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Lavage, essorage, 60 degrés

 
Sur le vif - Mardi 23.05.23 - 07.47h
 
 
RSR : Karin Keller-Sutter maîtresse d’école, tendue, sur la votation fiscale fédérale de juin. Où est passée l’extraordinaire Conseillère d’Etat saint-galloise qui osait défriser la doxa sur les flux migratoires ?
 
Elle était elle-même, défendait ses choix politiques à elle, audacieux, à rebours des grandes leçons des médias, de la gauche et de la droite timorée.
 
Elle existait, avec une incroyable présence, et personne, en Suisse romande, ne connaissait le nom des autres membres du gouvernement saint-gallois. Elle émergeait.
 
Aujourd'hui, on lui demande de s'exprimer sur un sujet. Elle répond par cette énormité : "J'attends que le Conseil fédéral ait un avis".
 
Crétinerie de "collégialité". Comme si l'appartenance à un gouvernement était une machine à uniformiser. Blanchir les différences. Une fabrique d'anges disciplinés.
 
Christian Grobet, Jean-Pascal Delamuraz, Pascal Couchepin, bref les grands exécutifs que j'ai eu l'honneur de côtoyer, n'ont cessé, dans les interviews individuelles, de mettre en avant leur personnalité, leur différence, leurs aspérités, de laisser entendre leurs désaccords avec le diapason du Collège. Tout le monde comprenait. Et c'était très bien. Il faut être un peu voyou - ou voyelle - dans l'entretien politique : un peu d'humour, de dérision, de second degré, que diable ! On n'est pas juste une machine programmée sur "lavage, essorage, 60 degrés".
 
Dans les conditions d'impuissance impersonnelle que nous venons d'entendre à la RSR, pourquoi continuer à donner la parole aux ministres ? A interviewer l'un d'entre eux, en particulier ? On prend note du communiqué hebdomadaire du gouvernement, on dit ce qu'on en pense, et on va se coucher.
 
 
Pascal Décaillet

Commentaires

  • Si Karin Keller-Sutter n'a pas d'avis sur les sujets qui occupent le Conseil fédéral, elle en a en revanche de bien singuliers, s'agissant de sa perception des médias...

    D'abord, elle les divise en deux camps: les "sérieux" et les non sérieux". Et pour la distinction (disons l'image), elle se positionne bien sûr en tant qu'arbitre; même si elle accorde sa bénédiction à ceux qui ne gênent pas le Conseil fédéral... C'est ce qu'elle entend par "qualité".

    Lors du récent "Swiss Media Forum", KKS s'est lâchée à philosopher sur le rôle des médias dans le pays. Sa thèse: les gens doivent avoir confiance dans les institutions, sinon elles ne fonctionnent pas. Et de là, elle en déduit que les médias doivent nourrir cette confiance, sinon ils sapent l'État.

    Excusez-moi, mais les médias doivent dire ce qui est; ils doivent remettre en question l'État et ses institutions, ils doivent révéler ce qui ne va pas, même si cela entraîne une perte de confiance de la part de la population envers ceux qui gouvernent.

    Lors de son exposé, elle lâche (embarrassée): «Des erreurs peuvent se produire au sein des institutions, les médias devraient les révéler, c'est une "tâche noble et nécessaire".»
    Manifestement elle s'est encoublée dans le script rédigé par ses assistants... Mais elle se corrige rapidement en dérivant avec l'image du du "chien de garde de la démocratie", elle attribue aux journalistes des races de chiens. Aboyeurs, mordants, chiens de garde enchaînés: l'imagination d'un rédacteur salarié de l'État a vraiment dérapé.

    Sur cette lancée, KKS parle ensuite des médias sérieux et de tous ceux qui s'y opposent. Elle ne dit pas explicitement qui appartient à quel groupe, mais cela devient plus qu'évident. Celui qui a soutenu la politique du Conseil fédéral ces trois dernières années doit être sérieux. Celui qui a posé des questions critiques a sapé la confiance dans les institutions sur les médias sociaux.

    Pour la Conseillère fédérale, tout ce qui est depuis longtemps avéré - l'influence directe des médias provenant de l'entourage du Conseil fédéral, par exemple - est encore une théorie du complot. On fait du tort aux pauvres rédactions en parlant de "presse mensongère". Et elle en conclut tout à fait sérieusement que les médias en tant que "chien de garde" sont menacés parce que de mauvaises personnes les critiquent.

    Je résume: si j'écris que les médias n'assument plus leur rôle de quatrième pouvoir protecteur de la démocratie, alors c'est de ma faute si la démocratie n'est plus protégée ? Ne serait-ce pas plutôt l'inverse ?

    Personne ne critiquerait les médias s'ils faisaient leur travail et jouaient réellement le rôle de chien de garde. Ces dernières années, ils ne l'ont tout simplement pas fait. Au lieu de cela, ils ont diffusé docilement les flux en direct du Conseil fédéral, ont rapporté sans remise en question chaque chiffre ou affirmation colportés par celui-ci, ont renoncé aux questions critiques et ont contribué à répandre la panique.

    Les véritables "chiens de garde" sont les gens sur les médias sociaux qui ont souligné ces omissions et ces manquements des prétendus "médias sérieux". Si cela a conduit à une perte de confiance envers ces médias et envers la Confédération et ses institutions, c'est simplement parce qu'ils ne méritent pas cette confiance.

    Prétendre que les médias "sérieux" sont les chiens de garde de la démocratie relève de la pure satire. Ils en sont les fossoyeurs.

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