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Liberté - Page 988

  • Meurtre des TPG : un procès politique ?

     

    Sur le vif - Mercredi 24.09.14 - 17.29h

     

    D’abord, la seule chose qui compte : un homme en a tué un autre. C’est cela, l’essentiel. Et c’est à la famille de la victime, sa douleur, que nous devons penser. Et cet homme, qui en a tué un autre, doit prendre ses responsabilités face à la justice, seule habilitée à démêler l’affaire, et statuer.

     

    Mais il y a tout de même un problème dans cette affaire du meurtre des TPG. Parce que la victime était frontalière, des voix s’élèvent pour nous dire, en substance : « Voyez le résultat de certains discours politiques », allusion bien sûr au MCG. Et là, je ne suis pas d’accord. Parce qu’à ce jour, à moins de connaître à fond le dossier, nul d’entre nous n’est habilité à produire cet amalgame. Je veux dire le produire dans ce cas précis, intrinsèque.

     

    Et puis, il y a autre chose qui me chicane : le rôle du Procureur général. Ce dernier, comme on sait, a de nombreux adjoints, et ne descend que rarement lui-même dans l’arène, pour porter la réquisition. Pourquoi, dans ce cas précis, a-t-il choisi de le faire ? Quel signal a-t-il voulu donner ? On nous dira que le théâtre d’opérations du meurtre implique le Grand Etat (une importante régie), je ne suis pas sûr que l’argument soit suffisant.

     

    Pour moi, Olivier Jornot a commis une erreur. D’aucuns ne se gêneront pas de lui rappeler son origine politique (le PLR), que l’un des thèmes brassés autour du meurtre est celui de la préférence cantonale, et que le signal donné par sa présence en personne se trouve être, de facto, un signal politique. A cela s’ajoutent certaines maladresses, ou malveillances, de presse. Ainsi, lorsque le Temps, dans son édition en ligne d’aujourd’hui, parle de « l’exécution d’un frontalier », on ne peut que d’interroger sur le choix des mots. Tout cela, au final, donne le sentiment d’un procès à forte tonalité politique. Pas sûr que la famille de la victime, parfaitement légitimée à faire valoir ses droits, ait besoin de tout ce brassage périphérique, par rapport au drame qu’elle a vécu.

     

     

    Pascal Décaillet

     

  • Indignation sélective

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 24.09.14

     

    J’ai toujours, depuis de longues années, soutenu le peuple palestinien. Toujours, j’ai dit et écrit qu’il devait avoir un Etat à lui. Un Etat ! Et non une simple autonomie administrative dans le cadre d’une occupation qui date de 1967. Mais toujours, disant cela, j’ai ajouté qu’un autre Etat, Israël, devait voir reconnu son droit total à l’existence. Et que les enfants de ce pays devaient aller à l’école sans que le bus scolaire ne risque une explosion par attentat. En clair, comme l’immensité de mes compatriotes suisses, je plaide pour une paix durable, fondée sur la dignité de deux Etats souverains. Mes nombreux voyages au Proche Orient m’ont convaincu de cette position.

     

    Solidaires avec la Palestine, oui. Surtout au moment où les populations civiles de Gaza font les frais d’une riposte disproportionnée d’Israël. Solidaires, mais dans l’équilibre et, non dans l’unilatéralisme. A cet égard, au moment où plusieurs centaines d’artistes et d’intellectuels suisses envoient au Conseil fédéral (ce mardi 23 septembre) un appel de solidarité avec les Palestiniens, on a quand même envie de leur dire que leur indignation a tendance à toujours aller dans le même sens. Certains d’entre eux – pas tous – déploient contre Israël, oui contre Israël même et pas seulement contre la disproportion militaire, une haine farouche, qu’ils peinent à dissimuler. On aimerait aussi les entendre, ces voix indignées, lorsque des populations civiles israéliennes tombent dans des attentats. Ces jours-là, hélas, ils sont bien silencieux.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Etats 2015 : longue vie à la gauche !

     

    Sur le vif - Mercredi 24.09.14 - 10.14h

     

    Dans mes années bernoises, j’adorais aller au Conseil des Etats. Il y avait cette antichambre si paisible, sans un bruit, l’odeur de la pipe de Gilles Petitpierre, le souvenir de très belles discussions avec cet homme brillant, mais aussi la parfaite courtoisie de tous, le sourire de mon ami Otto Schoch, représentant radical des Rhodes Extérieures d’Appenzell, qui avait présidé en 1990 une commission sur la réforme de l’armée à laquelle, avec entre autres Uli Windisch et Martin Killias, j’avais eu l’honneur d’appartenir. Nous avions siégé toute une année, dans tous les coins du pays.

