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Liberté - Page 1395

  • Mgr Genoud : « La maladie nous grandit »

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    J’ai eu le privilège de rencontrer Mgr Genoud, il y a quelques jours, en compagnie de Fathi Derder, à l’EMS La Providence, en basse ville de Fribourg, pour une édition spéciale du Grand Oral, qui sera diffusée ce dimanche 15 août, jour de l’Assomption.

     

    Nous avons rencontré un malade, au reste parfaitement lucide sur son état. Mais nous avons avant tout rencontré un homme. Il y avait bien le col romain, désormais beaucoup trop large pour le cou amaigri. Il y avait bien la vigilante présence de Nicolas Betticher, l’homme de confiance dont on sait la puissance dans le diocèse, allez disons le Maire du Palais, l’œil aquilin du surintendant, à qui rien n’échappe.

     

    Il y avait tout cela, oui. Mais tout cela s’efface devant le message d’humanité du malade. Jamais, pour moi, Bernard Genoud n’a été à ce point évêque que pendant ce moment de grâce, dans ce bel et paisible établissement, à deux pas de la Sarine.

     

    Évêque, justement parce que dénué de la pompe sacerdotale. Évêque sans crosse, ni mitre, ni rituel de Confirmation, ni huiles, ni cendres, ni courtisans. Évêque, désormais à mille lieues marines du cérémonial princier de la Fête-Dieu. Évêque, orphelin des visites pastorales, volontairement en retrait. Une forme de cloître, « pour se protéger ». Mgr Genoud est un homme seul. Tous les hommes sont seuls.

     

    Mgr Genoud a le cancer. C’est une maladie qui nous ramène à nous-mêmes. À l’essentiel. Quand la souffrance est là, le sentiment d’appartenance à une forme de communauté invisible des malades apparaît. Croyants ou non, athées, agnostiques, cela n’importe pas. La souffrance nous délivre un message. Elle nous « aide à grandir », dira Mgr Genoud, dans l’interview.

     

    Je me suis toujours méfié des prêtres, en chaire, qui parlaient de la souffrance, physique ou morale, sans l’avoir nécessairement trop éprouvée eux-mêmes. Là, avec Bernard Genoud, nous sommes au cœur du sujet. Le verbe est cistercien davantage qu’il n’est baroque. Épuré, sans être sec. La solitude du prélat, à deux pas de la rivière tranquille, le projette au cœur du monde. Le vrai monde : celui de la passion, j’hésite pour la majuscule, je renonce.

     

    Il a fait très beau, ces trois derniers jours, sur mes hauteurs valaisannes. Je m’y suis beaucoup promené, août étant légendairement le plus beau mois de la montagne. Celui de l’Assomption. Celui de la clarté, de la chaleur, de la précision et de la lumière. On dirait que le temps s’arrête. Dimanche dernier, dans la Combe d’Orny, j’ai pensé à Bernard Genoud. À ce qui rassemble les humains. Plutôt qu’à ce qui les sépare. La maladie, dit-il, nous grandit. L’avoir rencontré, ce jour-là, à Fribourg, aussi.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • Rémy Pagani a parfaitement le droit de manifester

     

    Sur le vif - Lundi 09.08.10 - 19.42h

     

    On aime ou non Rémy Pagani, personnellement je l’aime bien. C’est un homme droit et courageux, soucieux du bien public. C’est, aussi, un magistrat surprenant, possédant mieux ses dossiers que certains de ses confrères.

     

    La droite immobilière genevoise, qui a juré de reprendre son poste-clef à l’Aménagement, en a évidemment fait – par spadassins et spadassines interposés – l’homme à abattre. Il faut juste avoir cela à l’esprit en lisant le blog assez hallucinant de la députée libérale Fabienne Gautier. Un texte qui décrit quasiment comme un crime de sang la participation de Rémy le Rouge au cortège des syndicats lors du dépôt du référendum contre la loi d’ouverture des magasins.

     

    Pagani est membre de l’exécutif de la Ville. C’est une personnalité municipale. Le référendum est cantonal. Il n’y a donc strictement aucun problème : le citoyen Pagani est totalement habilité à militer de façon active dans l’échelon supérieur à celui de son rayon d’activité. Son collègue Manuel Tornare n’est-il pas député au Grand Conseil genevois ?

     

    Au reste, on invitera Madame Gautier à s’intéresser aux innombrables apparitions, discours, causeries des personnalités politiques de droite dans l’interminable réseau des amicales immobilières ou patronales, donnant parfois l’impression un peu désagréable que l’Etat n’est pas dans l’Etat, mais juste au service de la petite clique d’hallucinés de cocktails qui régentent la République. À côté de cette consanguinité-là, les sursauts syndicaux de M. Pagani ont l’innocente figure d’un repas aux chandelles avec d’anciennes amours, les plus belles, celles dont on n’arrive jamais vraiment à clore l’histoire.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Une amazone pour sauver l’UDC genevoise

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    Sur le vif - Lundi 09.08.10 - 10.10h

     

    On attendait un fantassin recru d’épreuves, imbibé du Réduit, un homme d’âge mûr, aux ambitions de jeunesse couperosées par le poids des années, bref un bon vieux portrait-robot de l’UDC genevoise, pour reprendre les rênes de ce parti qui flirte avec la mort en oubliant de vivre.

     

    Eh bien non. Il est fort possible que le prochain président de cette flamboyante section soit une présidente. Jeune, charmante, gestionnaire de fortune, députée, toujours de bonne humeur, et surtout… cavalière hors pair ! Les obstacles, Céline Amaudruz les avale. La vie, elle la chevauche. Les difficultés, elle les cravache. La sous-estimer serait une grave erreur. Cette politicienne de trente ans a l’avenir devant elle. Là où d’autres paissent et ruminent, elle fonce dans un galop d’enfer.

     

    Le lundi 30 août prochain, l’UDC genevoise aura son Assemblée générale. Pour la succession du notable vigneron Eric Leyvraz, dont la courtoisie n’a d’égale que la culture, deux listes s’affronteront : à celle du l’orfèvre et Constituant Ludwig Muller s’opposera celle du comité directeur actuel, qui proposera Céline Amaudruz comme présidente. CQFD.

     

    Alors, l’orfèvre ou l’amazone ? La pierre philosophale ou le grand manège de la vie ? Ce qui est sûr, c’est que l’heureux élu aura du boulot : récupérer, au ras du sol, ce qui demeurera de vie dans un parti pulvérisé par le choc des ambitions, noire solitude littéraire par ci, trop cristalline Raison par là, au final l’exceptionnel suicide collectif théâtralisé en technicolor. Dramaturgiquement, génial. Politiquement, abyssal.

     

    Ce lundi 30 août sera un grand jour. On ira chercher Hugues Aufray pour nous chanter « Céline ». Et puis, bien sûr aussi, « Stewball ». On y rêvera de purs sangs, de grands prix, des années qui passent, et des yeux qui restent si beaux, sur le pourpre des joues, quand on évoque la vie. Oui, la vie. Le grand manège. Quelque part dans la sciure d’un grand concours. Loin des pédestres et des besogneux. Condamnés à la rampante banalité d'un régime sans selle.

     

    Pascal Décaillet