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Liberté - Page 1141

  • Le populisme du centre, connaissez ?

     

    Chronique publiée dans GHI - 21.02.13


     
    J’ai toujours détesté le mot « populisme ». Il vient du latin, « peuple », comme vous le savez, et est utilisé d’ordinaire, de nos jours, par ceux qui perdent du terrain, les jaloux, pour qualifier ceux qui en gagnent. On leur reproche quoi ? Mais d’avoir l’oreille du peuple, pardi ! Comme si ça n’était pas exactement la vocation de tout parti politique. En général, ce sont les partis de centre droit ou de centre gauche, les partis de pouvoir, ceux qui se partagent les prébendes, qui utilisent ce terme contre les marges, à la gauche de la gauche, la droite de la droite, voire les partis en émergence. Populisme de gauche. Populisme de droite. Soit. Mais saviez-vous qu’il existait un puissant populisme du centre ? Nous l’allons démontrer.


     
    Le populisme du centre, c’est appeler les gens à voter pour soi, sous prétexte qu’on est un parti « gouvernemental ». Autrement dit : « Nous occupons aujourd’hui le pouvoir, nous nous y sentons fort bien, soyez gentils de ne pas nous en déloger ». Un peu court, évidemment. Alors, on invente un sophisme : on dit qu’on est gouvernemental, parce qu’on pratique le consensus, et non la confrontation. Traduction : « Nous avons tissé des alliances avec les plus forts, fussent-ils nos pires ennemis, pour nous maintenir au pouvoir, vous n’allez tout de même pas nous virer. ». Autre truisme hallucinogène, faire croire que les opposants, ceux qui réclament une place au pouvoir, n’ont rien à proposer. En clair : « Veuillez nous écouter, nous, et fermer vos oreilles lorsqu’ils parlent, eux, car nous voulons demeurer au pouvoir ».


     
    Il arrive hélas que le populisme du centre aille plus loin. Ainsi, lorsque le PDC Luc Barthassat, candidat au Conseil d’Etat, au demeurant le meilleur des hommes, déclare à nos confrères du Courrier, à propos des transfuges : « Quand on a défendu des idées et des valeurs, partir sans broncher dans une formation à moitié raciste n’est pas sérieux ». C’est le populisme par l’hyperbole : outre qu’on aimerait en savoir plus sur cette étrange notion philosophique de « semi-racisme », on se dit que le sympathique conseiller national pousse un peu le bouchon : défendre la préférence à l’emploi local est une chose, le racisme en est, Dieu merci, une tout autre. Mais dans la bouche de M. Barthassat, ça passe. Parce qu’il est sympa, populaire, populiste tiens lui aussi, un jour les sans-papiers, le lendemain les chats, tous les sujets de société qui touchent la fibre. Un sacré malin, à vrai dire, qui a compris bien des choses pour atteindre directement le cœur des gens, je ne lui en fais pour ma part nul grief.
     


    Mais enfin, en quoi M. Barthassat serait-il moins populiste, dans ses méthodes de communication, que MM Golay ou Poggia ? Lui, comme eux, sait s’adresser au peuple. Il parle, on le comprend. En quoi serait-ce un crime ? Laissons-le vivre, laissons vivre aussi les partis de la Marge qui aimeraient participer aux affaires, ce est qui bien la moindre en politique. Et cessons d’utiliser à tous crins ce terme de populisme qui devrait être, au fond, un compliment. Juste dévoyé par la rancœur des jaloux. Des pète-sec. Et des inaptes à l’image.
     


    Pascal Décaillet
     
     

     

  • En Suisse, c'est le peuple qui décide

     

    Sur le vif - Dimanche 17.02.13 - 17.10h

     

    Non, désolé, comme citoyen de ce canton, électeur depuis ma majorité, soit depuis 34 ans, je n’ai pas composé (à la main, s’il vous plaît) ma liste du Grand Conseil, en octobre 2009, pour que les élus de cette Chambre, ni ceux de l’exécutif d’ailleurs, aillent passer, pour faire moderne et aller dans le sens du vent et d’une disparition fantasmée des frontières, des accords qui n’ont rien à voir avec leur mission.