     

    Les Etats, c’est la Chambre des Cantons. Autant dire que dans un pays fédéraliste, ça n’est pas rien. Les 46 représentants du « Stöckli » défendent bien sûr l’intérêt du pays tout entier, mais aussi celui de leurs cantons respectifs. Très important dans les questions touchant, par exemple, aux finances, aux grandes infrastructures routières ou ferroviaires, à l’assurance maladie. Ils sont ceux, véritablement, qui montent à Berne pour défendre l’intérêt supérieur de leur canton. On y parle assis (ce qui m’a toujours un peu dérouté), chacun dans sa langue, sans traduction. On attend donc d’un conseiller aux Etats francophone un bon niveau d’allemand, et l’inverse pour les germanophones. Quant aux représentants de la Suisse italienne, aucun souci pour eux : la plupart parlent parfaitement trois de nos quatre langues nationales.

     

    Et puis, il n’y a que deux conseillers aux Etats par canton (un seul par demi-canton), alors qu’au National, la représentation est proportionnelle au nombre d’habitants : beaucoup d’élus pour Zurich, très peu pour Glaris. Deux par canton, c’est plus visible. Le poste est donc, au moment des élections fédérales, particulièrement prisé. Mais le chemin d’accès est tout sauf facile : les politiciens les plus chevronnés s’y sont cassé les dents, Blocher par exemple.

     

    Il faut, aux Etats, des personnalités rassembleuses. Capables de faire des voix sur leur personne, au-delà de leurs familles politiques. Olivier Reverdin, qui avait été mon professeur à l’Université, mais aussi le patron du Journal de Genève, un helléniste hors pair, le président de l’Assemblée du Conseil de l’Europe et du Fonds national de la recherche scientifique, en était une, respecté au-delà de son étiquette libérale.

     

    Dès lors, qui représentera Genève aux Etats entre 2015 et 2019 ? Face aux deux sortants, la socialiste Liliane Maury Pasquier et le Vert Robert Cramer, qui tiennent la place et bénéficient de l’avantage du terrain, ayant tissé leurs réseaux, qui de droite pour oser s’emparer de l’un des sièges, voire les deux ? Réponse : à ce jour, d’une façon qui serait évidente, personne. Car dans la droite genevoise, principalement l’Entente, les grandes figures n’existent plus. Les dernières d’entre elles, ultimes cartouches, ont été casées au Conseil d’Etat. On n'imagine guère qu’à peine élus, ou réélus, ces gens aient le front de trahir leurs électeurs (pour cinq ans) pour s’en aller à Berne. Car désormais, il faut choisir : on est conseiller d’Etat ou aux Etats, pas les deux.

     

    Dans la députation actuelle au National, on ne semble pas se presser au portillon pour courir au casse-pipe, le dernier ticket d’Entente, pourtant constitué de deux locomotives, avait échoué il y a quatre ans, cela laisse des traces. Quant au recyclage d’anciens conseillers d’Etat, ayant déjà blanchi sous le harnais pendant douze ans, accompli une législature de trop et très modérément forcé leur talent dans l’ordre de la capacité de travail, on se dit que la Chambre des Cantons a peut-être une autre vocation que celle d’assurer des rentes à vie, aussi débonnaire et sympathique soit l’intéressé.

     

    Reste la question majeure, la stratégie électorale. Dans une élection de type majoritaire, il faut serrer les rangs. La gauche, disciplinée dans ces cas-là, sait le faire, et elle aurait tort de s’en priver. Mais face à elle, quid ? Une droite en lambeaux ! Des caciques de l’Entente qui ne cessent, à longueur de journées, au lieu d’attaquer la gauche, de s’en prendre à la troisième force du canton, dite « nouvelle », oui ce Tiers État de la politique genevoise, jailli des élections cantonales, et qui assurément aura marqué d'ici là des points, notamment dans les communes suburbaines, aux municipales du printemps 2015. Si l’Entente et le bloc MCG-UDC ne sont pas capables de passer des accords sur des personnes rassembleuses, le duo Cramer – Maury Pasquier perdurera. Nous pourrons dire « longue vie à la gauche », et nous frotter les mains d’avoir à Genève la droite la plus bête du monde.

     

     

    Pascal Décaillet