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Sur le vif - Page 1065

  • Procès BCGe: quel François Longchamp a parlé?

     

    Sur le vif – Samedi 09.10.10 – 19.05h

     

    Les grands airs de chevalier blanc et de justicier arborés hier par François Longchamp, devant la Cour correctionnelle chargée de juger les anciens dirigeants de la Banque Cantonale de Genève, appellent quelques remarques et quelques bémols. En tout cas par rapport aux comptes-rendus bien obédients que nous proposent ce matin le Temps et la Tribune de Genève. Obédients, oui, face au grand oral manifestement réussi du président du Conseil d’Etat. Obédients, face à la position du gouvernement genevois. Une petite impression de Feuille d’avis officielle.

     

    Car enfin, dans cette affaire, quel est le rôle du Conseil d’Etat ? Celui de partie civile. Donc, un antagoniste parmi d’autres. Et non la voie de la vérité, ni celle de la sagesse. On ne sent pas exactement cela en lisant les articles, ce matin. Sans compter que le Conseil d’Etat (d’autres personnes, à l’époque) a sans aucun doute, lui aussi, d’écrasantes responsabilités dans la gestion de la débâcle de la banque, il y a une dizaine d’années. Cela, c’est pour François Longchamp président du Conseil d’Etat, garant de la continuité.

     

    Mais il y aussi l’homme François Longchamp. Comme le rappelle à fort juste titre Roland Rossier, dans la Tribune de Genève, l’actuel magistrat était journaliste au Temps le 9 mars 2000, lorsque l’affaire a éclaté. Il en avait même eu la primeur (magnifique coup, d’ailleurs). Lors de la conférence de presse du 10 mars, Dominique Ducret, président démissionné, lui lance : « Monsieur, vous avez ruiné ma carrière ! ». Cet antécédent étant ce qu’il est, n’eût-il pas été préférable que le président du Conseil d’Etat, hier, se récusât au profit, par exemple, du vice-président, Mark Muller ?

     

    Et puis, en régime de séparation de pouvoirs, il est tout de même assez singulier de voir le chef d’un exécutif accabler la défense, dans un procès, et lui nier des droits de recours parfaitement prévus par la procédure : « Le but était qu’on en arrive à la prescription. Et les incidents de ces derniers jours visaient à empêcher l’Etat de venir au procès. Cela est intolérable pour le conseiller d’Etat que je suis ! ». A-t-on souvent vu des hommes en déposition aller aussi loin dans l’analyse des fonctionnements internes d’une Cour ? François Longchamp n’a-t-il pas, très habilement, hier, joué l’oscillation entre sa casquette de partie civile et la majesté de sa position de chef d’exécutif ?

     

    Reste tout ce qui ne sera jamais démontrable, les sources du « journaliste » François Lonchamp le 9 mars 2000, les règlements de comptes politiques (disons internes à l’Entente) autour de la BCGe. Et mille autres choses qui m’amènent à ne pas partager immédiatement la pâmoison de certaines de mes consœurs devant le numéro d’hier. En toutes choses, ne faut-il pas établir qui parle, avec quels intérêts, quel passé, quelle équation personnelle au problème? Non pour l’accabler. Mais pour comprendre.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

  • La philosophe et la passion du suicide

     

    Sur le vif - Mercredi 06.10.10 - 08.21h

     

    Le philosophe doit-il à tout prix s’occuper de politique ? La question est vieille comme la philosophie, vieille comme la politique, qui sont d’ailleurs nées ensemble, quelque part dans l’Athènes des cinquième et quatrième siècles avant Jésus Christ, avec ces textes de Platon, puis d’Aristote qui nous illuminent tant, encore aujourd’hui.

