Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Liberté - Page 488

  • Respectez le Parlement, M. Maudet !

     

    Sur le vif - Dimanche 07.06.20 - 14.40h

     

    Monsieur Maudet, un Conseiller d'Etat ne peut se contenter de qualifier "d'élucubrations" les propos des députés Buchs (PDC) et Bläsi (UDC) sur vos liens avec Manotel.

    Vous êtes membre de l'exécutif. Ces deux Messieurs sont des élus du peuple, membres du premier pouvoir, le Parlement, qui a pour mission de contrôler l'activité du gouvernement et de l'administration. Nombre de leurs collègues, hélas, ne l'assument pas, cette mission. Ces deux-là, parmi quelques autres, si.

    S'il vous interpellent, vous devez leur fournir des réponses précises et circonstanciées. Au surplus, je ne sache pas que vous ayez à qualifier - encore moins à disqualifier - les questions légitimes qu'au nom du peuple, ces deux excellents députés se posent sur votre gestion.

    Monsieur Maudet, je vous ai souvent défendu, et continuerai de le faire pour que vous gardiez votre place au Conseil d'Etat, et que vous retrouviez un Département avec ampleur et marge de manœuvre. Mais vous ne pouvez rejeter ainsi, d'un revers de la main, les questions de la représentation populaire de notre Canton.

     

    Pascal Décaillet

  • Pourvu qu'elles meurent, avant que d'être !

     

    Sur le vif - Samedi 06.06.20 - 18.07h

     

    La liberté d'expression n'existe pas. Tout le monde en parle, tout le monde la promeut, mais elle n'existe pas.

    Ceux qui la brandissent avec le plus de majesté, ou de fureur messianique, sont en général les premiers à la déchiqueter, dès qu'ils se sentent eux-mêmes atteints, ou en danger. La sauvegarde de chaque intégrité s'impose immédiatement sur les grands principes universels, c'est ainsi, c'est viscéral, c'est la vie. L'humain n'est pas une idée abstraite, mais un champ de forces physiques, avec leurs antagonismes, leurs contradictions.

    Même dans notre bonne Suisse, pays libéral sur le plan de la pensée, cette liberté n'existe pas, autrement que comme intention posée. Un principe intellectuel, tout au plus. En réalité, y a des choses, tout simplement, qu'on ne peut pas dire. Soit parce qu'elles sont interdites (à tort ou à raison, chacun jugera) par la loi. Soit, plus sournoisement, parce que les énoncer vous exposerait à tellement d'ennuis qu'à la réflexion, après avoir hésité un moment, vous préférez renoncer. Pourquoi s'incendier l'estomac, se torturer d'insomnies, si on peut l'éviter ?

    Dans cette opacité de plomb, il y a bien, ici ou là, quelques percées de lumière. Leur vie, infiniment brève, est celle des comètes. Ou des feux de Bengale. Elles nous distraient. Nous les tolérons, pourvu qu'elles demeurent instantanées. Pourvu qu'elles meurent, avant que d'être ! Plus pervers : les organes du pouvoir et de la convenance, si nombreux dans notre espace public, sont les premiers à leur octroyer une apparence de droit de cité, comme un frisson d'orgasme canaille, retenu puis hurlé, sur un sofa bourgeois.

    Il y a des sujets que nul n'ose aborder. Et qui pourtant nous tourmentent, un grand nombre d'entre nous. Mais il faut les taire, sinon c'est la foudre.

    En vérité, je ne suis pas sûr que nos sociétés européennes de 2020, la Suisse, la France, l'Italie, l'Allemagne, soient intellectuellement beaucoup plus libres que celles d'il y a 100 ans, ou 150, dans les mêmes pays. Pour avoir longuement travaillé sur la presse française et suisse romande des années Dreyfus (1894-1906), avec la folie de ses passions et de ses antagonismes, je suis même persuadé du contraire. La presse de cette époque-là était sanguine, excessive, injuste, fébrile, enflammée, dégueulasse même parfois. Mais elle était plus libre que celle d'aujourd'hui. Je ne dis pas meilleure, je dis plus libre.

    Alors ? Alors, rien ! Je n'ai rien d'autre à ajouter. Chacun jugera, selon son coeur, selon son âme, selon la puissance de ses haines, ou celle de ses passions. Chaque humain est un univers. Chaque conscience est libre de se taire. Ou de parler. J'ai lu ça quelque part dans Luther, dans sa traduction allemande de la Bible, 1522. Et nul d'entre nous n'a, au fond, à juger le degré de lâcheté - ou de courage - de son voisin. Qu'il s'occupe déjà de lui-même. Le champ est vaste. Une vie jamais n'y suffira.

     

    Pascal Décaillet

  • Ah, les sottes gens !

     

    Sur le vif - Jeudi 04.06.20 - 12.54h

     

    Singulière période, où le prolétaire se déplace en voiture, et où le bobo urbain jouit de l'horizontalité silencieuse des pistes cyclables.

    Le prolétaire ? Le petit artisan, l'ouvrier. Il n'a pas la chance d'habiter au centre-ville, il a besoin de son véhicule. Il en a rêvé longtemps, il a mis des années à pouvoir se l'offrir. C'est lui, bien souvent, qui ronge son frein dans les bouchons, à côté d'une piste cyclable aussi démesurément large que vide.

    Le bobo ? Habite en ville. Travaille en ville. Vote Vert. Aime les mots nouveaux : transition énergétique, transfert modal, énergies renouvelables. Cultivé, souvent. Doux, agréable. N'aime pas le cambouis. Ni le bruit, ni les moteurs. Aime le télétravail, sauf que son vélo lui manque. Pas de gros mots, pas d'ébullition, jamais hors de soi. La vie s'écoule, paisible, comme une éternité de petites graines.

    La guerre des transports est aussi cette guerre-là. Une bonne vieille guerre sociale. Entre le nanti, protégé à l'extrême dans son cocon, et l'infâme petit indépendant, avec sa camionnette de mauvais goût, même pas lavée. Même pas de badge "Nucléaire, non merci !" collé sur sa vitre arrière. Ah, les sottes gens !

     

    Pascal Décaillet