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Liberté - Page 221

  • Priorité absolue à nos rentiers AVS!

     

    Commentaire publié dans GHI - Mercredi 22.06.22

     

    Va-t-il falloir dans notre pays, l’un des plus prospères du monde, que les retraités descendent massivement dans les rues pour exiger des conditions de vie décentes ? Des gens qui ont travaillé toute leur vie. Ils ont fait la richesse de la Suisse, ce pays respecté sur la planète pour sa fiabilité, son exactitude, la qualité de ses finitions. Ils ont trimé dur. Ceux qui avaient fait un apprentissage, et commencé la vie active à 20 ans, ont cotisé à l’AVS pendant 45 ans. Quant au deuxième pilier, obligatoire seulement depuis 1985, tous n’en bénéficient pas, ou pas complètement. Bref, dans notre riche pays, les rentes sont maigres, des dizaines de milliers de retraités tirent la langue, attendent la fin du mois, c’est cela la réalité.

     

    Avec l’inflation qui gagne le pays, la hausse des taux par la Banque Nationale Suisse, le pouvoir d’achat qui n’en peut plus de fondre, un devoir de solidarité nationale s’impose, en faveur de nos aînés. C’est, pour le pays, une tâche prioritaire : d’abord les nôtres, d’abord ceux qui ont passé leur vie ici, ont fait la prospérité du pays. D’abord, oui ! Loin devant tout le reste ! D’abord les nôtres, ensuite l’altérité ! Citoyen de ce pays, je ne supporte pas d’entendre parler des milliards pour l’étranger, du « milliard de cohésion » de la Suisse à l’Union européenne, des subventions astronomiques versées à des « associations », tant que nos personnes âgées n’en peuvent plus de guetter la fin du mois. Si la démocratie « représentative » (par rapport à laquelle vous connaissez mes réticences) n’est pas foutue de trouver une solution à la précarité de nos aînés, alors c’est la démocratie directe qui doit se mettre en marche. En créant un électrochoc dans les consciences nationales.

     

    La goutte d’eau qui fait déborder le vase ? Comme le relève le Matin dimanche du 19 juin, les retraités suisses pourraient perdre 1000 francs par an, au 1er janvier 2023. Le mécanisme est simple : les rentes seront certes indexées, mais absolument pas suffisamment pour compenser l’inflation. En termes de pouvoir d’achat, l’effet est dévastateur. Il va, comme toujours, toucher de plein fouet les plus précaires de nos compatriotes, ceux dont les bobos urbains, avec leurs puissantes préoccupations « sociétales », ne se préoccupent jamais. Ces rentiers défavorisés sont pourtant la sève de notre nation, l’Histoire de notre pays, la fierté de sa réussite éclatante pendant les années d’après-guerre. Elever leurs rentes, garantir leur pouvoir d’achat, ne relève en rien de l’aumône : c’est un impératif vital de notre cohésion sociale. Comme le fut, en 1947 et 1948, l’immense débat national ayant abouti à la création de l’AVS. Ce jour-là, au milieu d’une Europe en ruines, alors que le rationnement et le charbon figuraient au rang des préoccupations principales, la Suisse, comme trois ans plus tôt la France avec la Sécurité sociale (de Gaulle, à la Libération), comme la Grande-Bretagne des travaillistes, comme l’Allemagne bismarckienne un demi-siècle plus tôt, donnait une réponse à la précarité. Une réponse à hauteur de la dignité humaine. A hauteur de l’Histoire.

     

    Pascal Décaillet

  • La réalité fermentée des racines de la France

     
    Sur le vif - Mardi 21.06.22 - 14.49h
     
     
    Dimanche, le peuple de France a écrit une page de l'Histoire politique de ce pays, depuis la guerre, c'était le thème de mon billet d'hier. Il a livré la photographie précise des rapports de forces et des volontés politiques. Le résultat est celui qu'on sait. Il déçoit qui ? Je vais vous le dire.
     
    Il ne déçoit en tout cas pas le peuple, qui est l'auteur de ce message, et qui ne l'a pas émis au hasard. Non. Il déçoit M. Macron, qui aurait voulu une nouvelle majorité de godillots. Il déçoit Mme Borne, qui perçoit ses limites éponymes. Il déçoit M. Mélenchon, qui se voyait déjà signer, de Matignon, des lettres de cachet pour la place de Grève. Il déçoit les états-majors des partis. Il déçoit les pies bavardes des chaînes privées, qui n'en peuvent plus, depuis dimanche soir, de parler de Macron, Macron, et encore Macron.
     
    Hors-sujet ! La présidentielle, c'était il y a deux mois. Macron est élu pour cinq ans, c'est en ordre. S'il veut régner nu, c'est son problème. S'il veut partir, c'est son problème. Son destin n'a plus d'intérêt. Car dimanche, il s'agissait de quoi ? D'un autre pouvoir, totalement séparé de l'exécutif (Jeu de Paume, 20 juin 1789), qui s'appelle le Parlement. 577 élections, dans 577 circonscriptions. La réalité fermentée des racines de la France. Les élus du peuple, dans toute sa pluralité, sa diversité, ses contradictions, ses lignes de tension. Pour cinq ans (toute dissolution serait un Brumaire dévastateur pour ce qui reste de pouvoir en place), ce sera cette Assemblée-là. Avec elle, il faudra travailler. Elle sera souveraine, pour faire les lois.
     