     

    La question mérite d’ailleurs d’être affinée. Il faudrait demander : « Le philosophe, lorsqu’il se mêle de politique, doit-il garder la pureté cristalline de son approche ? ». C’est à cela que beaucoup de Suisses romands ont dû penser, il y a un instant, en écoutant la philosophe Marie-Claire Caloz-Tschopp répondre aux questions de mon confrère Simon Matthey-Doret sur l’initiative UDC du 28 novembre prochain concernant l’expulsion des criminels étrangers.

     

    Car hélas, aussi brillante soit Mme Caloz-Tschopp, aussi puissante et fraternelle sa prise de parole (oui, une qualité de langage qui détonne en Suisse romande), sa fuite continuelle du sujet au profit de grands principes ne pourra, à son corps défendant, qu’alimenter la partie adverse.

     

    En refusant d’empoigner le thème précis sur lequel le peuple suisse devra bien se prononcer le 28 novembre (une initiative et un contre-projet), en bottant constamment en touche sur les vrais « grands criminels qui font peur, les banquiers », l’éminente philosophe nous a délivré une véritable caricature, un sommet de déni. Elle a, clairement, donné des points à l’UDC.

     

    Ça n’est pas que les Suisses adorent les banquiers, surtout par les temps qui courent et après les excès du capitalisme financier. Mais il se trouve que la question sécuritaire, au jour le jour, notamment en milieu urbain, existe. Il ne s’agit certes pas de l’exacerber. Mais pas, non plus, de la nier, avec cette détestable et méprisante notion de « sentiment d’insécurité » que nous sort la gauche depuis des années. Allez dire à quelqu’un qui s’est fait agresser : « Ca n’est qu’un sentiment subjectif, mon ami, rien de grave ».

     

    En résumé, une grande voix, ce matin, quelque chose de très fort dans l’incandescence du verbe, mais une fausse route. Car les questions du 28 novembre, il faudra bien les traiter. Ne les prendre que de haut, avec cette altitude dégagée de l’intellectuel, pourrait bien réserver aux adversaires la même surprise qu’avec les minarets. Oui, Madame la philosophe, dans une interview radio comme dans une dissertation de votre discipline, la première des choses à faire est de traiter le sujet. La marge, c’est bien. La page, c’est mieux.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

     

     

     

     

  • MM Longet et Mizrahi, l'adieu aux larmes

     

    Sur le vif - Mardi 05.10.10 - 15.39h

     

    Avec MM Longet et Mizrahi, l’actuelle direction du parti socialiste genevois fait davantage songer à un chœur de pleureuses antiques qu’à une équipe qui veut gagner. Dans l’affaire de la Constituante, j’ai lu avec intérêt la réponse de M. Mizrahi à mes précédents blogs, et n’y trouve hélas que la confirmation de ce ton plaintif et victimaire dans lequel cette famille politique, qui fut naguère celle de Chavanne et du Grobet des grands jours, se complaît aujourd’hui. Je parle bien ici de l’actuelle direction du parti, et non des militants, ni des élus.

     

    MM Longet et Mizrahi, hommes au demeurant respectables, ne se comportent pas, en l’espèce, de façon républicaine. En République, on respecte les majorités, aussi malsaines soient-elles, comme a pu l’être l’alliance UDC-PS qui vient de jeter aux orties, à Berne, la 11ème révision de l’AVS. En République, on laisse travailler une Assemblée démocratiquement élue, quitte à lui renvoyer sa copie un certain dimanche de votation populaire. En République, on cherche à obtenir des majorités, on s’incline lorsqu’on perd, on ne vient pas parler de dissolution dès que ça vous dérange.

     

    Sur un point, je suis en accord total avec M. Mizrahi : « La seule majorité qui compte en démocratie est celle du peuple », écrit-il dans son éloge lacrymal de la défaite. Oui, celle du peuple. Le peuple, qui dira oui ou non à la Constituante. Lui seul aura le droit de trancher. Et non quelque censeur aux buissons de rose, perdu dans l’extase des larmes et la sainte jouissance de l’adieu.

     

    Pascal Décaillet