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Commentaires GHI - Page 35

  • Radicalisme oui, libéralisme non !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 02.10.24

     

    Radicalisme oui, libéralisme non. Les plus avisés d’entre vous ont pu se rendre compte que c’était là ma position. Non pour appartenir à un quelconque parti, cela ne m’intéresse pas, mais pour tenter de résumer près d’un demi-siècle de passion politique. Oh, naguère, à l’époque d’un Olivier Reverdin, qui fut mon professeur de grec, et du Journal de Genève, où j’ai fait mes premières années comme journaliste, existait sous nos latitudes un libéralisme de haut niveau, qui pouvait se réclamer d’un Benjamin Constant, ou d’un Tocqueville. Mais ce vent mauvais, détestable, qui souffle sur notre Europe continentale depuis la chute du Mur de Berlin (9 novembre 1989), et ce prétendu « triomphe du capitalisme », qui ne laisserait le champ à nulle alternative ! Oui, ce libéralisme ultra, exclusivement financier, mondialiste, déraciné des nations, je le combats depuis le début. Depuis 1989.

     

    Oh, bien sûr, il reste quelques admirables défenseurs du libéralisme philosophique, responsable, à commencer par l’excellent conseiller national Cyril Aellen, mais la masse des ultras est majoritaire. Elle a souillé le libéralisme, elle n’en a retenu que l’aspiration au profit immédiat, elle en a oublié la dimension de responsabilité individuelle, de libre-arbitre (Freisinn), de défense des grandes valeurs de la Raison dialectique (Vernunft). Surtout, elle a laissé au vestiaire, avec une vulgarité sans pareil, l’essentiel du champ où doit, depuis la Révolution française, s’exercer la politique : l’Etat.

     

    Les radicaux, eux, n’ont jamais oublié l’Etat. Les Fazy à Genève, les Druey en Pays de Vaud, les Barman en Valais, ont articulé toute leur action politique autour de l’Etat. Oh, surtout pas l’Etat tentaculaire des socialistes, avec des cohortes de fonctionnaires. Non, l’Etat fort, solide, efficace là où il doit l’être, économe de son propre fonctionnement, rigoureux à l’extrême dans la gestion des derniers publics. En écrivant ces lignes, je pense très fort à l’homme qui a le plus marqué mes quarante ans de journalisme, et que j’ai eu la chance de fréquenter dans mes années bernoises : Jean-Pascal Delamuraz. Il avait, puissamment, le sens de l’Etat.

     

    Entre radicaux et libéraux, je veux dire les libéraux tels qu’ils ont tourné depuis plus de trois décennies, nulle fusion n’est possible. Dès lors, à Genève par exemple, ne nous étonnons pas de voir des radicaux émigrer sous d’autres bannières, moins prestigieuses que le PLR, mais plus adaptées, selon eux, à leurs exigences politiques. Si vous observez attentivement la vie des Communes, vous saisirez le phénomène. Le radicalisme, le grand mouvement historique qui a fait la Suisse moderne, est d’essence populaire, « cassoulet » disait même Pascal Couchepin. Il est tissé de petits entrepreneurs, d’indépendants, de commerçants, qui sont assurément pour la liberté d’entreprendre, c’est même leur raison de vivre. Mais qui inscrivent leur horizon d’attente dans la quête d’un Etat fort. Et non dans la primauté des actionnaires sur les forces de production. Ai-je été assez clair ?

     

    Pascal Décaillet

  • Jaloux du peuple !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 25.09.24

     

    Initiative, référendum : les deux trésors les plus précieux de notre démocratie suisse. Ce sont des inventions de la Suisse moderne, celle des décennies après 1848. Le monde entier nous les envie, à commencer pas nos voisins français, qui commencent à en avoir assez de ne voter que pour élire, et presque jamais sur les sujets eux-mêmes, directement.

     

    Nous, citoyennes et citoyens de ce pays, nous qui constituons le suffrage universel, nous devons tenir à ces droits comme à la prunelle de nos yeux. Méfions-nous de tous ceux qui veulent y toucher, à commencer par le Parlement !

