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Sur le vif - Page 902

  • Economie genevoise : Bonne Nuit, les Petits !

     

     

    Sur le vif - Mercredi 06.06.12 - 16.16h

     

     

    Incroyable : dans l'affaire Merck Serono, c'est la Ville de Genève qui, à très juste titre, secoue le Conseil d'Etat ! Guéguerre de communiqués, en début d'après-midi : la Ville tance le gouvernement cantonal en réclamant la création d'un groupe de travail ; quelques minutes plus tard, le Conseil d'Etat montre qu'il maîtrise l'anglais et annonce (sans donner le moindre détail supplémentaire) la création d'une task force. Au final, l'autorité municipale apparaît bien plus offensive, plus anticipatrice ; l'autorité cantonale, quoi qu'elle s'en défende (et saisisse ses combinés pour nous le rappeler), donne l'impression, désolé, d'un profond sommeil.

     

    Dans l'économie genevoise, que se passe-t-il ? 250 postes de travail, chez Merck Serono, vont sauter. D'autres multinationales donnent des signes très inquiétants. Le secteur bancaire, celui de la parfumerie, d'autres encore, pourraient être amenés à nous annoncer de fort mauvaises nouvelles dans les semaines ou mois qui viennent. Tout cela mêlé exige quoi ? Mais qu'on se REVEILLE, pardi ! Or, désolé, désolé, et désolé encore, le Conseil d'Etat, dans la gestion de ce type d'affaires depuis quelques semaines, ne donne pas cette impression. Sans doute œuvre-t-il, dans la discrétion, à chercher des solutions, nous voulons tout au moins le croire. Mais gouverner, c'est aussi FAIRE SAVOIR. La détermination, il faut la montrer. Le moral, il faut l'entretenir. Ces signaux-là, ce Conseil d'Etat franchement à bout de souffle à douze jours d'une complémentaire et seize mois des élections générales, ne les montre tout simplement pas.

     

    Dans ces conditions, la Ville de Genève apparaît totalement légitimée à tirer la sonnette d'alarme. Les signes de vigueur, d'où qu'ils viennent, sont les bienvenus. Pour le reste, c'est Nounours, Nicolas et Pimprenelle : Bonne Nuit, les Petits !

     

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Je ne dis jamais

     

    Samedi 02.06.12 - 09.37h

     

    Je ne dis jamais agriculteur, mais paysan.

     

    Je ne dis jamais solutionner, mais résoudre.

     

    Je ne dis jamais personne âgée, mais vieillard.

     

    Je ne dis jamais thématique, mais simplement thème, ou sujet.

     

    Je ne dis jamais développement durable.

     

    Je ne dis jamais adénopathie.

     

    Je ne dis jamais office, mais messe. Et ceux qui disent culte sont mes frères.

     

    Je ne dis jamais non-voyant, mais aveugle.

     

    Je ne dis jamais groupe sujet, ni aucune de ces pollutions, j'use de la magnifique et limpide grammaire de mon enfance.

     

    Je ne dis jamais pédagogie, mais éducation.

     

    Je ne dis jamais écoquartier.

     

    Je ne dis jamais « requalifier l'espace urbain », j'aime trop les mots.

     

    Je ne dis jamais épicène, mais épicé oui.

     

    Je ne dis jamais conflit armé, mais guerre.

     

    Enfant, je disais toujours Russie, jamais URSS.

     

    Je ne dis jamais Europe, mais France, Allemagne, Italie, très souvent.

     

    Je ne dis jamais Vichy, mais Perrier.

     

    Je ne dis jamais mode, parce que ça se démode.

     

    Je ne dis jamais Réseau d'enseignement prioritaire. Il y en aurait des secondaires ?

     

    Je ne dis jamais petite enfance, même si c'est très beau.

     

    Je ne dis Phénix que dans Apollinaire.

     

    Je ne dis jamais art contemporain. L'art est contemporain, ou n'est pas.

     

    Je ne dis jamais grands textes, c'est trop con.

     

    Je ne dis jamais citoyennes et citoyens, je dis citoyens, et j'entends que ce neutre englobe les deux sexes.

     

    Je dis toujours bonjour, et au revoir.

     

    Je ne dis jamais adieu, même aux morts.

     

    Je ne dis jamais mur, ni statut. Si ce n'est pour parler d'un mur. Ou d'une statue.

