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Sur le vif - Page 685

  • L'éternité du monde

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    Sur le vif - Mercredi 01.02.17 - 08.56h

     

    En politique, je ne crois pas à l'homme nouveau. Je ne veux pas y croire. Il ne m'intéresse pas.

     

    J'aime, au contraire, l'homme ancien. Avec un passé, des cicatrices, des souffrances, une histoire. L'homme qu'on aurait déjà aimé, naguère, puis détesté. Il aurait dû se battre, défricher le chemin d'initiation dans une épaisse forêt, hostile. Ça laisse des traces, ça salit les mains, ça expose à la tentation, ça s'appelle la vie.

     

    C'est pour cela que j'étais pour François Mitterrand, en 1981. Il avait été, après l'Observatoire (1959), l'homme le plus haï de France. Pendant des années, au fond jusqu'en 1964, il avait été un homme totalement seul. Il avait tenu la ligne, continué le combat.

     

    J'aime ça. 22 ans après l'Observatoire, après deux échecs à la présidentielle (65, 74), le 10 mai 1981, il parvenait au pouvoir suprême. Il avait 65 ans, et avait été traité sept ans plus tôt (1974) "d'homme du passé" par Giscard.

     

    De même, en juin 1958, j'aurais tout donné pour voir revenir Charles de Gaulle, après douze ans et quatre mois de traversée du désert. Mais en juin 1958, faute d'assister à une résurrection, je naissais. Dans le désordre et le fracas du monde, on fait ce qu'on peut.

     

    J'aime les hommes du passé. J'aime les revenants, les archaïsmes, la poussière des archives, le parfum de tombeau des vieux livres, le son des instruments anciens, les traces de l'Histoire.

     

    Je n'aime pas les hommes nouveaux, les candidats aux dents blanches. D'ailleurs, aucun homme n'est nouveau. Chacun de nous, complexe et multiple, porte en soi l'éternité du monde.

     

    Pascal Décaillet

     

  • L'hystérie anti-Trump

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    Sur le vif - Mardi 31.01.17 - 14.59h

     

    L’hystérie absolue. Ils se croient en Allemagne, au soir du 30 janvier 1933. Ils se prennent pour Thomas Mann, ou son frère Heinrich, ou Klaus. Ils se prennent pour des héros, les seuls clairvoyants, nous serions les aveugles, les croûteux. Ils veulent nous faire croire que Donald Trump, c’est le Mal incarné, la plus grande erreur de casting depuis 84 ans. Et qu’il relève d’un impératif moral de le combattre par tous les moyens. Hurler à chacune de ses décisions. Caricaturer l’homme, même physiquement, lui qui n’a pas la chance de séduire comme le danseur félidé qui le précédait, oh il y aurait tant à dire sur l’infinie convenance des « humoristes » et caricaturistes, leur alignement sur le camp du Bien, leur moralisme de pacotille, leur inféodation aux forces de l’Argent, oh oui certaines forces, très précises.

     

    Toute cette hystérie, contre qui ? Un vieux potentat, qui blanchirait depuis des décennies sous le harnais ? Un Castro ? Un Mugabé ? Un Kim, nord-coréen ? Un apparatchik biélorusse, en fonction depuis Brejnev ? Non : tout cet océan de vomissements est dirigé vers un homme au pouvoir depuis – à l’heure où j’écris ces lignes – 10 jours et 21 heures. C’est peu. Après 10 jours et 21 heures, Obama n’avait encore rien fait, George Bush Junior non plus, ni Clinton, ni George Bush Senior, ni Reagan, ni Carter, ni Ford, ni Nixon, ni Johnson, ni même l’autre danseur de rêve, JFK.

     

    Je ne prétends pas ici que toutes les premières décisions du nouveau Président me ravissent. Je n’ai, à part Charles de Gaulle ou Pierre Mendès France, rarement été « ravi » totalement par une quelconque figure de pouvoir. Créon, par définition, se salit les mains, souvent les ensanglante, seule Antigone est pure. Je préfère Créon, il relève de l’Histoire. Mais enfin, où donc peut-il être question d’oser un quelconque bilan à l’issue de… 10 jours et 21 heures ? Vous vous rendez compte que certains, comme un célèbre site en ligne, d’audience mondiale, évoquent déjà, après 10 jours et 21 heures, l’opportunité d’actionner le célèbre « Impeachment », version américaine de la destitution. Ce fameux spectre, oui, que l’on brandissait en 1974 à Richard Nixon, pour cause de Watergate : mais enfin, cet infortuné (et brillant) Président, acculé au départ le 9 août, avait tout de même passé cinq ans et sept mois au pouvoir, et pas… dix jours et 21 heures !

