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Sur le vif - Page 843

  • L'Europe, le destin et l'urbanité du ping-pong

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    Sur le vif - Samedi 24.08.13 - 18.33h

     

    Encore les commissions parlementaires ! C'est, à l'entendre à l'instant (18.17h) sur la RSR, le seul horizon d'attente de Johann Schneider-Ammann, en matière européenne. Comme son collègue Burkhalter ! Comme si ce jeu de miroirs de la Berne fédérale était le seul théâtre d'opérations de la Suisse ! C'est justement le thème de mon édito du Giornale del Popolo, publié ce matin en une de ce quotidien tessinois, et reproduit ici, en début de matinée, sous le titre "La Suisse a-t-elle une politique européenne?".


    Il ne s'agit pas de nier l'importance de la dialectique Gouvernement-Parlement via les commissions. Mais enfin, le débat européen, en Suisse, mérite une autre ampleur que cette urbaine partie de ping-pong entre acteurs du microcosme bernois. Il doit impérativement, ce débat, être celui de toute la nation. Comme il le fut, au fond, dans l'année 1992. Et cela, quelles que soient nos options: voie solitaire, bilatérales, adhésion. Les couches profondes du peuple citoyen doivent se réapproprier la discussion, même vive, sur l'avenir de nos relations avec l'Union européenne.

     

    Parce que franchement, laisser cela à deux ministres sans vision, et à quelques commissaires de politique étrangère, ça n'est pas sérieux. Le destin suisse mérite mieux. Et les décisions à prendre devront être scellées d'une légitimité tellurique, celle qui vient d'en bas. Dans ce domaine comme dans d'autres, la démocratie directe devra avoir son mot à dire.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Pierre Maudet : pouvoir et propagande

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    Sur le vif - Vendredi 23.08.13 - 16.57h

     

    Celui qui tient les rênes du pouvoir doit non seulement accomplir des actes, mais savoir les communiquer avec talent. Didier Burkhalter n’a pas cette vertu-là. Pierre Maudet, en revanche, en est paré au-delà de toutes les espérances. Un surdoué de la transmission. Tant mieux pour lui. Et tant pis pour ceux qui, tombés dans les rets de sa propagande, n’ont pas le minimum de sens critique pour faire la part entre les mérites (bien réels, d’ailleurs) du ministre et l’exagération publicitaire de sa communication.

     

    Dans ce dossier, il n’y a rien à reprocher à Pierre Maudet. Tout homme, toute femme de pouvoir tente d’avoir les médias de son côté et de propager la plus luisante des images. Bonaparte, dès la campagne d’Italie (1796), avait le génie non seulement de remporter des victoires, mais aussi de le faire savoir immédiatement par ce qui deviendra les « Bulletins de la Grande Armée ». Ainsi, toute la France sachant lire apprend qu’il existe, quelque part entre le col de Tende et la plaine du Pô, puis plus tard Lodi, Rivoli, un jeune général d’exception qui passe son temps à culbuter l’Autrichien, lui ravir drapeaux et canons : naissance d’une légende.

     

    Je ne reproche rien à Pierre Maudet. C’est le jeu, la loi du genre. Et franchement, je préfère avoir affaire à la propagande exagérée d’un surdoué de la politique (ce que notre homme est) plutôt qu’au silence assourdissant d’un nul. Seulement voilà, il y a le corset qu’il essaye de plaquer sur la presse. La plupart d’entre nous apprécions Maudet, je crois même être l’un des premiers à l’avoir repéré, puis lui avoir largement donné la parole, naguère, à la RSR, et aujourd’hui encore, ce que je ne regrette nullement. Mais l’apprécier, cela ne doit pas signifier tomber dans les pièges de son hyper-communication. Je le dis ici franchement : je voterai pour lui; mais je dis en même temps que je ne suis pas dupe de sa propagande.

     

    Car l’homme en fait un peu trop. Et dès cette rentrée, jusqu’au 6 octobre, puis 10 novembre, lui et les autres sortants ne manqueront pas de nous abreuver de conférences de presse, comme par hasard toujours valorisantes, communiqués de victoire, chiffres de délinquance en baisse, annonces de constructions, toutes choses relevant de leurs seules compétences techniques, et n’ayant rien à voir, vous pensez bien, avec les échéances électorales de cet automne. Là aussi, c’est le jeu, c’est de bonne guerre, tout le monde le fait depuis toujours, disons qu’il faut juste l’avoir un peu à l’esprit, plutôt que de tomber corps et biens dans le panneau.

     

    Mais Maudet va plus loin. Sa mainmise sur la presse écrite, à Genève et dans l’arc lémanique, devient franchement inquiétante. Ici, quelque séminaire alpin, en rupestres altitudes, avec d’éminentes huiles de la presse. Là, une connivence de plus en plus en marquée avec les cadres de la presse orangée, de semaine ou dominicale. Et les actes de ce héros au sourire si doux, de son lever aux aurores jusqu’aux vêpres lointaines, répertoriés, enluminés, comme aux plus riches heures du Duc de Berry, en lettres d’or.

     

    Pour exercer au mieux le pouvoir, il faut savoir faire, puis faire savoir. Pierre Maudet, très bon ministre et communicateur hors de pair, possède ces deux qualités. Assurément, nous n’allons pas nous en plaindre : je préfère mille fois le talent à l’incapacité. Il me semble simplement que les observateurs professionnels de la vie politique devraient être un peu moins dupes de la dimension de propagande de ce pouvoir. Car entre Maudet, son collègue radical, les fifres et sous-fifres de leur toile de pouvoir et de leur Garde Noire, pourrait bien s’installer, si nous n’y veillons quelque peu, dans les cinq ans qui nous attendent, une forme de pouvoir excessive, personnelle, contrôlant tout, même la presse. La domination absolue d'une clique prétorienne soudée, ivre d'accroître son hyper-contrôle de tout. L’intérêt supérieur de la République n’est pas d’aller dans cette direction-là.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Meienberg: la chaleur et le feu

     

    Sur le vif - Jeudi 22.08.13 - 14.31h

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    A juste titre, le Temps rend hommage ce matin à l'un de nos plus géniaux imprécateurs: Niklaus Meienberg, qui choisissait de quitter ce monde il y a bientôt vingt ans.

     

    En voilà un autre, comme Ziegler, dérangeur, emmerdeur, insupportable, mais tellement suisse, tellement attaché à ce pays, notamment cette Suisse orientale dont il était issu, et dont nous dirons qu'il a fréquenté quelques grandes familles.

     

    Jamais je ne manquais une seule de ses chroniques, ni dans la Wochenzeitung, ni dans la Weltwoche. Il avait, dans sa plume, cette sorte de charge explosive qui enlumine plutôt qu'elle ne détruit, réchauffe et donne la vie, suscite plutôt que d'anéantir.


    Il a écrit, il a pris position, il a rédigé des livres, fait des films. Il a provoqué, mais toujours en donnant du sens. Encore un avec lequel je n'étais pas toujours d'accord, mais dont l'incroyable talent ne pouvait que nous retenir, nous accrocher, nous interpeller. Il venait déchirer nos indifférences, ne laissait personne tranquille, jamais. Et cette sainte inquiétude, amoureuse et conflictuelle, jamais satisfaite, oui la liturgie de feu de cette colère, celle qui nous arrache au prévisible, j'aime cela, depuis toujours.

     

    Revenez un jour, Monsieur.

     

    Pascal Décaillet