Sur le vif - Mercredi 30.12.20 - 11.34h
Rien de pire qu'un élu qui ne trouve rien d'autre à vous dire que "Moi, je suis élu".
"Moi je suis élu, je suis donc légitimé à m'exprimer".
Mais ça veut dire quoi, cette saloperie ? Que les citoyennes et citoyens, eux, n'auraient pas le droit de s'exprimer sur la politique ?
Alors, désolé, on remet les pendules à l'heure :
1) Le personnage principal, dans notre démocratie suisse, c'est le citoyen, pas l'élu. Le corps des citoyens, par la voix du suffrage universel, est le souverain, l'arbitre suprême, de notre pays.
2) Nous n'élisons pas des gens pour qu'ils nous disent "Je suis élu". Nous les élisons pour qu'ils agissent. Les parlementaires, pour qu'ils votent des lois (révocables par référendum), et pour qu'ils contrôlent le gouvernement (ce qu'à Genève, ils ne font absolument pas comme il le faudrait). Les exécutifs, pour qu'ils gouvernent.
3) Nous les élisons, non pour qu'ils se targuent de ce qu'ils sont, tel ce patricien d'Ancien Régime auprès du jeune Voltaire. Mais pour qu'ils agissent. La politique est un principe d'action, non une sublimation de l'être. On juge un élu à ses actes, non à sa conscience profonde d'appartenir au cercle des élus. Nos ancêtres, à la fin du dix-huitième, n'ont tout de même dégommé la Noblesse pour laisser la place à une Cléricature par l'élection.
4) La politique, dans notre démocratie suisse, est l'affaire de tous. Tous les citoyens, toutes les citoyennes. Il y a mille autres manières de faire de la politique que d'adhérer à un parti, siéger avec des bandes de comitards, ourdir dans des factions, se faire élire sur des listes. Nous avons une démocratie directe, des initiatives, des référendums, chacun de nous peut lancer des idées, critiquer vertement le pouvoir, décrypter son fonctionnement, amener sur la place publique des informations d'intérêt général. Ce droit appartient à tous. Nulle corporation n'en a le monopole, et surtout pas les médias. Par pitié, que ces derniers arrêtent de nous répéter : "Le journalisme est indispensable à la démocratie" !
5) Nous, les citoyennes et citoyens, avons à créer ensemble, dans les décennies qui viennent, un système de démocratie beaucoup plus large qu'aujourd'hui, plus vivante, plus réactive. Nous devons renforcer notre belle démocratie directe, étendre ses droits, faciliter son expression, et ne surtout pas nous laisser impressionner par les profs de droit, les élus, bref les tenants de l'actuel système, lorsqu'ils nous font la leçon sur les prétendus dangers des voies directes du peuple. La vérité, c'est qu'ils crèvent de trouille : perdre leurs prérogatives, leurs privilèges.
6) Lorsqu'un député vient vers vous, et a le culot de vous sortir "Moi, je suis élu", répondez-lui "Très bien, fais ton boulot, obtiens des résultats, prouve-le nous, contrôle le gouvernement plutôt que de t'acoquiner avec lui, sois courageux, fais-toi des ennemis, bats-toi, et nous verrons, à la prochaine élection, ce que nous ferons de toi".
Pascal Décaillet