     

    Ce qui se déroule, en fait, c’est une exceptionnelle mise à l’épreuve de la communication. Le nouveau Président ne passe plus par les médias traditionnels, il décrète et se fait photographier en décrétant (image archaïque, un homme, un siège capitonné, un bureau années vingt, une plume, du papier, le cabinet debout autour, qui regarde). Cela donne une impression de solitude, de début du vingtième siècle, de toute-puissance, comme si s’existait aucun contre-pouvoir. Cette image, dûment préméditée, reprise en boucle par les caricatures, ne doit rien au hasard. Elle impose autant qu’elle provoque, nargue autant qu’elle interpelle. Le caricaturiste, qui croit être premier à tenir l’idée, Trump le précède : d’avance, il sait là où il sera tourné en dérision, livre volontairement du fourrage à son bourreau plumé, il a toujours une longueur d’avance.

     

    Voilà. Nous pourrions aussi dire un mot de l’indécence d’Obama, qui, à moins de onze jours de son départ, n’a même pas l’élémentaire devoir de réserve et de silence qui a toujours été de mise. Nous pourrions donner la liste des dix pays, dont le Liban et l’Algérie, interdisant l’entrée à tout détenteur du passeport israélien, sans que cela ne fût jamais condamné par nos belles âmes. Nous pourrions rappeler la part du Mur déjà décidée sous Obama, ainsi que les milliers de tonnes de bombes larguées, en huit ans, dans le plus pur silence médiatique, par ce charmant prédécesseur, ce félidé, ce danseur.

     

    Mais nous nous en tiendrons là. Nous avons face à nous la même cohorte, cette fois revancharde, que pendant la campagne. La même unicité de pensée. La même captation du Bien, pour mieux diaboliser la cible. Cela, nous ne le changerons pas. C’est le terrain de bataille. Simplement, de notre côté, sans adouber toutes les décisions du nouveau Président, loin de là, nous demeurerons dans l’exercice critique des vagues de gémissements. Et s’il faut déplaire, eh bien nous déplairons.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Hamon et les lapereaux aux mines blanches

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    Sur le vif - Lundi 30.01.17 - 07.06h

     

    Benoît Hamon m'inspire beaucoup de respect. Je ne partage pas ses idées, mais il émane de cet homme la profondeur d'une conviction et d'une sincérité. Je répète ici que son débat face à Manuel Valls, il y a quelques jours, a été, grâce à l'un comme à l'autre, l'un des meilleurs de ces cinquante dernières années. Le socialisme français n'est pas mort. Ceux qui veulent l'enterrer, se trompent. Le parti d'Epinay (1971), en tant que structure, se meurt sans doute ces jours. Le parti, mais pas le socialisme.

     

    Avec Hamon, voilà un homme dont le style rappelle la rigueur et l'austérité de l'une des plus grandes figures républicaines françaises, Pierre Mendès France. Oui, j'ai du respect pour Hamon.

     

    Voilà un homme qui dégage d'autres valeurs que celles de l'Argent, du clinquant et de l'arrogance. Il ne cherche pas, lui, à faire moderne, et son archaïsme même pourrait un jour se retourner en sa faveur. La France n'aime ni les libéraux, ni les zombies, ni les modernistes, tout au plus leur donne-t-elle, comme en cyclisme, le rôle du lièvre. Les lapereaux aux mines blanches.

     

    Laissons Hamon faire campagne, avant de déclarer en boucle sa mort clinique. Cet homme de valeur prend date pour tenir un rôle signalé, là où il sera, dans la prochaine législature.

     

    Inutile de vous dire que le zombie Macron, chouchou des sondages et tutoyeur du Nirvana, ce Macron qui croit bon, comme Giscard en 74, de s'exprimer en anglais et se vautre dans l'européisme, ce libéral oui, ne m'inspire pas exactement les mêmes sentiments.

     

    Pascal Décaillet