     

    Je dis très volontiers week-end, l'anglais n'est pas le diable.

     

    Je dis strophe, quatrain, impair et vers libre. Surtout, je m'en nourris.

     

    Je dis le pain, le vin, l'eau, la rivière, le ciel, la source, la terre, le lac de montagne, la paix de l'oiseau, au-dessus de l'étang.

     

    Je dis l'huile et le feu.

     

    Je dis vivez. De la fureur du verbe. Que vos mots soient les vôtres. Et vôtres, la révolte, et la beauté du monde.

     

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Pour changer un peu de Pierre Ruetschi...

     

     

    Portrait subjectif - GHI - 31.05.12

     

     

    Stauffer, l'homme qui surgit

     

    Moi, je dis qu'il est italien. De ceux qu'on aime : bandit des montagnes, condottiere, rugueux, broussailleux, très famille et très folie, l'Aventura. Si Maudet est Oiseau de feu et Anne Emery-Torracinta, Femme sans ombre, alors qui donc serait Eric Stauffer ? Surgi de quelle haie, de quel noir fourré ? Compagnon du maquis qui se commet en ville, mauvais garçon en instance de repentance, homme des bois policé pour la nécessité de la manœuvre, parrain oublié qui revient pour la fête. Que faisait-il, depuis la dernière communion ? Où était-il ? Sous quel soleil, et sous quelles ombres ? Eric Stauffer, l'homme qui a le plus marqué la politique genevoise depuis 2005, haï par les uns, adulé par les siens, est avant tout un mystère. Je ne l'ai, pour ma part, jamais percé.

     

    Ne venez pas me dire que mon portrait est subjectif : il l'est ! La couleur est annoncée, c'est marqué, en haut à gauche, dans l'encadré. Et qui serions-nous, n'importe lequel d'entre nous, pour oser « objectiviser » pareil phénomène ? Il serait l'insecte, et nous entomologistes ? Philippe Morel, député PDC, brillant chirurgien qui le « connaît de l'intérieur » pour l'avoir opéré, affirme que les entrailles de son abdomen sont normales. C'est déjà ça. Pour Frankenstein, il faudra donc chercher ailleurs.

     

    Pour le reste, quoi ? Un homme qui a été, un jour, humilié (sa préventive à Champ-Dollon, qui n'a abouti sur aucune condamnation), et a décidé, avec la plus phénoménale des énergies, de prendre sa revanche. Pas sur les juges ! Encore moins sur la police, avec laquelle il s'entend comme larrons en foire. Même pas sur la droite, ni la gauche. Mais contre un certain ordre établi à Genève, oui. Il serait Edmond Dantès, ils seraient les salopards de bourgeois de Marseille, entendus entre eux, qui l'ont envoyé au Château d'If. Vrai ou faux ? Peu importe : le mythe fonctionne. Eric Stauffer n'est pas un rationnel, il accomplit le chemin d'un désir, surgi des racines. Refuser de voir cela, c'est passer à côté de l'homme.

     

    A part ça, désolé, mais enfin, qu'on l'aime ou non, quel chemin en moins de sept ans ! En 2005, le MCG, encore tout marcassin dans les sombres taillis de la politique genevoise, force la porte du Grand Conseil. Quatre ans plus tard, il place dix-sept députés, et devient, ex-aequo avec les Verts, le deuxième parti du Parlement ! En 2011, un conseiller national, Mauro Poggia. Et la montée, doucement mais sûrement, dans les communes, qui sont le plus âpre et le plus difficile, le bastion des familles, la tourelle du bourgeois.

     

    Alors oui, le bourgeois commence à prendre peur. Naguère, dans les années 1846, la colère populaire grognait de Saint-Gervais, pour menacer la rue des Granges. Aujourd'hui, elle gronde d'un peu partout. On se rassure, on se dit que le cauchemar finira. Erreur ! Le MCG n'est pas Vigilance : il ne s'abolira pas aux prochaines élections. Le 17 juin, quel résultat fera Eric Stauffer ? Nous verrons bien. Mais l'homme des bois est là, sourcil broussailleux, œil noir, impétueux désir de revanche. Insensible à la colère postillonnée du bourgeois. Impavide aux tempêtes. Même dans un verre d'eau.

     

    Pascal Décaillet