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Commentaires GHI - Page 127

  • Pour l'honneur

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 13.05.20

     

    Interviewé dans ce journal, la semaine dernière, par Giancarlo Mariani, puis par votre serviteur dans « Les Yeux dans les Yeux », Simon Brandt ne lâche rien. Le candidat malheureux à la Mairie de Genève, interpellé par la police dans des circonstances hallucinantes le vendredi 13 décembre 2019, pour des griefs dont il a plus tard été disculpé, n’entend pas en rester là. Il se bat pour son honneur. Et il a raison.

     

    Le fin mot de l’histoire, je l’ignore. Nous sommes dans un domaine complexe, entremêlé, où le judiciaire se mêle étroitement au politique. Un imbroglio ! Mais une chose est certaine : Simon Brandt n’a rien d’un adepte du grand banditisme, ni d’un homme qu’il faudrait arrêter comme s’il appartenait à la Bande à Bonnot, ou à celle de Baader. C’est un homme parfaitement paisible, ne représentant strictement aucun danger pour la société. Si la justice voulait l’entendre, elle avait d’autres moyens à utiliser pour l’appréhender.

     

    Dans sa contre-attaque judiciaire, Simon Brandt, à juste titre, exige des explications. Nous sommes dans un Etat de droit : nous avons, tous, le droit de savoir ce qui s’est passé exactement. Le rôle de certains policiers. Les consignes d’arrestation du Ministère public. Y a-t-il eu volonté d’humiliation, de pression ? Visait-on, à travers M. Brandt, d’autres personnes ? Avons-nous été, en pleine campagne municipale, en présence d’un règlement de comptes, interne à l’Entente ? Tout cela, les citoyennes et citoyens ont le droit de le savoir.

     

    Pascal Décaillet

  • Le rêve inavoué du pouvoir absolu

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 06.05.20

     

    Depuis la crise du coronavirus, on n’aura jamais autant vu nos pouvoirs exécutifs suisses, dans l’Histoire de notre pays, depuis 1848. Jamais autant vu nos conseillers fédéraux. Jamais autant vu nos conseillers d’Etat. Jamais octroyé autant de visibilité à un chef d’Office, à Berne, ou un médecin cantonal. Jamais autant entendu tous ces braves gens s’exprimer de façon unilatérale, sans la moindre répartie ni contrepartie en face, si ce n’est des questions sagement factuelles, pour préciser des données techniques, ou la portée de telle ou telle consigne. Nos gouvernements paraissent, délivrent la bonne parole, daignent répondre à des interrogations techniques, sur l’application des décisions, puis disparaissent. Le lendemain, ou deux jours plus tard, ils réapparaissent, sur un scénario exactement identique. C’est réglé, comme du papier à musique, comme les bandes perforées de l’orgue de barbarie. C’est la Suisse, celle des instruments de précision, des automates, au service du pouvoir.

     

    Au risque de vous surprendre, je n’incrimine en rien nos gouvernants. Ils exercent le pouvoir en temps de crise, profitent d’une visibilité qu’on veut bien leur donner, ne s’embarrassent pas de Parlements qui justement sont aux fraises, bref ils vivent à fond le rêve inespéré, inassouvi, inavoué, de tout exécutif : le pouvoir sans contradiction, ni partage. Mieux : je reconnais qu’ils le font bien ! Alain Berset est un homme courtois, cultivé, modéré, aux tonalités convenables : c’est d’ailleurs pour cela que les Chambres fédérales l’avaient préféré au tonitruant Pierre-Yves Maillard. Lorsqu’Alain Berset paraît, la Suisse est rassurée. L’aspect oraculaire de sa prise de parole, confirmée par le grand-prêtre de l’Office, M. Koch, ne semble guère contesté par l’opinion, désireuse d’être sécurisée par des Messieurs polis et présentables. L’idée que, peut-être, toute la vérité ne soit pas toujours dite, ne semble effleurer que modérément les consciences de nos concitoyens.

     

    Il va tout de même falloir que ce petit jeu cesse. Et cela, quelle que soit la suite sanitaire de la crise. Notre tradition démocratique suisse, magnifique dans ses équilibres, n’est aucunement celle d’un pouvoir exécutif hyperprésent. Tout au contraire : il est d’usage, dans notre pays, que l’apparition des gouvernants soit rare, précieuse. Nous avons, chez nous, d’autres leviers du pouvoir. Par exemple, les Parlements : Chambres fédérales à Berne, et vingt-six Grands-Conseils dans nos Cantons. Mieux, oh oui beaucoup mieux : le peuple ! Ou, si vous préférez, le suffrage universel, le collège électoral de l’ensemble des citoyennes et citoyens. Hélas, aucune de ces deux instances, législative et populaire, ne s’est réveillée pour l’heure. En quel honneur dorment-elles ? Où est-il écrit qu’elles doivent se mettre en veilleuse à la première tempête venue ? Surtout, quel clairon les réveillera ? La Suisse n’est pas composée de sujets. Mais de citoyennes et citoyens libres. Mûrs, adultes, vaccinés. Ce sont eux qui doivent reprendre la parole.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

     

     

     

  • La jouissance du contremaître

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 29.04.20

     

    Le télétravail ? Voilà des années qu’il était déjà possible ! Des années perdues, pour les entreprises, pour la société surtout, par conformisme, par ronron, par paresse du changement. Et plus que tout, pour maintenir, dans les boîtes et dans la fonction publique, le bon vieux contrôle physique du petit chef, version bureautique du contremaître industriel, celui qui vient vérifier, derrière votre dos, si vous faites bien votre boulot. Il aura fallu une toute petite bête, maligne et virale, pour souligner la vanité de ces rapports hiérarchiques, où la sournoiserie de la domination le dispute au génie de la tracasserie.

     

    Il y a des métiers où il faut être là physiquement. Mais il existe de nombreuses fonctions, dans une activité professionnelle, qui peuvent s’exercer derrière n’importe quel écran d’ordinateur, là où on est. Dans ce second cas, le télétravail, qui valorise la confiance et la compétence (au final, il faut bien que le boulot soit accompli), vaut mille fois mieux que venir compter ses heures dans les locaux de son employeur.

     

    La notion même de « bureau », création de la seconde moitié du dix-neuvième siècle, et surtout du vingtième, est de plus en plus caduque. Pourquoi continue-t-on à construire des surfaces commerciales à Genève, alors qu’une quantité d’entre elles, aujourd’hui, sont vides ? Moins de déplacements, moins de jouissance dominatrice chez les petits chefs, moins de pollution, et le boulot qui sera quand même fait ! C’est le moment d’être révolutionnaire. Ou alors, c’est à désespérer.

     

    Pascal Décaillet