    Le sujet n'est donc pas de savoir ce que va faire Macron. Ni quel remaniement doit s'opérer. Ni quelles alliances de circonstances. Non, non et non. Le sujet, c'est prendre acte de cette Assemblée-là. Orienter la politique française sur ce qui sera faisable, ce qui ne le sera pas. Un Parlement n'est pas là pour être l'outil du gouvernement, mais sa Chambre de contrôle. Et de censure. Ces choses-là, très courantes jusqu'en 1958, ont été mises en veilleuse depuis 64 ans. D'abord, pour faciliter la tâche à un homme de l'Histoire, revenu certes aux affaires dans l'extrême limite de la légalité, mais qui devait régler la question algérienne. Puis, au fil des ans, comme instruments de facilité pour la médiocrité. Lorsque César laisse la place à Romulus Augustule, lorsque Rome n'est plus dans Rome, il faut revenir aux grandes valeurs. République. Séparation draconienne des pouvoirs. Contrôle de l'exécutif par le législatif. Mise en congé des médiocres.
     
    Comme je l'ai écrit hier, le peuple de France a dessiné, dans le génie de son inconscient collectif, 577 fois réinventé, le visage d'une Assemblée qui ne doit rien au hasard, et doit être respecté. Les partisans de M. Macron y sont encore nombreux. La gauche radicale l'emporte historiquement sur les gentils sociaux-démocrates. Les Verts y sont aux fraises, c'est la saison. La droite nationale y fait la percée historique qu'elle méritait depuis longtemps, si le mode de scrutin ne la mettait aussi scandaleusement à l'écart.
     
    C'est cela, tout cela, rien que cela. Il faut cesser de se demander "ce que va faire M. Macron", ça n'a aucun intérêt. Il faut prendre acte de la photographie. Et s'intéresser enfin au peuple français. Dimanche, il a pris date. Il a dit : "J'existe". C'est lui, le héros de l'Histoire. Et non le Prince errant dans son Palais des Glaces.
     
     
    Pascal Décaillet

  • De 577 points d'appui, le peuple de France impose la proportionnelle

     
    Sur le vif - Lundi 20.06.22 - 10.23h
     
     
     
    D'abord, la remarque la plus ahurissante de la soirée politique d'hier : un observateur pro-Macron, totalement effaré par le camembert des résultats, s'exclame : "Quelle horreur ! Ce Parlement est ingouvernable !". Comme s'il s'agissait de "gouverner" les représentants élus du peuple, cet autre pouvoir, séparé, ne devant rien à l'exécutif, cette représentation 577 fois recommencée de la France d'en-bas.
     
    A quoi bon Mirabeau, le Serment du Jeu de Paume, le 20 juin 1789, à quoi bon la promesse de ne sortir que "par la force des baïonnettes", si c'est pour qu'un inculte affidé au Prince du moment, 233 ans plus tard, vienne sortir une telle énormité : "Ce Parlement est ingouvernable".
     
    Constamment rudoyé, le Parlement français, pendant ces 233 ans. L'épisode bonapartiste le met en congé. Le premier homme fort venu (de Gaulle inclus) le réduit au statut de Chambre d'enregistrement. Le 10 juillet 1940, deux semaines après la plus grande défaite de l'Histoire de France, il se met lui-même en congé. Dès qu'il est de la même couleur que le Président, il se réduit à une amicale de godillots tout juste bons à avaler les décrets du pouvoir. Non, décidément, la Cinquième République, malgré toutes ses qualités, n'est pas celle du Parlement. On est très loin de la grande tradition britannique. Ou du Reichstag bismarckien. Sans parler de la Suisse.
     
    Hier en France, c'est le peuple qui a écrit une page d'Histoire. Il n'a rien demandé à personne, n'a sollicité nulle permission, il a juste dessiné, dans le génie de son inconscient collectif, une configuration qui va imposer, d'en-bas, des changements majeurs. C'est un très grand moment de l'Histoire politique du peuple français. D'autant plus émouvant qu'il ne procède aucunement d'une volonté centralisée, mais de la juxtaposition de 577 élections, parfaitement indépendante l'une de l'autre, dans 577 circonscriptions. C'est, à la solitude du Prince, la réponse multipliée du terroir, bouillonnante de diversité, et pourtant claire dans l'intention générale du peuple français.
     
    Personne n'aura la majorité absolue ? Et alors ! Pour un Parlement, c'est une merveilleuse nouvelle : pour une fois, il va tenir un rôle. Il faudra faire et refaire, coudre et découdre, assembler, bricoler, discuter, convaincre. En Suisse, nous connaissons cela. En France, en tout cas depuis 1958, ce sont des habitudes quelque peu perdues.
     
    Oui, c'est une très grande journée que celle d'hier. Depuis au moins trente ans, tout le monde dit qu'il faut installer une dose de proportionnelle, pour une représentation plus juste des forces. Mais personne ne le fait. Macron s'y était engagé il y a cinq ans, il a volontairement laissé tomber, c'est tellement plus commode de régner. Hier soir, le peuple de France lui a présenté l'addition.
     
    La proportionnelle n'a pas été imposée par décret. Ni pas décision du Prince. Ni même par le vote des élus. Elle a été, DE FACTO, instaurée d'elle-même, hier, par le génie décentralisé du peuple souverain. Car cette législature sera proportionnaliste, ou ne sera pas. Et c'est le peuple souverain qui, de 577 points d'appui différents, sans rien demander aux légistes ni aux constitutionnalistes, l'aura, face à l'Histoire, imposée d'en-bas. Oui, ce dimanche 19 juin 2022 est une date dans l'Histoire politique de la France.
     
     
    Pascal Décaillet