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Sur le vif - Page 1113

  • Isabel Rochat est-elle aphone ?

     

     

    Sur le vif - Vendredi 22.01.10 - 11.20h

     

    Suite à une excellente série de reportages de ma consœur Jennifer Covo, sur Léman Bleu, le gouvernement genevois s’est ému de la présence d’enfants, sur les genoux de leurs mamans en train de mendier dans les rues de Genève, parfois par un froid glacial. Ministre de tutelle du Service de la protection des mineurs, le conseiller d’Etat Charles Beer s’en est fort bien expliqué, avec un propos qui allie humanisme, respect des minorités, mais tout de même application de la loi.

    La décision du Conseil d’Etat d’appliquer la clause « péril » qui permet de retirer (pour un temps) les enfants à leurs parents, date d’avant-hier. Coïncidence ? Il se trouve qu’hier déjà, quelques heures après l'annonce de la décision gouvernementale, la police intervenait au petit matin à l’Armée du Salut, pour enlever trois enfants à leur maman, comme le relatent, dans le Matin d’aujourd’hui, Dominique Botti et Mathieu Cupelin. Il s’agirait, selon la police, d’une « opération de routine » n’ayant rien à voir avec les nouvelles mesures du Conseil d’Etat. La maman aurait à accomplir une peine pour infraction à la loi sur le séjour des étrangers.

    « Rien à voir » : Charles Beer en est-il si sûr ? N'a-ton pas voulu, avec un zèle excessif et franchement déplacé, faire très vite un exemple? A ces questions, le ministre tient à préciser qu’il n’est pas le responsable de la police. Et que donc, dans cette affaire, tout ne dépend pas de lui. Ce qui est exact.

    De fait. Il existe, bel et bien, à Genève, une ministre de la police. Elle s’appelle Isabel Rochat. Et nul, mais vraiment nul, n’aurait une seule seconde l’idée de mettre en cause sa sagacité, ni sa légitimité, encore moins sa compétence. Et elle semble, elle aussi, avoir souffert des grands froids que nous avons vécus il y a une dizaine de jours à Genève. Au point d’en avoir perdu, par une aphonie qu’on espère évidemment provisoire, l’usage de la parole sur ce sujet. Il nous semblait tout de même qu’elle aurait pu avoir quelque autorité ou quelque pertinence à s’y exprimer.

    Allons, Madame Rochat, quelques pastilles. Une bonne dose de miel. Des tisanes de thym. Et votre voix reviendra ! Nous nous en réjouissons, car elle a toujours été douce à nos misérables oreilles.

     

    Pascal Décaillet

     

  • Les apparatchiks

     

     

    On voudra bien me pardonner de reprendre ici une chronique que j'avais rédigée pour la Revue Choisir en janvier 2005. Toute ressemblance avec les mésaventures de Monsieur Claude Béglé étant évidemment aussi fortuite que le passage d'une souris grise sur l'orteil sourcilleux d'un géant jaune.

     

    Ils sont là depuis l'aube des temps, l'Egypte ancienne, Byzance la complexe, la Russie tsariste, la Suisse de la culture: ils sont assis, sûrs d'eux, conscients de leur éternité, ils ont l'arrogante tranquillité des espèces qui auraient précédé l'humanité et seraient pénétrées par la génétique certitude, le jour venu, post-apocalyptique, de lui survivre. Pour les désigner, il faut rendre hommage à la langue russe, sonore et métalliquement charnelle, qui a su leur inventer un nom: les apparatchiks.

     

    Ils existent évidemment partout, dans toutes les sociétés, toutes les entreprises, les grands corps de l'Etat, les médias, les réseaux associatifs, les syndicats d'enseignants, les suppôts professionnels du patronat, les Offices fédéraux, et tout autant dans le privé, ce qui est encore plus surréaliste, comme si tout groupement humain sécrétait  son quota, peut-être invariant d'ailleurs, d'Abyssinie à la Prusse orientale, d'apparatchiks.

     

    Un apparatchik n'est pas nécessairement un inutile. Il doit bien avoir une fonction, puisqu'il existe, jusque dans les firmes les plus sélectives, et qui ne sont pas spécialement enclines, en ces périodes difficiles, à faire des cadeaux. L'apparatchik, généralement, ne s'intéresse que très peu, et de très loin, au produit fabriqué par l'entreprise. Il n'est pas un créatif, encore moins un imaginatif, son enthousiasme est gris comme un stratus d'automne, et pourtant il est là, comme un meuble. L'entreprise le garde.

