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Commentaires GHI - Page 220

  • Oskar écrivain: révélateur et revigorant

    Frontiere-FREYSINGER.jpg 

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 11.09.13

     

    Une très belle réflexion sur la frontière, le monde fini face aux espaces sans horizons, des citations de Rilke et Nietzsche, un style plus démonstratif et moins baroque que son dernier roman, que j’avais eu le plaisir de préfacer : « De la frontière », d’Oskar Freysinger, qui sort ces jours aux Editions Xenia, est un essai qui vaut le détour. Contrairement à son précédent livre, purement romanesque, on y retrouve, en plus de l’écrivain, un Oskar penseur et un Freysinger homme politique, attaché à une idée de frontière qu'adolescent, il avait voulu abolir, et qu’il a retrouvée, comme pas mal d’entre nous, en prenant de l’âge.

     

    En attaquant ce livre, on a évidemment en tête le chef d’œuvre de Régis Debray, « Eloge des frontières » (Gallimard), dont on retrouve les thèmes. Mais autrement. Avec la plume d’Oskar, son regard à lui, sa fantaisie qui nous trimbale de la sublime « Panthère au Jardin des Plantes » de Rilke, qui scrute le monde de sa cage, à la Cour de Louis XIV, « ce forban qui réussit à convaincre toute une nation que son lever était un acte d’Etat », en passant par les Corneilles de Nietzsche. C’est la grande vertu de cet essai, et c’est toute la trempe d’écriture de cet auteur : le fil du raisonnement, constamment, laisse surgir la puissance de l’image. Procédé évocateur, et capteur d’attention.

     

    La deuxième partie, clairement politique, s’emploie à démolir l’illusion multiculturelle, l’Union européenne, Schengen, se trompe hélas de place du Y dans le mot Libye (pages 54, 55), bref on y retrouve plus prosaïquement le conseiller national militant. C’est de bonne guerre. Au final, 78 pages bien écrites pour un essai révélateur et revigorant.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Faites-nous aimer la politique !

    Willy-Brandt.jpg

    Publié dans GHI - 28.08.13


     
    Les des enjeux majeurs, pour les 476 candidats au Grand Conseil et les 29 au Conseil d’Etat, n’est pas seulement de faire campagne, être élus puis faire le meilleur boulot possible au service de la République. Non, il y a un défi plus important que tout cela : ils doivent, tous partis, tous sexes et tous âges confondus, nous donner le goût de la chose publique. Car la politique, pendant ces semaines électorales d’automne, ce sont eux qui vont l’incarner. Pour ma part, je remplirai à la main, comme je le fais depuis l’âge de vingt ans, la liste du Grand Conseil, puisant dans (presque) tous les partis ceux que j’estime les meilleurs. Je vais vous faire une confidence : il m’est parfaitement égal qu’ils soient de gauche ou de droite, jeunes ou vieux, hommes ou femmes. Mais je veux puissamment des gens qui, par leur action, leur rhétorique, la flamme qui les anime, nous donnent envie de croire à la politique. J’y crois depuis l’âge de sept ans et demi. C’est une belle et grande chose que la gestion de la Cité. Il faut y envoyer les meilleurs.


     
    Sept ans et demi ? Tout a commencé lors de la campagne pour la présidentielle française, en décembre 1965. Les héros s’appelaient Charles de Gaulle, François Mitterrand, Jean Lecanuet. Sur notre petit écran noir et blanc, je regardais tout, la passion était née. Chez moi, chez vous, chez n’importe lequel d’entre nous, elle passe par la vertu de l’exemple. C’est pour cela que Plutarque a écrit ses Vies parallèles, pour cela qu’il faut lire la vie des grands hommes, de Gaulle, Churchill, Willy Brandt, Mendès France, Louis XI, Bismarck, et des centaines d’autres. Car chaque parcours est à la fois chemin d’aventure individuelle et repères d’exemples. De même, dans une campagne électorale, chaque candidat  doit savoir qu’il incarne plusieurs choses : lui-même d’abord ; mais aussi son parti, sa famille de pensée ; au-delà de tout cela, il figure et représente la politique elle-même, son crédit, sa valeur d’exemple, la dose de foi qu’on peut ou non lui porter. L’enjeu est immense.


     
    Ce que je reproche à un mauvais candidat, ou un mauvais magistrat, c’est principalement qu’en n’étant pas au niveau, il contribue à ruiner le crédit même de la politique, dans lequel, depuis l’aube de mon enfance, je veux croire. Alors qu’un bon, ou un excellent, tiens un Delamuraz par exemple, au-delà de leurs options, réhabilitent la vertu, la nécessité de la politique dans la vie sociale des humains. Je pense à Chavanne, qui a tant fait pour l’école : on peut discuter de ses choix, mais il a affirmé la République au milieu de l’enjeu scolaire, c’est immense. Je pense à Willy Brandt qui s’agenouille devant le monument du Varsovie : c’est toute l’Histoire allemande qui s’incline devant le martyre de la Pologne. Delamuraz affrontant l’aile patronale de son propre parti dans la loi sur le travail, c’était l’Etat contre les clans.


     
    A tous les candidats, je dis : allez-y, foncez, faites campagne, défendez vos idées. Mais n’oubliez jamais que vous incarnez la politique elle-même. De votre comportement, de la hauteur de votre action, dépendra son crédit. Ou sa ruine.


     
    Pascal Décaillet

     

  • Juste se montrer, c'est un peu court !

     

    Commentaire publié dans ma page GHI - Mercredi 28.08.13

     

    Une campagne, toujours, est un révélateur. Dis-moi comment tu mènes ta candidature, je te dirai qui tu es. Il y a les introspectifs, les timides, ou au contraire les bombeurs de torse, les matamores. Il y a les intellos, passionnés par les seules vertus de la raison et de l’argumentation, ou à l’inverse les instinctifs. Ceux qui puisent dans l’image, la séduction, le charisme. Et dans ce petit jeu, les personnalités se révèlent comme une photographie dans une chambre noire : certaines éclatent, d’autres demeurent en demi-teinte, c’est la loi parfois cruelle de l’exposition.

     

    Visuellement, il faut exister. Si l’électeur, en lisant votre nom sur la liste de votre parti, y associe un visage, vos chances d’élection seront plus grandes. Ayant parfaitement intégré cela, quelques petits malins ont passé leur été à multiplier leurs apparitions dans des réunions plus ou moins festives, juste pour être là, se faire prendre en photo, balancer l’image dans les réseaux sociaux. Puis passer à la fiesta suivante.

     

    Il n’y a pas à leur en faire grief : la multiplication des apparitions, comme celle des pains ou des poissons, fait partie du jeu. Mais il n’y pas, non plus, à en être dupe : se montrer pour se montrer, ne faire cyniquement que cela, sans que derrière l’image n’existe un contenu (ou si peu), c’est montrer bien peu de respect pour l’électeur. C’est prendre le citoyen pour un consommateur, qui ne réagirait que de façon subliminaire à la masse d’images qu’on lui aurait projetées. Efficace, peut-être, pour être élu, mais profondément méprisant pour l’essence même de la politique, qui est combat d’idées, projets de société, et non concours publicitaire.

     

    Citoyens, exigez des candidats que derrière leurs sourires de façade, ils aient de l’arrière-pays, de la vision du monde, du courage, du contenu. Servir la politique, c’est cela. Sinon, c’est juste se servir soi-même.

     

    Pascal Décaillet