     

    Oui, le Parlement. Ces 246, à Berne, qui s’imaginent primer sur le collège électoral de cinq millions de personnes que nous constituons ! Oui, le Parlement, qui saisit l’aubaine de l’affaire, assurément déplorable, des signatures falsifiées dans des récoltes, pour se ruer sur les droits populaires, exiger une refonte. Nous le peuple, ne laissons pas accomplir cette forfaiture. La démocratie directe ne doit pas être l’affaire du Parlement, mais celle du peuple !

     

    La vérité, c’est que les parlementaires sont jaloux du peuple. Imbus de leurs prérogatives, ils n’ont jamais pu encaisser cette concurrence que constituent, à leurs yeux, la vivacité, l’inventivité, de nos initiatives populaires. Alors, ils saisissent le prétexte. Et tentent de l’affaiblir. Ne laissons pas faire cela, en aucun cas !

     

    Pascal Décaillet

  • Que la lucidité soit immédiate, contemporaine !

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 25.09.24

     

    J’ai dit un mot, la semaine dernière, des retardataires. Tous ces beaux esprits, dans le monde éditorial romand, qui, sur le moment, sont aveugles aux enjeux, mais quelques années plus tard, deviennent des translucides de la vingt-cinquième heure. Dit comme ça, je sais, ça peut paraître un peu abstrait, alors je vais illustrer mon propos.

     

    Il me faut donc parler de l’immigration. Le dimanche 9 février 2014, j’ai voté oui à l’initiative contre l’immigration de masse. Dans mes chroniques et éditos, y compris ici, je l’avais dit. Face à la quasi-totalité de la presse romande, je passais pour un zombie, un partisan du repli, un apôtre de la Suisse frileuse. Le plus fou, c’est que le peuple et les cantons avaient accepté l’initiative, j’étais donc majoritaire dans le peuple de mon pays, donc un bonhomme assez banal au fond. Mais minoritaire dans le seul petit cénacle de ma profession. C’est pourtant cette cléricature qui, par pure idéologie, n’avait pas saisi les enjeux.

     

    Dix ans plus tard, partout en Europe, le vent a tourné : en Suisse, les partis de droite rejoignent l’UDC sur la nécessité de réguler les flux migratoires. En France, l’opinion publique veut la même chose. Et ne parlons pas de l’Allemagne : neuf ans après le catastrophique « Wir schaffen das ! » de Mme Merkel, applaudi sur le moment par la quasi-totalité des éditorialistes suisses, voilà qu’un Chancelier social-démocrate, Olaf Scholz, rétablit les contrôles aux frontières. Oui, le vent tourne, et voilà que la cohorte des retardataires, opportuniste comme jamais, commence à trouver des vertus à la régulation. Je n’aime pas cela. Je préfère mille fois le courage des pro-migrations, qui demeurent sur leurs positions.

     

    Je pourrais me dire : « Tant mieux, au fond. Réjouis-toi qu’on embrasse enfin ta cause ». Oui, certes, mais je ne suis pas un homme sage, ni pondéré, ni gentil. Je suis un homme en colère. Je m’exaspère des cécités dictées par la mode, la convenance, la peur de déplaire au microcosme des pairs, en un mot cette absence de courage, cette inaptitude au combat solitaire. Alors oui, je dénonce les retardataires. Je dis simplement que la lucidité doit être contemporaine. C’est sur le moment, et non dix ans après, qu’il faut saisir les enjeux. Dire les choses. Dénoncer les erreurs. Sur le moment, et pas lorsque le vent tourne. Seulement, pour cela, il faut accepter le principe de solitude. Ne rien attendre des barons de la petite coterie professionnelle. N’aller chercher ni onction, ni bénédiction de ses semblables. Refuser la meute.

     

    J’ai parlé de l’immigration. J’aurais tant à dire sur la mode libérale née de la chute du Mur de Berlin, ce prétendu triomphe définitif du capitalisme. Cette volonté de détruire les Etats, les frontières. Là aussi, on en revient. Et nos chers retardataires, ils font quoi ? Ils commencent à trouver des vertus à ce même Etat qu’ils passaient leur temps à dégommer. Que la lucidité soit immédiate, fulgurante, contemporaine. Qu’elle emporte les suiveurs. Que mes colères, un jour, s’apaisent. Hélas, on en est loin.

     

    Pascal Décaillet