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Liberté - Page 1541

  • La rue qui divise


    Edito du 7-8  -  Radio Cité  -  Vendredi 05.09.08  -  07.05h

     
    Le nom de Gabrielle Perret-Gentil vous dit-il quelque chose ? Moi, rien. Comme celui d’Emilie Gourd, d’ailleurs, avant qu’on ne lui donne le nom d’une école, ne me disait rien. C’est ainsi : la culture des grandes figures du féminisme ne fait pas partie de mes passions.

    Gabrielle Perret-Gentil est, nous rappelle la Tribune de Genève de ce matin, une pionnière de l’avortement. Une précurseure, avec un « e » à la fin, je vous prie, du droit d’interruption de grossesse. Fort bien. La chose, en Suisse, a été légalement tranchée, elle a force de loi, le peuple souverain a voté, il n’est pas question de le contester.

    Faut-il pour autant lui donner une rue ? La question divise, puisque le Conseil d’Etat vient de renvoyer sa copie à la Commission cantonale de nomenclature, qui avait pourtant émis un préavis favorable. Alors, côté féministe, on rugit, on vocifère. Rémy Pagani lui-même, du haut de sa hauteur, parle de scandale. Une mobilisation, ajoute la Tribune, s’organise pour que ce projet aboutisse.

    La question, pourtant, mérite d’être posée. Et les autorités compétentes ont parfaitement le droit de prendre leur temps, quelles que soient les pressions communautaristes, dans cette affaire. L’avortement, en Suisse, est certes légal, dans certaines conditions. Mais il divise encore, et il convient de respecter ceux pour qui il continue de poser un problème. Bref, la figure d’une « pionnière », en l’espèce, n’apparaît pas comme la plus rassembleuse.

    On peut donc comprendre que les autorités hésitent. Elles ont à prendre leur décision en toute sérénité, en toute souveraineté. Elles n’ont pas à se laisser impressionner par les revendications sectorielles, les hurlements, les clameurs. Le nom d’une rue, ça doit être quelque chose dans lequel tout le monde se reconnaît. Pas quelque chose qui divise.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • La duchesse de Berry

    Edito du 7-8  -  Radio Cité  -  Jeudi 04.09.08  -  07.05h

     
    Et alors quoi ? Il paraîtrait qu’il ne faudrait pas attaquer les femmes en politique. Les femmes qui exercent un pouvoir. C’est ce que j’ai cru entendre, l’un de ces matins, de la part d’une éminente directrice de théâtre, dans un billet sur une radio publique.

    Les méthodes d’une magistrate de la Ville de Genève avec son personnel, ses cadres supérieurs ou moyens ? Une tonalité d’arrogance, et même cassante, nous confirment de nombreuses sources. Mails il ne faudrait pas en parler.

    Plutôt que de donner son point de vue, il faudrait laisser faire les images du monde. Un sourire, dans un journal dominical, une interview franchement pas trop dérangeante. Et ce Livre d’Or, ces très grandes heures de la duchesse de Berry, il faudrait le laisser passer, sans le tempérer d’une vision critique, en fonction de ce qu’on sait, de ce qu’on a pu établir, au fil des mois, en recoupant les témoignages.

    Que la personne critiquée soit une femme ne joue strictement pour rien dans l’affaire. Ce que nous tentons de dévoiler, ce sont les mécanismes du pouvoir. Hommes, femmes, gauche, droite, aucune importance. Tout pouvoir doit être décodé. Ou alors, nous renonçons à une part cardinale de notre mission.

     

    Pascal Décaillet

  • La queue et les oreilles


    Le PDC et la mort subite de l’éternité

     

    Sur le vif -  Mercredi 03.09.08 – 13.50h

     
    Longtemps, le PDC fut le parti du centre mou. Très peu de grandes figures nationales, dans ses rangs, depuis le départ de Furgler, en 1986. Des présidents de passage, des passe-muraille, transparents comme l’inexistence de Dieu. Une pratique politique, surtout, poussant à ce point le compromis, l’arrondissement des angles, que nulle géométrie mesurable ne se dessinait plus. Ils étaient pour l’économie de marché, mais pas trop. Pour l’Etat, mais pas trop. Pour la famille, sans que personne ne pût comprendre ce que cela recouvrait exactement.

    Et puis, il y a eu le 10 décembre 2003. L’exécution, par le Parlement, de Ruth Metzler, pour pouvoir placer Christoph Blocher. A cette seconde précise, tandis que la dame en noir, remarquable de dignité, faisait ses adieux, le PDC a compris que l’éternité, elle aussi, était mortelle.

    Mais le charme de la mort, c’est qu’elle invite à renaître. Alors, il y eut Doris Leuthard, il y eut Christophe Darbellay, et ce parti, depuis si longtemps assoupi comme un satrape dans sa tiédeur, est reparti au combat. Il est clair, aujourd’hui, qu’il tentera, à la première occasion, la reconquête du deuxième siège au Conseil fédéral. Clair, aussi, qu’il pourrait bien le faire au détriment des radicaux. Encore plus clair que les premiers missiles de Christophe Darbellay sur l’univers de Pascal Couchepin sont à interpréter dans ce sens. Hier, une politique pour la jeunesse décrite, dans un communiqué, comme franchement nulle. Aujourd’hui, le secrétaire général du PDC, Reto Nause, qui met le Président de la Confédération en demeure de brider la marge de manœuvre diplomatique de Micheline Calmy-Rey.

    Pour l’heure, des banderilles. Deux ou trois picadors taquinent la bête. Mais l’heure du matador, dans l’aveugle lumière de l’arène, attend, patiemment, de sonner. Pour la queue et les oreilles, il faudra sans doute attendre. Mais les signaux sont là : le PDC revit. Et il n’a guère l’intention, dans sa Reconquista, de faire des cadeaux à ceux qu’il trouvera sur son chemin.

     

    Pascal Décaillet