Sur le vif - Mercredi 02.01.19 - 15.32h
L'édifice multilatéral, tel qu'il a sécrété sa toile depuis les premiers mois de l'après-guerre (1945-1946), qu'a-t-il apporté de concret ? Les grandes organisations, comme l'ONU, furent-elles jamais capables d'empêcher la moindre guerre ? Ont-elles jamais réussi à limiter le pouvoir des puissants (au premier plan desquels, les États-Unis d'Amérique), à améliorer le sort des plus faibles ?
Je ne parle pas ici de l'international humanitaire, comme le CICR, ni de l'international médical (OMS), ni de ce qui touche à la nature, à la météorologie (OMM), au monde du travail (BIT). Non, je parle bien de l'international politique : l'ONU, qui émerge juste après la Seconde Guerre mondiale, reprend la rengaine de la SDN, née au lendemain de la Première. Elle en cumule tous les défauts, l'arrogance planétaire, l'universalisme artificiel, et surtout l'implacable inefficacité. Combien de fois, sous couvert de l'ONU, des expéditions militaires furent, en réalité, des croisades des États-Unis ?
Je ne parle pas ici, non plus, de l'international économique (OMC), ni financier (FMI), face auxquels des mot encore plus sévères - j'y reviendrai - s'imposent. Non, je me cantonne aux prétentions monstrueuses de l'international politique.
La vérité, c'est que ces puissantes aspirations de gouvernance mondiale, nées des décombres de 1945, imprégnées d'un internationalisme béat, céleste, déraciné, se heurtent aux réalités : celles des nations, fruits de l'Histoire ; celles des peuples, qui aspirent à disposer d'eux-mêmes, chacun dans un périmètre proche et accessible, délimité par des horizons précis, protégé par des frontières, garantes des cohésions sociales à l'interne.
Oui, le Moloch mondialiste de l'immédiat après-guerre, à vrai dire tellement américain, tellement Technicolor, tellement hollywoodien, tellement Pentecôtiste dans sa quête de l'avènement du dernier jour, bref cette immense toile onusienne, avec ses dépendances et sous-dépendances, tout cela se fracasse sur la vérité des hommes et des femmes qui, sur cette terre, veulent être citoyens et citoyennes. Ce qui passe par le stade de la nation. Celui de la proximité. Celui de la reconnaissance dans une mémoire collective, un fil narratif historique, une relation avec les morts, les ancêtres. Une projection commune sur l'avenir. De tout cela, le monstre multilatéral de l'après-guerre, ONU en tête, s'est montré parfaitement incapable.
Pascal Décaillet