     

    Désolé encore, mais la notion autoproclamée de « Grand Genève », fruit des cogitations d’une petite clique transfrontalière, ne bénéficie de strictement aucune légitimité démocratique. C’est une usine à gaz, un machin, concocté d’en haut, comme si Genève n’était pas membre d’une Confédération qui s’appelle la Suisse, et avait toute latitude, souverainement, pour recomposer un espace politique, sans que le peuple ait son mot à dire.

     

    S’ils veulent se lancer dans ce genre d’aventure, bien sûr qu’il doit y avoir consultation du corps électoral élargi, celui que pour faire court on appelle « peuple » : l’ensemble des citoyens de ce canton. S’ils disent oui, très bien, nous nous inclinerons. Car enfin, l’enjeu n’est pas le prix du sel, ni la construction d’un nouveau rond-point, mais une révolution totale dans la manière d’envisager nos rapports, y compris institutionnels, avec nos voisins. Cela, Messieurs, ne se décrète pas d’en haut. Cela mérite un immense débat populaire, avec des pour et des contre, des arguments. Et, un beau dimanche, le souverain qui tranche. Et le souverain, Cher Jean-François Mabut, en Suisse, ce ne sont pas les convenances horizontales des notables. C’est le peuple.

     

    Pascal Décaillet

     

     

  • Douaniers sans frontières

     

    Sur le vif - Samedi 16.02.13 - 19.43h

     

    Jamais reçu, depuis des années, autant de courrier positif que pour mon papier de la semaine dernière, dans GHI, « Grand Genève : arrêtez de nous bassiner ! ». Les lecteurs me remercient d’avoir dit tout haut ce qu’apparemment, beaucoup d’entre eux pensent tout bas. Bien plus nombreux qu’on ne l’imagine ! Snobisme et prétention de ces deux mots, qui sonnent comme un Gross Paris provincial. Mais surtout, machin, machinerie, concoctée horizontalement par des gens n’ayant nullement été mandatés par leurs peuples pour cela. Truc de cocktails. On passe des accords, comme ça, on veut ignorer l’existence d’une frontière. On prend des options sur l’avenir sans en référer à Berne, ni sans doute à Paris. Mais moi, c’est plutôt Berne qui m’intéresse.

     

    Dernier épisode en date : le stade. Au nom du Gross Genf. Et on y va, des clubs français sur la prairie, et on n’aurait demandé à personne, et le peuple, on le mettrait devant le fait accompli. Vous avez souvenance, vous, d’avoir été consultés sur le « Grand Genève » ? Ce machin, il a une légitimité démocratique ? Une armature institutionnelle ? Il émane d’une puissante volonté du peuple souverain ?

     

    Bien sûr, nous devons bien nous entendre avec nos voisins. Jamais dit le contraire. Et jamais, sous ma plume, la moindre remarque désobligeante sur nos amis de l’Ain ou de la Haute-Savoie. Ni sur les frontaliers. Mais la collaboration, pas comme ça. Pas par une usine à gaz, imposée d’en haut par quelques élus tétanisés par l’illusion d’un monde – bien irréel – où les frontières auraient disparu. Désolé, mais pour l’heure, elles sont encore là. Il y a un pays qui s’appelle la Suisse. Et un autre, qui s’appelle la France. Dieu sait, à titre personnel, si je les aime les deux, si j’en connais l’Histoire, et les reliefs, et les végétations, et les livres. Mais comme citoyen, il se trouve que je suis Suisse. On me permettra de défendre en priorité les intérêts politiques, économiques, sociaux et stratégiques de mon pays. Dire cela, ça n’est en rien nier la nécessité d’un bon voisinage. C’est juste remettre les pendules à l’heure.

     

    Et puis, tiens, s’ils veulent absolument le Grand Genève, je leur suggère un truc amusant : faire voter le peuple. Le résultat pourrait être assez fracassant. Et refroidissant pour une bonne génération.

     

    Pascal Décaillet