueli assume. Son âge. Ses cheveux blancs. Son esquisse d’embonpoint. Ses rides. Mais aussi son vécu, son expérience, sa combativité politique, ses réseaux. Tout ce qui fait un homme.

     

    Un homme, oui. Pas un jouvenceau.

     

    Pascal Décaillet