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Liberté - Page 1184

  • Le président et le parachutiste

     

    Sur le vif - Samedi 14.07.12 - 16.57h

     

    Un président digne, et pourtant souriant. Parfaitement dans son rôle de chef de l'Etat et de chef des Armées, mais avec calme, naturel, sans prendre d'inutiles airs martiaux. Oui, j'ai beaucoup aimé François Hollande, ce matin, sur les Champs-Elysées. J'ai d'ailleurs aimé ce défilé, cette armée française au service de la République, et je crois que ce rôle, respectable et décomplexé, est perçu en 2012 par une très grande majorité de Français. Nous, Suisses, pourrions au fond en prendre pas mal de graine, et c'est un homme qui a fait 500 jours d'armée suisse qui signe ces lignes.

     

    François Hollande a donné exactement l'image qu'il fallait : celle du chef de l'Etat, mais aussi, par son sourire, son amabilité, son respect des troupes qui défilaient devant lui, celle du père de la patrie. L'armée, vécue non (surtout pas) comme un but en soi, encore moins comme un corps indépendant, potentiellement factieux, mais véritablement comme un instrument de la politique nationale, obéissant au pouvoir civil, intervenant pour protéger les populations, en France ou à l'étranger.

     

    Il est tout de même étrange que la France, qui revient de si loin en matière militaire, a livré tant de guerres et tant de batailles, vécu les plus belles victoires et les plus terribles défaites (mai-juin 1940), entretienne aujourd'hui un rapport plus simple, plus décomplexé avec son armée, que nous les Suisses. La fin de la conscription obligatoire, sous Chirac, dans le pays de qui fut celui de la levée en masse de l'An II et des éclatantes victoires des armées de la Révolution, mais aussi de l'immense sacrifice de la Grande Guerre, y est pour beaucoup. Car ces hommes et ces femmes qui ont défilé ce matin sont tous des volontaires, ils ont choisi le métier des armes, ce qui change radicalement les choses.

     

    Retour à Hollande. Le président - qui fut militaire, et même officier de réserve - ne se croit pas obligé de prendre des airs sévères. Il arbore juste la distance qu'il faut, se montre détendu mais sans relâchement, bref un Français comme un autre, juste chef de l'Etat pour cinq ans. Un politique juste assez délivré de la mystique. Il ne se prend ni pour Louis XIV, ni pour Carnot, ni pour le Poincaré du défilé de 1919. Il se prend juste pour le président de 2012. Normal, ce qui ne signifie pas banal.

     

    L'exemple le plus parlant : un para, en atterrissant sur les Champs, se blesse. Mauvaise chute, apparemment sans trop de gravité. Le président, en toute simplicité, vient à sa rencontre, lui demande comment il va, lui serre la main, espère qu'il ne gardera pas « un trop mauvais souvenir de ce 14 juillet ». Assurément, ni de Gaulle, ni Mitterrand n'eussent, en pareille circonstance, bougé d'un centimètre. Eh bien cette humanité aimable du chef de l'Etat, non seulement ne nuit en rien à son autorité, mais symbolise son lien avec les gens.

     

    De ce 14 juillet, je garderai le souvenir de cette simplicité et de ce sourire. Il y avait, de tous les côtés me semble-t-il, du respect. Non pas celui qui s'impose par les aboiements de l'autoritarisme. Mais celui dont parlent mes amis André Castella et Jean-François Duchosal. Et qui, tout simplement, change la vie.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • La politique : trompeuse et tueuse

     

    Suite de mes entretiens avec le jeune écrivain Grégoire Barbey. Ici, variations autour d'une candidature, annoncée à midi, en Ville de Genève. - Vendredi 13.07.12 - 16.54h

     

    PaD - Jean-Marc Froidevaux : un homme d'esprit et d'intelligence, un humour à vif, vingt ans d'expérience municipale en Ville de Genève. Un homme qui jouerait avec génie ce fameux rôle du cinquième, le type de droite face à quatre de gauche. Il faut pour cela, en plus de la compétence, un sacré sens de la distance et de la dérision, une connaissance absolue des dossiers. Maudet, dans ce rôle, s'en était déjà fort bien sorti. Froidevaux y serait princier. La candidature la plus séduisante, avec celle de Salika Wenger.

     

    GB - En effet, mais en l'état actuel, il semblerait que le PDC et le PLR s'entendent sur une candidature unique, celle de Guillaume Barazzone, qui représenterait l'Entente. Cette sortie du buisson, après le retrait de Genecand et l'évident sacrifice d'Olivier Fiumelli, va peut-être forcer les instances libérales-radicales à réviser leur position. Après tout, la Ville de Genève est la seconde ville de Suisse. Que diront les alémaniques si le PLR n'attaque pas le siège vacant ?

     

    PaD - Toutes ces histoires de promesses entre partis, de magouilles et manigances, retours de manivelles, n'intéressent au fond que les états-majors politiques et les initiés que nous sommes. De quoi a besoin la Ville de Genève ? D'une personne de qualité, alerte, imaginative, maîtrisant à fond les dossiers municipaux. Et j'insiste : joueuse, car il faudra composer avec quatre collègues de gauche. Dans le pétillement naturel d'un Jean-Marc Froidevaux, je sens la jouissance de cette dimension-là.

     

    GB - C'est évident. D'ailleurs, je constate une réelle fracture entre les états-majors politiques et les initiés et ceux qui sont en-dehors de ce microcosme. Peut-être est-ce là tout le génie que doit avoir un politique : ne pas se laisser embrigader dans les théories politiciennes qui font abstraction d'une catégorie infiniment plus grande que celle de la classe dirigeante.