     

    Car la fonction première de l'apparatchik, et nul n'est besoin d'être spécialiste de Pouchkine pour le saisir, c'est la conservation, l'entretien jaloux, opiniâtre, de l'appareil. Chez Fiat, côtoyant sans les voir les meilleurs dessinateurs de prototypes, l'apparatchik s'occuperait sans doute du journal d'entreprise, ou du cahier de doléances des mécontents, ou du rayon végétarien de la cafétéria, ou de la collecte pour la baignade de bureau sur les bords du Pô, toutes choses éminemment respectables, mais d'un rapport assez lointain, vous en conviendrez, avec la fabrication de voitures. Laquelle me semble tout de même, pour Fiat, une activité assez importante.

     

    Les apparatchiks sont souvent sociables, attachent de l'importance à la bonne ambiance de l'entreprise, n'oublient pas les anniversaires de leurs collègues, les pressent de rester au lit et de ne surtout pas venir travailler au-delà de 37,5 de température corporelle. Comme ils sont là pour l'éternité, ils prennent le temps. Les apparatchiks marchent lentement. Certains d'entre eux fument la pipe, qu'ils ont soin, d'ailleurs, de bourrer avec application et minutie, car, un être humain n'étant jamais totalement imparfait, un apparatchik peut s'avérer d'un rare et appréciable perfectionnisme. Les apparatchiks sont des horlogers, avec juste un point un peu gênant: ils ne produisent jamais la moindre montre. D'ailleurs qu'importe de savoir l'heure, quand on est soi-même éternel?

     

    Les apparatchiks s'associent et s'assemblent. Ils aiment évoquer leurs problèmes, ensemble, devant une tisane, si possible pas trop chaude. Chez Fiat, à Turin, ils ne parleraient jamais du tout dernier modèle, le dernier cri, la voiture de rêve pour tous les Italiens et toute la planète, celle qui partirait à la conquête du monde et ferait exploser les parts de marché. Non. Ils auraient des soucis plus intérieurs: le prochain repas du comité d'entreprise, par exemple. Ou la demande d'un meilleur équilibre nutritif dans les menus de la cantine. Car un apparatchik est très soucieux, toujours, du rapport chiffré entre protéines et glucides, et, si les lipides s'y mettent aussi, il sort immédiatement sa calculette. Dans la poche extérieure gauche. A côté du tabac pour pipe. On est éternel, mais on se conserve, tout de même.

     

    Un apparatchik, prenons toujours notre Turinois de chez Fiat, déteste généralement le cambouis des chaînes de montage. C'est vrai, ces ateliers salissants et bruyants, ces milliers de voitures en devenir, toujours désespérément les mêmes, le bleu de travail de ces prolétaires piémontais, tout cela, se demande l'apparatchik, est-il bien nécessaire à l'entreprise? Car notre apparatchik de chez Fiat a ceci de particulier qu'il n'aime guère les voitures. Il se déplace d'ailleurs toujours en tram, ce qui lui permet d'apprécier plus sereinement les richesses architecturales de Turin. Il éprouve, de plus, un souverain mépris pour la légendaire fascination exercée par la bagnole sur ses compatriotes italiens. Au fond de lui, il en veut à la Fiat de fabriquer des voitures, de caresser, dans le sens du poil, l'égoïsme automobile de la Péninsule.

     

    Car l'apparatchik n'est pas une brute. Il aimerait bien, du haut de ses sandales, une humanité changée. Plus douce. Voluptueuse comme peut l'être la dernière volute de la dernière pipe d'une journée d'été. Le soir, sur les rives du Pô. Loin de ces brutes épaisses, pleines de cambouis, qui s'obstinent, allez savoir pourquoi, à construire des voitures.

     

    Pascal Décaillet

     

     

     

     

  • L’exceptionnel courage de Monsieur « Déblogueur »

     

    Insulter tous azimuts, jeter l’opprobre, cracher le fiel, ce sont, depuis des mois, les passionnantes contributions du nommé « Déblogueur ». C’est évidemment son droit, si ça l’amuse.

    « Déblogueur » ne propose jamais la moindre réflexion en amont, il n’agit qu’en réaction aux textes des autres. Il n’attaque jamais les idées, mais directement les personnes, qu’il couvre d’injures. C’est encore son droit, si ça peut lui faire du bien.

    Monsieur « Déblogueur » a sûrement un nom et un prénom. Il est juste un peu dommage qu’il n’ait pas l’élémentaire courage de les dévoiler. J’ai déjà de sérieux doutes (sauf cas très rares) sur la justification de l’anonymat dans les blogs. Mais passer son temps à attaquer la terre entière sous la confortable et trop facile protection du masque, c’est le degré absolu de la lâcheté. Il fallait une bonne fois que cela fût dit. Et que le Déblogueur, par quelqu'un qui signe, fût déblogué.

     

    Pascal Décaillet