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  • Sois Vert ou tais-toi !

     

    Chronique publiée dans le Nouvelliste - Mercredi 06.04.11

     

    Que Fukushima soit une tragédie, tout le monde en convient. Qu’elle induise une profonde réflexion sur l’avenir de nos énergies, d’accord. Qu’il faille tout mettre en œuvre pour inventer, à terme, une alternative au nucléaire, une majorité de Suisses le pense. Tout cela justifie-t-il, pour autant, l’incroyable hystérie de récupération électorale, dans toute la classe politique suisse, du drame nippon ? Depuis quelques semaines, chaque homme, chaque femme politique s’est transformé en puissant expert de la question énergétique. On n’entend plus parler que centrales à gaz et pompes à chaleur. Le débat citoyen, dans notre pays, ressemble à une causerie doctorale de l’EPFL. Où le Kilowatt/heure est roi, le panneau solaire éblouissant, et l’isolation des immeubles, la querelle suprême.

     

    Aux Verts historiques, aux anti-nucléaires de la première heure, il n’y a pas grand-chose à reprocher. Saisir l’opportunité, en politique, n’est pas un défaut, et là, elle est vraiment trop belle, ils auraient tort de se gêner. Mais que de conversions ! Que d’encombrements sur le chemin de Damas ! Que de vocations, soudain, dans la dialectique énergétique. En vérité je vous le dis, ce qui éclot avec la plus étonnante des fécondités, ces dernières semaines, c’est l’éolienne. Au royaume du vent, la girouette est souveraine, le nord et le sud se confondent, la boussole devient folle. Grand spécialiste de cette « souplesse », un parti du centre-droit, d’inspiration chrétienne, dont je tairai le nom, disons juste qu’il est majoritaire depuis un siècle et demi en Valais.

     

    Face à ces irradiés de la 25ème heure, je préfère encore le courage de tel radical casque à boulons, telle conseillère fédérale hallucinée du champignon, telle brute UDC. Non que je partage nécessairement leurs positions. Mais en politique, un minimum de fidélité à la colonne vertébrale de son propre discours aide, sur la longueur, à l’acquisition d’un certain crédit. Mais tous ces néo-Tournesols, flanqués de leur ingénieur Frank Wolf (qui finira sa vie en satellite), voilà qui métamorphose le théâtre politique suisse en une monumentale centrale de Sbrodj. Tous spécialistes. Tous Syldaves. Tous docteurs en Kabbale anti-nucléaire. Ils nous promettent le vent, le soleil, la lente extase d’une vie plus douce. Et nous, face à l’océan, nous sommes comme l’héroïne de Rohmer, si belle, si bouleversante : éblouis, aveuglés par le surgissement théologique du Rayon Vert.

     

    Pascal Décaillet

     

  • La puce à l’oreille

     

    Chronique publiée dans la Tribune de Genève - Lundi 04.04.11

     

    Il y a des mots qui ne veulent rien dire. Par exemple : « Alternative ». Alternance à quoi ? A soi-même, vingt ans aux affaires, désespérément. Ou encore : « Entente ». Oui, ils ont osé garder cette étiquette, alors qu’il n’y a plus, dans la ville de Saussure, ni émetteur, ni récepteur, ni d’ailleurs message. Il n’y a plus ni puce à l’oreille, ni même l’éblouissant bruissement du silence.

     

    Pourquoi ne dit-on pas : « la gauche, la droite » ? Ces mots font-ils peur ? En a-t-on honte ? Les politiques d’aujourd’hui  sont-ils trop incultes pour avoir entendu parler de la percée de la Montagne, au printemps 1793 ? N’ont-ils jamais lu Michelet ? Sont-ils trop Verts pour avoir une Histoire ? Trop rose pâle pour avoir entendu parler de Jaurès ? Qui sont-ils, ces libéraux qui n’ont jamais ouvert Tocqueville, ces radicaux ignorants de Fazy, ces PDC incapables de disserter sur Léon XIII, ou le Sillon ?

     

    N’y a-t-il plus, à Genève, que Salika Wenger, François Longchamp ou Pierre Maudet avec qui on puisse encore avoir une conversation « de racines » sur l’Histoire des idées ? Ou Pierre Weiss ? Ou Olivier Meuwly ? Ou Philippe Bender, en Valais ? Ce qui tue le crédit du politique, c’est l’inculture de trop de personnages politiques sur la puissance de leurs propres origines. Comment voulez-vous, dans ces conditions de vide référentiel, qu’ils parviennent à nous convaincre ?

     

    Pascal Décaillet