     

    PaD - Exact ! D'où ce mot de « populisme », généralement utilisé par ceux qui ne savent pas convaincre le grand nombre, ni sentir le tellurisme du pays profond, à l'endroit de ceux qui ont ces qualités-là. C'est un mot de jaloux inventé par des politiciens de salon, habitués à se transmettre le pouvoir par robes et par familles, contre ceux qui osent le langage de la rue.

     

    GB - Nous divergeons sur ce point, Pascal. Le populisme, c'est un art, celui de flatter les foules, mais sans rien n'apporter de concret. Donner des réponses simplifiées à des questions qui ne se résolvent pas d'un simple coup de baguette magique. Pour mémoire, un certain tribun nous promettait des cages pour y déposer les criminels. Une solution inadéquate et irréalisable. Le populisme, c'est cette affection qui joue avec la peur dans le cœur des masses. Cela m'irrite.

     

    PaD - Et les partis traditionnels, je veux dire installés, ceux qui se croient au pouvoir par essence et pour l'éternité, ils ne « flattent pas les foules, sans rien apporter de concret » ? A la vérité, vous relayez ici, exactement, l'argumentaire de ces partis installés. On peut évidemment en discuter. Ce qui est sûr, c'est que savoir se faire entendre du grand nombre, en mots simples, est une vertu. Le vice, c'est d'en abuser pour tromper. Mais en politique, Cher Grégoire, la tromperie est partout. Chez le bourgeois installé, style gendre idéal PDC, comme chez la brute épaisse de la Marge. Simplement, ils trompent différemment.

     

    GB - Certes, ils ont chacun des stratégies diverses et variées pour arriver à leurs fins. Ce n'est pas une nouveauté. Certains d'entre eux me font d'ailleurs penser à la famille Borgia. Probablement avons-nous les politiciens que nous méritons. L'essentiel est de savoir soi-même ce qui importe. Des valeurs, un but commun, un rêve ? Tout ça à la fois même. Et ne pas se laisser abuser par des discours tronqués. Le reste est indépendant de notre volonté.

     

    PaD - Les Borgia - ou du moins la vision littéraire que nous en avons - représentent bien la vérité de l'essence politique : trompeuse et tueuse. Ce qui me plaît chez Jean-Marc Froidevaux (pour revenir au début), c'est son usage au fond très bourgeois, dans le meilleur sens du terme, de la parole. Donnée, à l'évidence, comme insidieuse. Pas de tromperie sur la marchandise. Pas de mièvrerie morale. Pas d'océan d'ennui de gendres PDC. Non. Juste la syllabe acide de l'avocat. Et la prunelle, tout en haut, jouissive de tant d'art. J'aime cela. Et j'aime cette ce pessimisme lucide.

     

    GB - Hélas la tromperie est répandue en politique comme ailleurs. Concernant Monsieur Froidevaux, je ne le connais pas suffisamment pour avoir un avis susceptible d'être pertinent. Je lui souhaite néanmoins bonne chance, puisqu'il va devoir rallier à lui un parti qui semble désormais décidé à faire alliance avec le PDC. Mais l'été sera long, nous ne sommes pas au bout de nos surprises !

     

    GB + PaD

     

     

     

  • Jean-Marc le Stylite

     

    Sur le vif - Vendredi 13.07.12 - 15.25h

     

    Mais enfin, ne regardez que la prunelle : elle pétille ! Vingt ans conseiller municipal, avocat, homme de lettres, Jean-Marc Froidevaux a la célérité du milan noir quand s'offre à lui, déjà perdue, l'innocence de la palombe. Un esprit vif, enfin, dans un cénacle qui donne hélas l'impression d'en être avare, la capacité de convaincre. Jouer. Donner sa chance à la malice, parce que la rhétorique politique, c'est aussi cela, et pas seulement  le labeur et le triste labour d'interminables démonstrations. Oui, Jean-Marc Froidevaux, à l'instar d'une Salika Wenger, possède à merveille l'art de la parole publique. Ça n'est pas tout. Mais ça n'est pas rien.

     

    Vingt ans d'opposition municipale. Vingt ans à tenter d'établir une parole de droite, avec de l'huile et du feu, des images et de la lumière, dans l'épicène austérité du temple de la gauche. Ça forge un tempérament. Mais aussi, ça vous affine et vous dessine une certaine posture de langage. Il s'agit de se montrer bien plus malin que les majoritaires, plus retors, ça fait de vous à la fois un frontal et un contorsionniste, il y faut à la fois le goût du diable et celui de quelque saint exalté, solitaire, roide, tiens disons un stylite, par exemple.

     

    Seul sur sa colonne, Jean-Marc Froidevaux siège au milieu du monde. De son désert, toute désaffectation feinte, rien ne lui échappe. Si par hasard il était élu, le 4 novembre, l'exécutif de la Ville pourrait se transformer, oh même petitement, en un de ces lieux, dont parle Barrès, « où souffle l'esprit ». Et même les quatre autres, Sandrine, Esther, Rémy, Sami, au diable les antagonismes, moi je vous dis qu'ils en sortiraient plus grandis et plus éthérés, de ce compagnonnage-là. Une Nef des fous ! Pour mieux nous servir.

     

    Il y eut Adrien, trop jeune pour l'heure, mais que l'avenir attend. Il y a Olivier, trahi par tous et que l'épreuve grandira. Il y a Eric, l'homme le plus seul, sublime de vigilance. Il y a Guillaume, qui voudrait conquérir. Et puis il y a Salika et Jean-Marc. Et avec ces deux-là, je vous le dis, la campagne sera plus belle. « D'Italie, de Prusse ou d'Espagne ». Elle aura, c'est sûr, des accents d'héroïsme et de folie.

     

    Pascal Décaillet